LE COMPLOT


Benoît de Bonvoisin a été victime d’un complot politico-judiciaire que les historiens compareront à l’affaire Dreyfus en France. Il y a, en effet, de grandes similitudes :
- Mensonge d’une entité d’Etat, en France,  l’Armée
   et en Belgique, la Sûreté de l’Etat.                                                          
- Campagne médiatique sans précédent dans les deux pays
   ce qui s’explique par le fait que des journalistes ont été stipendiés.
- Ministère public aux ordres de l’exécutif dans les deux pays,
   le gouvernement français ne supportant pas que l’Armée,
   le gouvernement belge que la Sûreté de l’Etat
   puissent être mises en cause malgré leur culpabilité évidente.

 Une des grandes différences réside dans le fait que si la France a reconnu son erreur au bout de douze ans, la Belgique   -  tant la Sûreté de l’Etat, que le/la Ministre de la Justice, ministre de tutelle de la Sûreté de l’Etat, que le pouvoir exécutif  -  s’y est toujours refusée depuis 39 ans du fait de la profonde implication du politique dès le début de ce complot, comme le constateront des jurisconsultes de réputation internationale et comme cela ressort de l’entretien de trois quarts d’heure que Maître José Saels, avocat de Benoît de Bonvoisin eut, le 4 août 1994, avec le Procureur Général André Van Oudenhove. Concernant cette affaire, celui-ci, rapporta Maître Saels, lui déclara qu’il ne comprend pas le point de vue adopté par le monde politique, qu’il regrette qu’il n’y ait pas d’ouverture du gouvernement - à majorité socialiste, 9 membres sur 16 -, qu’il est embarrassé par cette affaire qui va entacher sa fonction. Et, le 11 août 1994, ayant signalé avoir rencontré à cet égard le Ministre de la Justice - Melchior Wathelet, de plus en plus préoccupé par le comportement d’Albert Raes -, André Van Oudenhove lui fit alors des commentaires similaires.
On a ainsi, ici, un exemple flagrant du non-respect du principe de la séparation des pouvoirs – législatif, exécutif, judiciaire. Et la violation de ce principe de base dans une démocratie n’est pas un cas unique en Belgique. En effet, en décembre 2014, Thierry Marchandise, ancien procureur du Roi à Charleroi, confiait à la Libre Belgique : « Le pouvoir judiciaire est affaibli par le politique. C’est dramatique, car cela porte atteinte à la démocratie ».
L’indépendance de la justice est un impératif démocratique qui, dans le cas qui nous occupe ici, fut bafouée par la magistrature qui s’attacha à couvrir les actes de la Sûreté de l’Etat et de son chef Raes. On peut remarquer que c’est le même aspect des choses qui est à la base de la révélation du scandale du Watergate lorsque les auditions parlementaires révélèrent que le procureur général de Richard Nixon, John Mitchell, avait participé activement à couvrir les actes de la Maison Blanche
 
D’où la nécessité de préciser enfin ici ce qui s’est réellement passé, la vérité ayant ses droits, d’une part pour contrer les allégations fallacieuses ayant été écrites et se trouvant aujourd’hui sur internet et d’autre part, pour les historiens de demain qui mettront en lumière que cette machination politico-judiciaire avait pour but, avec la collaboration active d’un ministre socialiste de la justice, d’éliminer de la scène politique un parti centriste naissant qui rencontrait un succès croissant.
 
Pourquoi pas les historiens d’aujourd’hui ? Parce que ceux-ci auraient besoin d’un certain recul pour appréhender la réalité des circonstances sous-jacentes à ce complot -  qui dépasse l’entendement et est donc difficile à concevoir  -, dans un pays de plus en plus soumis à la notion du « politiquement correct » qu’Hervé Hasquin, qui fut notamment recteur de l’ULB, juge dangereux pour la démocratie, soulignant que la liberté d’expression y est moins libre aujourd’hui qu’il y a 25 ans du fait d’une censure du langage tendant à faire régner une certaine bien-pensance.
 
Comme le disait Elie Wiesel, rescapé des camps d’extermination nazis, ce qui est arrivé doit être raconté et pensé afin d’éviter que l’Histoire ne se répète.
 
Le lecteur qui sera quelque peu surpris par les sérieuses dérives qu’ont pu connaître les institutions du pays, lira avec intérêt le livre « l’Etat coupable » écrit par feu Maître Mario Spandre. Celui-ci, dans une lettre adressée à son éditeur, le résumait en écrivant : « c’est l’énumération et le résumé le plus saisissant des méfaits que peuvent commettre ceux qui, de près ou de loin, touchent au fonctionnement de la Justice - les ministres, les magistrats des Cours d’Appel, de Première Instance, de l’instruction, les parquets d’Appel et de Première Instance, les fonctionnaires de la Sûreté de l’Etat, les journalistes etc ».
 
Quelques années avant son décès, Maître Julien Pierre soulignait que le complot monté contre Benoît de Bonvoisin ne pourrait plus se reproduire de nos jours. Un parti fragilisé par la montée d’un autre parti ne serait plus tenté de monter une machination pour le perdre, disait-il, car le pouvoir judiciaire a maintenant repris son indépendance vis-à-vis du pouvoir politique.
 
On remarquera au cours de la lecture que différentes décisions de justice sont commentées et même parfois critiquées, et pour certaines le nom des magistrats les ayant prononcées y est mentionné.
On peut s’interroger sur le conflit de valeurs qui pourrait exister entre d’une part le respect que l’on doit aux institutions, notamment le pouvoir judiciaire et ses représentants, et d’autre part la liberté d’expression de l’avocat qui ayant décelé des dysfonctionnements de la justice, a le droit de les dénoncer, la Justice devant avoir le courage d’entendre une critique constructive.
La Cour européenne des droits de l’homme à Strasbourg a été amenée à se pencher sur cette problématique, notamment dans le cas de l’arrêt Morice d’avril 2015. Il en résulte que la liberté d’expression de l’avocat, parfois confronté à la « raison d’Etat » ou rencontrant des juges dont l’éthique ou le professionnalisme laisse à désirer, ne peut tolérer de restriction. Celui-ci est donc en droit de s’exprimer pour autant qu’il évite l’écueil de verser dans l’insulte personnelle du magistrat et qu’il concentre sur une base factuelle suffisante l’objet précis du dysfonctionnement qu’il dénonce.
 
 
Pour faciliter la lecture du mémorandum qui suit, entériné par Maître Julien Pierre, un résumé succinct est ici proposé.
 
Dans les années 70, les socialistes et l’aile gauche du PSC (Parti social-chrétien), la Démocratie chrétienne dirigée par le député et par la suite sénateur Alfred Califice, ancien secrétaire permanent de la CSC (Confédération des syndicats chrétiens), sont inquiets de voir le succès croissant au sein du PSC du mouvement centriste CEPIC. Il faut rappeler que la CSC prônait lors de son 26eme Congrès général en décembre 1975 l’établissement de droits de succession de 100% de façon à progressivement faire passer à l’Etat la propriété immobilière.
Comme on pouvait le lire dans l’Echo de la Bourse du 20 décembre 1976, « le C.E.P.I.C. a pris de plus en plus d’influence dans la société belge et au sein du P.S.C. Cohérent et raisonnable, ce mouvement que l’on pourrait qualifier de centriste semble bien s’être imposé de manière irréversible dans le parti. Cela fait d’autant moins plaisir à certains démocrates chrétiens qu’ils sont plus à gauche ».
 
La solution qui se présente alors au parti socialiste pour tenter d’éliminer le CEPIC est de le discréditer, tant le parti que ses dirigeants en les taxant fallacieusement d’extrême droite, cela à travers une campagne médiatique appropriée.
 
C’est ainsi que le socialiste Philippe Moureaux, qui en octobre 1980 vient d’être nommé Ministre de la Justice – il a la tutelle de la Sûreté de l’Etat –, demande à Albert Raes, administrateur-général de la Sûreté, un rapport sur Benoît de Bonvoisin, personnalité marquante du CEPIC. Comme le relèvera le Comité R (Comité permanent de contrôle des services de renseignements et de sécurité) dans son rapport d’activités de 2009, la Sûreté ne dispose à l’époque que de peu d’éléments concernant Benoît de Bonvoisin. Suite à la demande de son chef hiérarchique, Raes fait un rapport sur Benoît de Bonvoisin, en utilisant le mode conditionnel. Philippe Moureaux enjoint alors Raes à produire un rapport plus catégorique. Raes comprend le message du chef du Parquet et s’exécute en ordonnant à son bras droit Jacques De Vlieghere de remanier le texte en transformant le mode conditionnel en indicatif présent.
 
 
 
·       Le 11 mai 1981, le rapport contrefait sera communiqué sous pli marqué                  «confidentiel» aux 22 sénateurs composant la Commission Parlementaire relative aux problèmes posés par le maintien de l’ordre et des milices privées, commission présidée par le sénateur Jos Wijninckx.
 
Philippe Moureaux déclara à la Chambre, en juillet 1981, n’y avoir rien changé par rapport à la note produite par Raes. Or, le Comité Supérieur de Contrôle infirmera cette déclaration en soulignant des changements qui ont été apportés par Moureaux de façon à « polariser » l’attention sur Benoît de Bonvoisin.
Ce n’est pas de la démocratie mais de la particratie.
A noter que dans un article intitulé « Philippe Moureaux le machiavélique », Le Vif écrivait « à quel point il pouvait barbouzer », en parlant de cette note. Or, Philippe Moureaux, sous l’intitulé « Justice et Liberté avant tout », écrivait dans son tract électoral comme premier candidat à la Chambre : « Plus de liberté, c’est respecter de manière absolue la vie privée du citoyen, c’est empêcher tous les abus de pouvoir ». Quelle hypocrisie de sa part !
Cette manipulation de Raes par Philippe Moureaux n’allait pas amener ce dernier à avoir de l’estime pour la Sûreté. En effet, en février 2013, les agents de la Sûreté furent fort mécontents quand Philippe Moureaux déclara qu’il n’avait « jamais eu beaucoup de respect » pour eux.
 
Cette attitude répréhensible de Philippe Moureaux allait pour les décennies à venir, chaque fois que Raes était directement ou indirectement impliqué, d’une part vicier le fonctionnement du Parquet qui par tous les moyens voulait s’assurer de l’impunité de Raes, et conduire ainsi au dévoiement du Ministère Public. Et d’autre part, percoler vers la magistrature assise qui ne pouvant qu’être consciente du comportement délictueux du Ministre de la Justice et de la Sûreté de l’Etat, quand les avocats de Benoît de Bonvoisin avançaient qu’il était « victime d’une vaste machination politique », allait être tentée de minimiser les dégâts pour un pays qui faisait face à une situation antinomique à celle qui prévaut dans un Etat de droit. Comme l’observait Robert Badinter, Garde des Sceaux de Mitterrand, la Justice est relative et liée à une époque et à un pouvoir.
 
Ceci est surprenant dans un pays où le Premier Ministre soulève pratiquement chaque année à l’Assemblée générale des Nations Unies à New York que la Belgique est un Etat de droit, comme le précisa notamment en 2013 Elio di Rupo, qui en plus y critiqua ceux qui, illégalement, bénéficient d’une impunité. Tel processus de laisser-aller moral répété en dit long sur l’évolution démocratique altérée du pays de plus en plus lassé de sa classe politique et du fonctionnement de certaines de ses institutions. Ici, c’est le pouvoir judiciaire où quelques magistrats allaient souiller, de façon indélébile, l’histoire et les traditions de la Justice et ternir la légitimité de leurs fonctions en  o u b l i a n t  que, d’après leur serment, ils se doivent de les exercer avec loyauté et avec le souci de la dignité des personnes.
 
·       Le 19 mai, à la suite d’une fuite, un résumé de cette note contrefaite est publié dans le journal socialiste De Morgen. Cette note désigne le CEPIC, six de ses dirigeants et souligne particulièrement le rôle de Benoît de Bonvoisin, notamment comme financier du Front de la Jeunesse, ce qui allait rapidement être démontré comme étant faux.
 
Concernant cette fuite, Philippe Moureaux refusera de faire organiser une enquête ou de déposer plainte.
 
·       Le 21 mai, soit deux jours après la publication de la note, la Commission est convoquée pour une réunion le 27 mai à 10 heures. Son ordre du jour contient notamment : « le problème des relations entre le Nouvel Europe Magazine (NEM), les clubs Nem, le Front de la Jeunesse (FJ) d’une part, et le Cépic (Centre Politique des Indépendants et des Cadres chrétiens), d’autre part. »
 
Les historiens seront amenés à se pencher sur la complicité ayant existé entre le socialiste Philippe Moureaux et le socialiste Jos Wijninckx. En effet, comment expliquer que la copie de l’original de la lettre qualifiée confidentielle, par laquelle Philippe Moureaux transmettait le rapport confidentiel à Jos Wijninckx, s’est retrouvée en France à la chaîne de télévision TF1. Or, la jurisprudence considère que la publication d’un document confidentiel constitue un recel dans le chef de celui qui en fait usage, dès lors que cette publication ne peut être que le résultat de la violation du secret professionnel, soit de l’expéditeur, Philippe Moureaux, soit de son destinataire, Jos Wijninckx.
 
Le rapport contrefait de Raes impliquait Benoît de Bonvoisin dans le financement du Front de la Jeunesse. Dès 1981, cette accusation allait s’avérer fausse : en effet, les dirigeants du Front de la Jeunesse furent condamnés sans que Benoît de Bonvoisin n’ait été inculpé ni même interrogé. On a vu le Parquet plus respectueux de la réputation d’autrui et émettre un démenti dans des cas semblables. Mais dans cette affaire, s’abstenir et laisser les médias – financés dans certains cas par les fonds secrets de la Sûreté, voir plus bas – accabler Benoît de Bonvoisin de financier de l’extrême droite, c’est poser la question : n’y a-t-il pas eu intention de nuire ?
 
Mais il y a pire. Le faux rapport de Raes ne liait pas Benoît de Bonvoisin à des milices privées. Or, la Commission étant terminée, le Parquet – dont le chef, rappelons-le, est Philippe Moureaux  – ouvrit à cet égard une information judiciaire sur Benoît de Bonvoisin. Là aussi, il ne fut jamais inculpé, ni même interrogé. Et le Parquet à nouveau s’abstint de tout démenti.
 
Mais il y a encore pire : malgré la détermination de Maître Saels à obtenir copie du dossier « milices privées », le Parquet le refusa pendant plusieurs années. Mais l’avocat réitéra sa demande avec obstination. Finalement le 16 avril 1987, soit six ans plus tard, le Parquet acquiesça en mentionnant qu’ « autorisation lui est donnée de prendre connaissance du dossier, aucune autorisation n’étant donnée de lever une photocopie. » L’avocat pouvait donc prendre connaissance du dossier mais il lui était interdit de prendre une copie qu’il aurait ainsi pu communiquer aux medias afin de restaurer la réputation de Benoît de Bonvoisin. A nouveau, intention de nuire ?
A noter que ce dossier qui comporte 14 pièces numérotées au crayon, méthode inusitée, ne mentionne pas le nom de Benoît de Bonvoisin, ne traite pas de l’aspect milices privées et est considéré par certains comme un faux judiciaire.
 
Ce qui dépasse l’entendement, c’est que Philippe Moureaux sait lors de son départ du Ministère de la Justice en décembre 1981 que Benoît de Bonvoisin n’est en rien concerné dans le dossier « milices privées » qu’il a fait ouvrir. Et lorsqu’il devient à la fin 1981 ministre-président de la Communauté Française de Belgique, il fait financer par elle - avec des fonds publics ! - le film l’Orchestre Noir qui lie Benoît de Bonvoisin avec des milices privées. Ce film fut conçu avec la collaboration de Georges-Henri Beauthier, avocat d’Albert Raes. Abus de pouvoir pour nuire à un citoyen que l’on désire éliminer de la scène politique ?
 
Le (faux) rapport de Raes mentionnait aussi que Benoît de Bonvoisin avait tenté d’héberger dans la propriété familiale un néo-nazi en fuite, nommé Eckerard Weil. Dans le cadre de ce dossier, Benoît de Bonvoisin ne sera non plus jamais interrogé. Le 24 octobre 1983, soit deux ans et demi plus tard, le Procureur du Roi, F. Poelman, écrivit à Maître Saels que dans le dossier Eckerard Weil « il n’est nullement question de votre client ». Ici également aucun démenti du Parquet que dans d’autres dossiers on a vu plus soucieux de rétablir une vérité bafouée.
 
·       La Commission Wijninckx met fin à ses travaux le 24 juin 1981. Pourquoi ?
 
Le 27 mai 1981, la Commission s’était réunie et la publication, le 19 mai 1981, dans le journal De Morgen suscita une longue et difficile discussion sur la mission de la Commission. Certains membres estiment, en effet, que de semblables révélations justifient la continuation par la Commission des investigations nécessaires… Leur but est de permettre aux personnes mises en cause d’être entendues, de vérifier la fiabilité des informations recueillies par les Services de la Sûreté et éclairer la façon dont ces renseignements sont utilisés par les autorités auxquelles ils sont transmis.
 
Cette même réflexion se retrouve dans les débats parlementaires qui ont suivi, débats souvent critiques et houleux. Ainsi peut-on y relever : notre régime de liberté démocratique se trouve blessé, l’honneur, la respectabilité d’un mouvement et celui des personnes citées ont été injustement ternis. Il est urgent que la situation soit clarifiée, mais cela n’est pas suffisant.
 
Les dommages créés doivent être réparés - ce ne sera pas le cas, l’Etat (de droit ?) a toujours écarté cette exigence démocratique - et les responsables à tous les niveaux doivent être sanctionnés - l’Etat (de droit ?) s’y est toujours refusé -. Il est inadmissible, insupportable, aussi bien pour la crédibilité de la Commission à laquelle elle était destinée que pour son opinion qui a droit à la vérité, qu’une note de la Sûreté ait été établie avec une telle légèreté et se soit révélée au fur et à mesure de l’enquête, être un tissu de calomnies… En tout état de cause, il serait scandaleux de ne pas réhabiliter ceux qui auront été innocentés après avoir été cités dans la note - l’Etat de droit ? s’y est toujours opposé - . Est soulignée l’attitude partisane du Ministre de la Justice visant à influencer et à politiser les instructions judiciaires, ainsi que les déclarations rapportées par la presse, qui mettent en cause les principes de la séparation des pouvoirs et de l’indépendance de la magistrature.
 
En mettant ainsi précipitamment fin à son enquête, estime Serge Moureaux, membre de la Commission, sénateur FDF à l’époque et frère de Philippe Moureaux, la Commission s’est ridiculisée, insinuant que par cette attitude elle va se décrédibiliser vis-à-vis de l’opinion publique.
 
Mais pourquoi une telle précipitation à terminer les travaux de la Commission qui a soulevé de sérieux problèmes non résolus ? En fait, elle aurait souhaité obtenir une prolongation de son mandat. Mais le Parlement s’y opposa. Pourquoi ?
Roger Lallemand, membre de la Commission, sénateur socialiste, confia à Maître Saels que si la Commission continuait ses travaux, on aurait été amené à mettre au jour les incongruités de la Sûreté. Il n’est dès lors pas surprenant que Roger Lallemand en tant que président de la Commission parlementaire Gladio instituée en 1991, refusa que Benoît de Bonvoisin y soit entendu. Ceci démontre ce que le professeur Bernard Bouloc (Professeur de Droit pénal à la Sorbonne - Paris I) appelle, dans un mémorandum, l’«efficacité des réseaux protectionnels de la Sûreté de l’Etat » en Belgique.
 
La commission étant terminée, deux personnes savent alors que la note est fausse : Albert Raes et Philippe Moureaux qui, avec fourberie, déclara au Sénat le 9 juillet 1981 : « dans cette affaire extrêmement délicate, j’ai fait preuve à mon sens, d’une réserve dont je m’efforcerai de conserver l’essentiel » !


 
AVANT PROPOS 


Avec divers confrères j’ai eu l’honneur d’être l’avocat de Benoît de BONVOISIN.
 
Pendant près d’un quart de siècle !
 
Le lecteur peut donc considérer que je suis parfaitement au courant des diverses procédures judiciaires qu’il a eu à subir et qui toutes se conclurent par des acquittements à l’exception de cette affaire LMCI.
 
Celle-ci se solda par une confirmation de condamnation après pourtant que la Cour de Cassation eût admis la recevabilité d’une requête en révision, ce qui est à mettre en exergue car très rare. Par la suite intervint un rejet de révision par la Cour d’Appel, parfaitement indigne et à tous égards inacceptable car Benoit de BONVOISIN était innocent là aussi.
 
Je peux affirmer, après près de quarante années d’exercice de la profession d’avocat, que les affaires judiciaires de Benoît de BONVOISIN ont été -et de très loin- celles qui m’ont le plus heurté.
 
J’ai rencontré personnellement le Professeur BOULOC, éminent pénaliste titulaire de la chaire de droit pénal à la Sorbonne et je retiens les commentaires écoeurés qu’il me fit après avoir examiné avec le plus grand soin le dossier de Monsieur Benoît de BONVOISIN.
 
Il était tellement choqué qu’il n’hésita pas, lui un des meilleurs pénalistes de France, à les traduire sans réserves dans des notes cinglantes à l’égard de certains des intervenants judiciaires et des décisions aberrantes parfois prises.
J’ai rencontré personnellement Marcel TROUSSE, ancien Président du Tribunal de Première Instance de Liège et je retiens les critiques acerbes qu’il fit de la manière dont fut traitée la procédure judiciaire entreprise par Benoît de BONVOISIN pour restaurer son honneur. Lui aussi, grand humaniste et brillant juriste s’il en est, homme libre et indépendant, eut le courage d’écrire ce qu’il en pensait.
 
Mais en dehors de ces exceptions remarquables, que de pleutres n’ai-je pas rencontrés dans ce dossier, dans les milieux judiciaires, dans les milieux de la presse, dans le monde policier et dans le monde politique.
 
C’est de cet ensemble réuni de personnages médiocres qu’a pu naître le véritable drame judiciaire qu’a enduré Benoît de BONVOISIN et qui en effet, permet bien des comparaisons avec l’affaire DREYFUS.
 
Le texte qui vous est ici soumis,  j’en atteste la justesse.
 
Puisse l’Histoire rendre enfin Justice à un homme qui le mérite tellement !
 
 
Julien PIERRE
Avocat aux Barreaux de Liège
et du Luxembourg
                                                                                  
Le 1er octobre 2015


ORIGINE DU COMPLOT

Benoît de Bonvoisin, diplômé en philosophie, commença une carrière politique au sein du parti social chrétien (PSC) et devint rapidement un des conseillers de Paul Vanden Boeynants (VDB), Premier Ministre et Ministre de la Défense Nationale dans les années 60 et 70. Le PSC était un des principaux partis politiques du pays qui, comme les autres partis, s’était scindé, en 1968 en deux ailes linguistiques, l’une flamande, le CVP devenu aujourd’hui le CD&V et l’autre francophone, le PSC devenu actuellement le CDH.
Se rendant compte de l’influence grandissante au sein du PSC de son aile gauche, la Démocratie Chrétienne, VDB demanda à Benoît de Bonvoisin de développer une aile centriste qui manquait sur l’éventail politique belge. Celle-ci fut dénommée Cepic (Centre Politique des Indépendants et des Cadres) dont VDB allait devenir le Président.
 
Le succès du Cepic fut rapide, des sections locales se développant dans tout le pays, surtout à Bruxelles et en Wallonie. Le développement du Cepic inquiéta alors M. Califice, sénateur PSC de Charleroi et figure centrale de la Démocratie Chrétienne de même que Philippe Moureaux, du parti socialiste (PS) qui allait devenir Ministre de la Justice en 1981, tous deux ne désirant pas voir apparaître une aile centriste sur l’échiquier politique belge.
 
Benoît de Bonvoisin, actif au sein de diverses organisations (administrateur de la Revue Générale Belge, chargé de mission au sein de la Ligue Esthétique Belge, vice-président de l’Union européenne des Classes Moyennes…) vit sa carrière politique connaître un arrêt brutal quand, en mai 1981, le journal De Morgen, organe de presse de l’aile socialiste flamande, publia une note dite « note de la Sûreté de l’Etat » le liant lui et le Cepic à des mouvements d’extrême droite et à leur financement.
 
Le contenu de cette note « Sûreté » était faux mais il fallut 20 ans avant que ce ne soit connu, l’Etat freinant pour que ce ne soit pas révélé [1]. Ceci par l’intermédiaire du Parquet qui s’opposa de façon répétée à la plainte déposée par Benoît de Bonvoisin à l’encontre d’Albert Raes, le chef de la Sûreté, pour sa note mensongère. Le Parquet s’acharna en effet contre Benoît de Bonvoisin,  comme cela ne s’était jamais vu en Belgique, en le poursuivant à différentes reprises ce dont la Magistrature assise l’acquitta toujours sauf dans un cas ce qui, comme on peut le lire en annexe, constitue une verrue indélébile sur l’histoire de la justice belge, tant pour ce qui concerne la magistrature debout qu’assise.
 
D’autre part, des pressions furent exercées sur des juges d’instruction pour qu’ils n’effectuent pas leurs enquêtes alors que des devoirs complémentaires avaient été demandés tant par Benoît de Bonvoisin que par la magistrature assise, devoirs destinés à faire la lumière sur la fausse note de la Sûreté [2].
La note Sûreté intervenait dans le cadre des travaux, en 1980, d’une Commission sénatoriale d’enquête, appelée Commission Wijninckx, du nom de son président, sur le maintien de l’ordre et les milices privées. Cette note sera transmise, le 11 mai 1981, par un courrier marqué « confidentiel » à la Commission par le Ministre Moureaux, le Ministère de la Justice étant alors l’organe de tutelle de la Sûreté de l’Etat. Cette note quoique marquée « confidentiel » sera publiée, le 19 mai 1981, dans le journal De Morgen, organe de presse du SP, l’aile socialiste flamande.
 
Mais qui fut à l’origine de la fuite de la note Sûreté vers la presse ?

Philippe Moureaux admit au Parlement qu’il savait que des fuites étaient possibles. Mais il ne prit aucune mesure particulière de précaution. De plus, après que la fuite eut lieu, il refusa qu’une enquête soit menée. En fait, dans un procès-verbal d’enquête, il est indiqué que la fuite est à attribuer, à 90%, à Serge Dumont qui à l’époque travaillait au cabinet de Philippe Moureaux. Ce qui est plus surprenant, c’est qu’une photocopie de la lettre confidentielle par laquelle le Ministre Moureaux transmettait au Président Wijninckx le rapport Raes s’est retrouvée avec le rapport Raes, en France, à la chaîne de télévision TF1. Mais qui l’a donc transmise à TF1 ? Car une lettre marquée confidentielle ne peut être transmise qu’avec l’autorisation de son auteur - ici Philippe Moureaux - et de son destinataire - ici Jos Wijninckx. Interrogé à cet égard, en 1983 par Maître José Saels, Philippe Moureaux ne répondit pas à la question posée, s’en tirant avec un faux-fuyant.
 
La note Sûreté comprenait trois volets :
 
1.  Benoît de Bonvoisin finance le Front de la Jeunesse. Ce mouvement subversif allait être condamné, en 1983, sans que Benoît de Bonvoisin ne soit ni inculpé ni même interrogé. Donc voilà un premier élément de la note qui apparaissait faux en ce qui concerne Benoît de Bonvoisin.
 
2.   Benoît de Bonvoisin a voulu soustraire à la justice un extrémiste allemand nommé Ekkerhard Weil. Or, finalement, en 1983, le procureur du Roi indiqua que le nom de Benoît de Bonvoisin n’apparaissait pas dans ce dossier. En 1983, soit deux ans et demi après la publication de la (fausse) note Sûreté. Pourquoi si tard ? On a vu le Parquet réagir avec plus de célérité dans le cas d’autres inexactitudes.
 
3.   Benoît de Bonvoisin finance par les sociétés PDG et Cidep   -   dont il n’est membre ni de la direction ni du conseil d’administration   -   des mouvements d’extrême droite. Finalement, c’est en mai 2000, que la Cour d’appel de Mons acquitta Benoît de Bonvoisin dans le cadre de l’affaire Cidep, ajoutant que l’affaire PDG était, elle, prescrite. Etant donné l’acharnement judiciaire à l’égard de Benoît de Bonvoisin, s’il y avait eu quelque chose de pertinent dans le dossier PDG, le pouvoir judiciaire ne l’aurait pas laissé atteindre la prescription. Et de toute façon la motivation de l’arrêt Cidep eut été transférable sur l’affaire PDG. A cet égard, mentionnons que l’arrêt Cidep indique que l’enquêteur principal de la 3ème S.R.C., le sieur De Baets, se montrait particulièrement acharné à l’encontre du prévenu Benoît de Bonvoisin paraissant parfois manquer de nuances ou de réserve. Ceci prend tout son sens quand on sait la réserve avec laquelle les magistrats rédigent leurs dispositifs.
 
 
La note Sûreté eut un retentissement médiatique considérable du fait (1) du poids moral considérable que représentait la Sûreté de l’Etat, (2) que des journalistes, dont la liste fut ultérieurement saisie lors d’une perquisition à la Sûreté, étaient payés par la Sûreté, (3) que le Ministre Jean Gol, Ministre de la Justice succédant à Philippe Moureaux, déclara, le 7 octobre 1983, que la Sûreté était un outil impeccable. M. Gol qui avançait là une contre-vérité  - visant à manipuler et tromper l’opinion publique -  tentait ainsi de redorer le blason de la Sûreté terni par l’affaire du Westland New Post,  mouvement néo-nazi condamné comme milice privée, qui recevait des cours de filature de Christian Smets, bras droit d’Albert Raes.
De plus, confirmation apparaissait donnée au fond de la note Sûreté par la diffusion du film « L’Orchestre Noir », film centré sur l’extrême droite et les milices privées où Benoît de Bonvoisin apparaissait, erronément, comme un des principaux acteurs. Ce film fut financé avec les deniers publics, par la Communauté française, à l’époque où son président était justement Philippe Moureaux où l'un des réalisateurs du film était justement Walter De Bock, le journaliste sous la plume duquel la (fausse) note confidentielle Sûreté avait été publiée dans le journal De Morgen. On croit rêver… dans un pays démocratique.
Mais Claude Eerdekens, bourgmestre d’Andenne – où Benoît de Bonvoisin était domicilié – mettant fin à un différend avec Benoît de Bonvoisin s’arrangea pour faire disparaître du film la séquence concernant Benoît de Bonvoisin, lui précisant dans sa lettre du 6 octobre 1986 : « j’en suis arrivé à me demander si vous n’étiez pas, pour votre malheur, victime d’un schéma savamment orchestré ». Voilà un entérinement manifeste du complot dont Benoît de Bonvoisin a été victime.
 
Les historiens seront amenés à se pencher sur la relation ayant existé entre Philippe Moureaux et Albert Raes car il est tout à fait  i n h a b i t u e l  qu’une fausse note soit transmise par un haut fonctionnaire, de sa propre initiative, à son Ministre de tutelle sans qu’il n’y ait été invité.
 
Cette note Sûreté provoqua un tollé, les personnes du Cepic mises en cause demandant un démenti. Benoît de Bonvoisin écrivit, en date du 1er juin 1981, à Philippe Moureaux en lui demandant ses intentions pour rétablir la vérité. Il ne lui répondra pas.

Certains pensent que c’est pour éviter de devoir répondre aux protestations de ceux mis (injustement) en cause que les travaux de la Commission sont alors intentionnellement rapidement clôturés, la note étant transmise au Parquet par Philippe Moureaux. Etant donné le principe selon lequel le pénal tient le civil en l’état, les personnes injustement impliquées par la (fausse) note ne seront jamais officiellement disculpées, bien qu’au Parlement il fut dit et redit que les dommages causés devaient être réparés et que les responsables devaient être sanctionnés.
En fait, la véritable raison pour la clôture de la Commission est la suivante.
Celle-ci souhaitait voir ses travaux prolongés de six mois, mais le Parlement s’y opposa car comme l’indiqua Maître Roger Lallemand, membre de la Commission Wijninckx, à Maître José Saels, on craignait que ne soient alors mises à jour les « incongruités » de la Sûreté.


 
Que retenir de cette note confidentielle révélée par De Morgen ?
Que tant Albert Raes que Philippe Moureaux mentent :
 
1.     Lors des travaux de la Commission Wijninckx, Albert Raes, Administrateur-Directeur Général de la Sûreté, avait été amené à témoigner. Il prête le serment de témoin et d’expert tel que prévu par le Code d’Instruction Criminelle qui impose à l’expert de parler non seulement « sans haine et sans crainte » mais également « avec exactitude et probité ». M. Raes ment à la Commission car, comme le relèveront un procès-verbal d’enquête et le rapport 2009 du Comité R chargé de la supervision des activités de la Sûreté de l’Etat, dans les notes de la Sûreté sur Benoît de Bonvoisin le conditionnel avait été transformé en indicatif présent, cela sur ordre de Raes. Donc en témoignant devant la Commission, M. Raes n’ignore nullement la dénaturation qu’il a faite des notes de ses services.
 
2.   M. Raes n’est pas le seul à mentir, M. Moureaux ment également. Interrogé à différentes reprises à la Chambre, en juin 1981, M. Moureaux déclara que M. Raes rédigea à son intention une note de synthèse et que son cabinet n’apporta aucune addition à ce texte et n’en altéra ni le contenu ni d’ailleurs le titre, ce qui est inexact, l’instruction ayant mis au jour que des changements y avaient été apportés par son Cabinet, de façon à polariser l’attention sur Benoît de Bonvoisin.

Mais il y a plus : quand Benoît de Bonvoisin assigna l’Etat du fait de la (fausse) note, le Ministre de la Justice n’était plus Philippe Moureaux mais Jean Gol qui demanda à Raes de lui faire un rapport sur Benoît de Bonvoisin. Comme le découvrit Reinier Van Camp, officier de police judiciaire qui travailla pendant plusieurs années au sein du Comité R sur la plainte de Benoît de Bonvoisin, Raes envoya alors à Gol une note similaire à la première avec la différence que, cette fois-ci, il avait remis au conditionnel ce qu’il avait auparavant ordonné que figure à l’indicatif présent. Bref,  la première note était donc bien un faux.
 
Quelle fut la réaction de Benoît de Bonvoisin à ce qui précède ?
 
Contrairement à ce que l’Etat prétend, à savoir qu’il n’a réagi que tardivement, en 1983, Benoît de Bonvoisin a en date du 1er juin 1981, écrit à Philippe Moureaux pour lui demander quelles étaient ses intentions pour rétablir la vérité.  M. Moureaux ne répondra pas à cette lettre.
Le 15 juin 1981, il déposera plainte contre le journal De Morgen qui, sous la plume du  journaliste Walter De Bock, avait publié la (fausse) note. A la demande du Parquet, cette plainte fut classée sans suite cela pour éviter qu’une enquête n’amène à dévoiler qui avait transmis à Walter De Bock la (fausse) note et qui l’avait incité à la publier.

Curieux personnage que ce Walter De Bock qui demandait au gendarme François Raes d’opérer des surveillances pour lui, comme François Raes le déclara à la police judiciaire en 1991. Depuis quand un gendarme est-il amené à travailler pour un journaliste ? Walter De Bock qu’Alain Etienne, inspecteur à la Sûreté de l’Etat, considérait comme ayant été « acheté  par la Sûreté ». Ajoutant « il est certain qu’au niveau de la Sûreté de l’Etat certains journalistes sont payés en qualité d’agent d’influence ».
 

PLAINTE A L'ENCONTRE DE RAES, SMETS ET X

Par après, le 4 mars 1983, Benoît de Bonvoisin déposera plainte avec constitution de partie civile à l’encontre de Raes, Smets et X.  Pourquoi alors ? Parce qu’à cette date, des dirigeants du Front de la Jeunesse auquel la note Sûreté liait Benoît de Bonvoisin avait été condamné sans que Benoît de Bonvoisin n’ait même jamais été auditionné. Ceci prouvait que ce premier point de la note Sûreté était inexact.
Le 4 avril 1983, le Parquet rédigea un réquisitoire saisissant la Chambre du Conseil en vue de faire déclarer nulle la constitution de partie civile*.
 
* Méthode typique d’une justice à la soviétique
 
La Chambre du Conseil ne suivit pas le Parquet. Mais opposition* à l’ordonnance de la Chambre du Conseil fut formée par le Parquet Général devant la Chambre des Mises en Accusation (une chambre de la Cour d'appel) qui, rejetant également la demande du Parquet,  confirma dès lors la recevabilité de la plainte avec constitution de partie civile contre Raes, Smets et X.
Et quatre jours plus tard, le 8 mars 1983, Benoît de Bonvoisin lancera une assignation contre l’Etat du fait de sa responsabilité pour ses agents de la Sûreté de l’Etat du fait de la (fausse) note Sûreté.
 
Comment comprendre l’attitude du Parquet ?

Il y a deux branches dans la Justice : d’une part, le Ministère Public, le Parquet ou la magistrature debout, et d’autre part, la magistrature assise avec les juges et les conseillers. Si la magistrature assise est indépendante de l’exécutif, il n’en n’est pas de même du Parquet dont le chef hiérarchique est le Ministre de la Justice, un membre du gouvernement qui peut donc émettre des suggestions en matière de poursuites, spécialement dans des affaires sensibles pour l’Etat comme celle présentée ici.
 
A cet égard, rappelons ce que précisait Benoît Dejemeppe, autrefois procureur du Roi à Bruxelles, à Denis Robert dans son livre « La justice ou le chaos » où Dejemeppe indique « le droit rien que le droit, n’existe pas. C’est une vue de l’esprit. Le ministère public agit en fonction de ce qu’il croit bon pour la société ».
Et le Parquet devait penser qu’il n’était pas bon pour la société que l’attitude de mensonge et de faux de Raes soit connue de la société. Ce qui explique l’opposition systématique du Parquet à l’égard de Benoît de Bonvoisin, encore récemment, lors d’un procès civil de presse à Liège où la juge ne suivit pas la recommandation empreinte de révisionnisme, exprimée par le représentant du Ministère public à la demande du Parquet général.
 
 
L’affaire « Fausse note de la Sûreté de l’Etat » est alors confiée au Doyen des juges d’instruction, Madame Lyna, qui n’effectue  a u c u n  des devoirs nécessaires à la manifestation de la vérité. Pourquoi donc ? Les historiens se penchant sur ce cas troublant se poseront la question de savoir si des pressions ont été effectuées dans ce sens et/ou si sa décision de ne rien faire se trouve dans le fait que le dossier de son mari à la Sûreté avait refait surface. Ce que Madame Lyna a nié. Ceci est en contradiction avec le fait que lors d’une audition dans son cabinet, deux fonctionnaires de la Sûreté de l’Etat lui avaient déclaré que Raes avait demandé à ses services : « Bezorg mij eens het dossier van die Lyna of van haar man ». Et Mme Lyna transmit même le nom de ces deux fonctionnaires à la Commission d’enquête sur le banditisme et le terrorisme.  En fait, tout s’éclaire et on comprend que Madame Lyna fut tétanisée car une note interne à la Sûreté datée du 8 septembre 1983, marquée « EXTREME URGENT » demandait d’extraire des archives de la Sûreté le dossier « 438.020 CHOME Jules Ep. LYNA Françine » (sic).
Aussi comprend-on que l’instruction de Lyna fut jugée « lacunaire » par la Cour d’appel. 
Lacunaire, mot qui prend tout son sens quand on sait avec quelle circonspection les magistrats rédigent habituellement leurs propos. Mais il est approprié d’indiquer ici ce que l’ancien Ministre de la Justice Stefaan De Clerck disait récemment : « Chaque fois que je rencontrais Albert Raes, l’ancien patron de la Sûreté de l’Etat, il me faisait sentir qu’il détenait un dossier me concernant ».
 
 
La Chambre des Mises en Accusation rend un arrêt, le 10 décembre 1987, rejetant la demande de prescription du Parquet général et constate que l’instruction est lacunaire*, que des devoirs complémentaires doivent être effectués et désigne un autre juge d’instruction, M. Collin. Mécontent, le Parquet général se réunit la veille de Noël 1987 pour examiner la possibilité d’aller en cassation mais abandonne cette idée du fait de la parfaite formulation de l’arrêt. Or, à cette réunion, était présent Raes comme le révéla un indigné à Me José Saels, avocat de Benoît de Bonvoisin. Mais depuis quand, un inculpé, ici Raes, assiste-t-il aux délibérations du Parquet général ?*
 
Cet arrêt précise que « la note, qui n’est pas à usage interne mais externe contient des faits graves, soit avérés déjà inexacts, soit non contrôlables sans information judiciaire, et ce non sous forme interrogative ou conditionnelle mais sous forme d’affirmations catégoriques ». Cet arrêt contient un reproche à l’égard des inculpés MM. Raes et Smets en précisant : « les inculpés n’ont jamais fait parvenir à la presse un démenti au sujet des faits déjà apparemment inexacts ». Et le Ministre de la Justice, Jean Gol, leur chef hiérarchique de ne pas leur enjoindre de le faire*.
 
L’instruction du juge Collin va alors prendre cinq années. Pourquoi si longtemps ? Car, lui aussi, ne fera pratiquement rien, et ne fit pas les devoirs complémentaires ordonnés par l’arrêt précédent*. Or la fonction d’un juge d’instruction est de rechercher la vérité. Tant la juge Lyna que le juge Collin ne s’y soumettent pas, ce qui va à l’encontre des fondements de la fonction de juge d’instruction. Ceci est remarqué et commenté au sein de la magistrature. En bref, pour ces deux magistrats, ce ne sont ni la justice ni l’équité qui dictent leur conduite*. Quand on sait que certains pensent à supprimer la fonction de juge d’instruction et à confier celle-ci au Parquet, pauvre justiciable, car le Parquet n’est pas réputé agir à charge et à décharge.

Et voici ce que déclarait Maître Jean-Pierre Buyle, ancien bâtonnier du barreau de Bruxelles, actuellement président d’avocats.be qui regroupe l’ensemble des barreaux francophones et germanophone, soit plus de 3.000 avocats, « quand j’entends que le parquet a un rôle objectif, ce n’est pas mon analyse dans les matières que je connais », ajoutant « la loyauté des parquets est parfois prise en défaut ». Ceci s’inscrit dans le souhait du pouvoir exécutif de vouloir mettre le pouvoir judiciaire au pas, jaloux qu’il serait de son indépendance, comme le soulevait récemment La libre Belgique. Et ce n’est pas nouveau. Car, comment expliquer la disparition en 1996 du Comité Supérieur de Contrôle qui était chargé de rechercher les infractions commises soit par les préposés de l’administration, soit par des tiers, dans le cadre du fonctionnement des services publics gérés par l’Etat. Certes, le Comité avait par sa franchise et son indépendance déplu à certains.

 
Rappelons ici l’épisode de l’affaire Dreyfus où le juge d’instruction Bertulus alla trouver le procureur Feuilloley. Il lui montra son dossier, lui expliqua les charges et lui annonça qu’il allait signer des mandats d’arrestation contre Esterhazy (l’auteur du faux) et Madame Pays. Le procureur l’arrêta par ces mots : « Si vous signez ces mandats d’arrestation, vous serez immédiatement révoqué de vos fonctions de juge d’instruction ».

L’arrêt du 12 mars 1992 constate que la plupart des devoirs complémentaires ordonnés n’ont pas été effectués mais de façon tout à fait surprenante, indique qu’ils ne sont pas d’une importance telle que leur examen plus approfondi pourrait contribuer, en l’espèce, à la manifestation de la vérité*. Ce qui est en  t o t a l e  contradiction avec le fait qu’ils avaient été requis par l’arrêt de 1987 justement pour la manifestation de la vérité. Comment expliquer que la Cour d’appel ordonne, en 1987, de procéder dans les meilleurs délais à l’exécution des devoirs complémentaires suivants…, quatorze en tout et qu’en 1992, cinq ans plus tard  -  quid de la notion de meilleur délai ?  -  la Chambre des Mises en accusation autrement composée mais avec le  m ê m e   P r é s i d e n t, M. Jans, vient dire exactement le contraire. Surréalisme judiciaire. La Cour n’a pas craint de se déjuger, indique le professeur Bernard Bouloc [3].
Concernant le droit pour toute personne d’être protégée contre les atteintes à son honneur – ce dont Benoît de Bonvoisin avait à se plaindre – la Cour constate  que  ce droit ne figure pas parmi les droits et libertés reconnus par la Constitution ; qu’il n’entre donc pas dans la catégorie de ceux dont la violation par un fonctionnaire public - en l’occurrence ici Raes -  est réprimée par l’article 151 du C. P.
C’est surprenant que ceci se trouve, à la fin du vingtième siècle, dans un arrêt d’une Cour d’appel d’un pays comme la Belgique, pays fondateur de la Cour Européenne des Droits de l’Homme.
Cette Cour semble ne pas s’être rappelé ce vieil adage qui nous vient de France, à savoir « La Cour rend des arrêts, et non pas des services ».


 
En ce qui concerne les notes de la Sûreté, si l’arrêt énonce que leur formulation paraît témoigner d’un manque de rigueur   et   qu’il est donc surprenant que ces notes soient constituées par une suite d’affirmations, qui ne sont assorties d’aucune réserve ni aucun jugement de valeur quant à la fiabilité des sources exploitées ; attendu que cette circonstance ne révèle pas pour autant, dans le chef des auteurs des notes, ni dans celui du premier inculpé, (Raes) qui en a avalisé le contenu, l’existence d’une intention spécifique de nuire à la partie civile (Benoît de Bonvoisin). Alors que l’instruction a montré que c’était sur ordre de Raes que le conditionnel, mode original, avait été transformé en indicatif présent. Et l’arrêt ose affirmer que Raes n’avait pas d’intention de nuire. Est-on en Belgique ou dans une république bananière ?
Mais il y a plus aberrant encore, tenant compte de ce qui précède, quand on peut lire dans l’arrêt : l’instruction n’a rapporté aucun élément extrinsèque aux notes dont il s’agit, dont on pourrait raisonnablement déduire l’existence, dans le chef du premier inculpé (Raes) d’une volonté de nuire à la partie civile, qui procéderait de motivations étrangères à l’intérêt public et à l’exercice normal des devoirs de sa charge. Particulièrement, quand on sait que Raes a envoyé son rapport à l’indicatif présent à Philippe Moureaux et qu’il l’a transformé et remis au conditionnel deux ans plus tard quand il l’a envoyé au successeur de Moureaux, à savoir Jean Gol, ce qui constitue un faux.

Pas d’intention de nuire ? Et quid alors de ce qui suit : dans le rapport Sûreté, il est indiqué que Benoît de Bonvoisin avait financé l’extrême droite. Des montants sont même mentionnés - BEF 1.200.000 se répartissant en 400.000
pour le paiement d’un loyer et 500.000 et 300.000 pour la rémunération de deux personnes. Ce qui est faux et que le juge Collin aurait pu aisément préciser s’il n’avait pas négligé* son rôle de juge d’instruction. En effet, lorsqu’interrogé par R. Van Camp du Comité R, Christian Smets, bras droit de Raes, lui a déclaré qu’il n’avait à aucun moment recueilli la moindre preuve de ce que Benoît de Bonvoisin avait financé l’extrême droite et que les montants cités dans certains rapports et notes résultent d’une pure construction intellectuelle de sa part, qu’il s’agissait d’une supposition de sa part. Bref une invention, une duperie et d’après la Cour, pas d’intention de nuire de la part de Raes et Smets !


Ceci amène le jurisconsulte de réputation internationale Bernard Bouloc à écrire dans un mémorandum du 15 septembre 1994 que cet arrêt de 1992 constitue une duperie, est indigne d’un Etat de Droit et que la Cour a commis un déni de justice.
 
En conclusion, Bernard Bouloc écrit :
 
En définitive, après que les Juges d’instruction Lyna et Collin aient manqué à leur devoir, la Cour, comme le Parquet qui dans ce dossier a délibérément choisi son camp, couvre les agissements de l’administration, la Sûreté de l’Etat, qui, avec la plus grande légèreté ou dans l’intention spécifique de nuire, a déclaré sans fondement, dangereuse une personne, en se basant sur des ragots non vérifiés ou créés de toute pièce, et invérifiables (dénonciateur anonyme) et qui ne le seront jamais.
 
Mais, ce faisant, elle a fait prévaloir la raison d’état [4] sur la justice et sur le respect de l’individu. Celui-ci doit toujours être présumé innocent. Or, la Cour d’appel de Bruxelles n’a fait jouer ce principe supérieur du droit qu’en faveur des fonctionnaires de la Sûreté de l’Etat, en oubliant que ceux-ci sont au service de la société et doivent faire prévaloir les valeurs fondamentales. Parmi celles-ci se trouvent le respect de l’individu, de sa dignité et de son honneur.
 
Attardons-nous enfin sur le fait de savoir si le Parquet pouvait ne pas se montrer subjectif : le Parquet, poursuivant Monsieur de Bonvoisin comme suite à l’accusation à caractère financier de la note de la Sûreté, rapporte au Ministre de la Justice,  Ministre de la Justice qui, lui, est en Belgique également l’autorité de tutelle
de la Sûreté de l’Etat et que, comme suite au contenu faux de sa note (témoignage de Monsieur le Substitut Godbille) Monsieur de Bonvoisin est amené à poursuivre.
La situation apparaissait, de ce fait, viciée dès le départ : la Sûreté poursuivie et le Parquet poursuivant ayant tous deux le même chef hiérarchique. Et l’aspect vicieux de cette situation allait s’exacerber lorsque le Juge Collin deviendra le seul Juge d’instruction des deux affaires.
Monsieur de Bonvoisin se trouve privé de ces droits fondamentaux par suite des agissements de services administratifs,
de la Sûreté de l’Etat, et donc en quelque sorte frappé de mort civile, en raison des insuffisances de la Justice. Sans doute, celle-ci avait ressenti contre l’avis du Parquet et des Juges d’instruction, la nécessité de procéder à des recherches précises. Il est regrettable qu’elle ne les ait pas menées à leur fin.
En conclusion, l’arrêt du 12 mars 1992 prononçant un non-lieu en faveur de Raes et Smets, hauts fonctionnaires à la Sûreté de l’Etat, est indigne d’un Etat de Droit. Cet arrêt de non-lieu aurait-il pu être prononcé en respectant la notion d’Etat de droit ? Certes. Plainte ayant été déposée à leur encontre, Raes et Smets avaient tout simplement à apporter au juge d’instruction les preuves de ce qu’ils avançaient et qu’ils avaient communiqué à Moureaux. Un non-lieu aurait alors été prononcé dans les mois si pas les semaines après le dépôt de la plainte. Mais ils ne pouvaient pas apporter ces éléments de preuve sachant qu’ils avaient menti. Aussi l’affaire dura jusqu’en 1992, les faits remontant à 1981, pour arriver à un non-lieu, une duperie soulève le professeur Bouloc.


Et le pourvoi en cassation contre cet arrêt fut rejeté.
Il faut croire que le Droit en Belgique est à des années-lumière de l’équité. [5]
 
Après tout, dans tout procès inique, il y a un Cochon. Pardon, un Cauchon. Pierre Cauchon était le magistrat ordonnateur du procès de Jeanne d’Arc. Celui-ci avait voulu faire un procès régulier en bonne et due forme. C’était là une habileté et une hypocrisie de plus  -  comme dans le cas de la Cour d’appel de Bruxelles du 12 mars 1992, indigne d’un Etat de droit, prononçant un non-lieu en faveur de Raes  -  car, malgré les formes observées, jamais une accusée, à savoir Jeanne d’Arc, ne parut devant des juges plus suspects de partialité et plus susceptibles de récusation.
 
Le grand public retient que du moment où il y a jugement, l’infraction de déni de justice ne peut être retenue. Cette opinion ne semble absolument pas fondée, en soutiennent plus d’un, notamment Jean-Paul Doucet, ancien professeur de droit pénal et chroniqueur à la Gazette du Palais à Paris.
Selon J.P. Doucet, l’infraction de déni de justice est constituée du seul fait de l’omission par un juge d’un acte essentiel de sa fonction, qu’il s’agisse, soit du refus de rendre un jugement qu’il est en état de prononcer, soit du refus d’ordonner un acte d’instruction nécessaire qui relève de sa seule compétence. Concernant le cas précité  -  l’arrêt de la Cour d’appel de Bruxelles du 12 mars 1992 – ajoute J.P. Doucet, il est permis de penser que, en refusant d’ordonner l’accomplissement intégral d’actes d’instruction dont ils avaient eux-mêmes reconnu la nécessité, les magistrats instructeurs ont eu conscience de ne pas accomplir pleinement la mission qui leur incombait de rechercher la vérité.
J.P. Doucet ajoute qu’un doute sérieux ait pu ainsi être jeté sur l’indépendance de la justice belge à l’égard du pouvoir exécutif. Autrement dit, qu’en est-il ici de l’indépendance et de l’impartialité des juges, pierre angulaire d’un Etat de droit ?

Ainsi se vérifie l’adage « Quand la politique entre dans un prétoire, la justice en sort ».


Certes, la Justice n’aime pas être contestée. Mais quand pendant des années, elle bafoue les principes de base sur lesquels elle repose, elle ne remplit plus son rôle. « Lorsque la justice se met en situation d’être jugée, la société est en danger de mort » indiquait l’ancien bâtonnier Jakhian.
 
« Ce qu’elle semble avoir perdu de vue, c’est qu’avec le temps, la force de la vérité à vouloir se manifester, dans le cas d’un simulacre de justice, finit par l’emporter sur l’autorité de la chose jugée.
 
La Justice ayant jugé, l’Histoire, elle, commence à juger la Justice. En effet, dans ce type de procès, la véritable affaire commence après le verdict quand, de façon posée et analytique, sont progressivement relevées les faiblesses et les contradictions de l’instruction, les délits, voire les crimes de certains, certes, dans le cas étudié, les positions empreintes d’abus de puissance morale de trois Ministres de la Justice successifs.
 
Tout cela pourquoi ? Indépendamment du mobile (politique ?) pour lequel Mr. Raes a établi des notes fausses sur Mr. de Bonvoisin, il est inadmissible, que dans un Etat de droit, pour tenter de sauver l’honneur d’une institution, la Sûreté de l’Etat, - qu’un arrêt de non-lieu a tenté de mettre hors cause - on sacrifie et continue à sacrifier l’honneur d’un citoyen. A terme, après la Sûreté, la justice belge y laissera, elle aussi, une partie de son honneur.
 
Ce qui apparait comme une lâcheté collective de ne pas laisser éclater la vérité, ne résulte-t-elle pas de l’effroi que cette vérité, enfin connue, vienne remettre en question des aspects du régime durant les années où Mr. Raes était le chef de la Sûreté et où Mr. de Bonvoisin apparaît victime d’un terrorisme d’Etat ?
 
En conclusion, après l’étude des documents précités, l’arrêt du 12 mars 1992 est véritablement indigne et invraisemblable dans un Etat de Droit. Il apparaît ne pouvoir s’expliquer que, en infraction à la Constitution, par une intervention répétée du pouvoir exécutif au sein du pouvoir judiciaire, qui y a succombé, cela pour une Raison d’Etat - qui nous est inconnue - antinomique de l’essence même d’un régime démocratique 
». [6]
 
Pour paraphraser ce qui précède, alors que les magistrats s’expriment généralement de façon mesurée, Eliane Liekendael, Procureur général près la Cour de cassation, indiquait à cette époque, en 1998 : « Si je ne crois plus de manière absolue et sans réserve à l’Etat de droit, je crois encore à la justice ». Un testament qui trahissait la plus haute méfiance vis-à-vis du personnel politique.
 
Et les historiens seront renversés par la duperie Raes / Moureaux / Parquet quand ils liront dans les réflexions de Reinier Van Camp [7],  «pas une pièce, pas un document n’a été découvert dans les nombreux dossiers examinés qui permette d’alléguer que Benoît de Bonvoisin ait jamais fait partie de l’extrême droite ».



INVESTIGATIONS DU COMITE R

Le Comité R, le Comité Permanent de Contrôle des Services de Renseignement et de Sécurité a été créé par une loi du 18 juillet 1991 à la suite des dysfonctionnements dans les services de renseignements constatés par plusieurs commissions d’enquête parlementaire. Ce Comité exerce un contrôle sur les deux services de renseignements de l’Etat, à savoir la Sûreté de l’Etat et le Service général du renseignement et de la sécurité des forces armées.
 
Dans cette affaire comme dans d’autres, le Comité lance une investigation sur les problèmes, largement médiatisés, rencontrés par Benoît de Bonvoisin du fait d’un (faux) rapport de la Sûreté de l’Etat le concernant.
 
Ces investigations concernant cette note Sûreté sont confiées, au sein du Comité R, à l’officier de police judiciaire Reinier Van Camp. Cela lui prendra plusieurs années d’étude. Ensuite, un compte rendu est publié par le Comité R  dans son rapport pour l’année 2009.
 
Considérant qu’il est difficilement concevable qu’un haut fonctionnaire, Albert Raes, transmette à son Ministre de tutelle, Philippe Moureaux, un rapport complètement faux sans y avoir été invité, une troublante concordance de dates va interloquer les historiens.
 
1.  Le 22 octobre 1980, Philippe Moureaux devient Ministre de la Justice et chef hiérarchique d’Albert Raes.
 
2.  Or, ce n’est seulement qu’en décembre 1980, d’après le Comité R, qu’un dossier personnel est ouvert au nom de Benoît de Bonvoisin au sein de la Sûreté.
 
3.  De même le Comité R précise que c’est à cette même époque qu’un circuit parallèle a fait son apparition au sein de la Sûreté avec une section « non-officielle » composée de « fidèles » de l’administrateur-directeur général de l’époque, Albert Raes. Les instructions émanaient directement de l’administrateur-directeur général, via son adjoint, sans suivre la voie hiérarchique habituelle...  Le Comité permanent R dut constater que la Sûreté de l’époque avait négligé sa tâche de vérification dans cette affaire (de Bonvoisin). Le Comité n’a trouvé aucune trace de la moindre demande de vérification ni aucune analyse. Selon plusieurs personnes interrogées, Albert Raes n’attachait pas la moindre importance à ces aspects.

4.  Et le Comité ajoute avoir également constaté que les informations obtenues étaient parfois initialement formulées avec une certaine réserve pour être ensuite présentées ailleurs comme établies, et ce, malgré l’absence de vérification. Ce fut la direction qui intervint pour influencer le contenu de certains rapports. Ce fut notamment le cas des rapports de la Sûreté qui furent utilisés par le ministre de la Justice de l’époque pour la rédaction de la note CEPIC. Ces rapports furent corrigés et réécrits à l’indicatif (par l’administrateur adjoint - Jacques De Vlieghere nommé à la Sûreté à la demande d’André Cools - mais à la demande de l’administrateur-directeur général Albert Raes) alors qu’ils avaient été initialement rédigés au conditionnel. Rien que cette fourberie devait conduire à une condamnation d’Albert Raes et non à un non-lieu comme le précisa l’arrêt de la Cour d’appel de Bruxelles en 1992, arrêt que le professeur Bouloc qualifie d’indigne d’un Etat de droit et représentant un déni de justice. Déni de justice à propos duquel Maître Julien Pierre écrivit au Ministre de la Justice.
 
5.  En résumé, c’est donc sur une période de moins de six mois, tout juste après l’arrivée au Ministère de la Justice de Philippe Moureaux, nouveau chef hiérarchique d’Albert Raes que celui-ci, court-circuitant les départements analyse et vérification au sein de la Sûreté de l’Etat, concocte, avec ce que le comité R appelle ses « fidèles », une (fausse) note sur B. de Bonvoisin sur trois allégations biscornues qui, avec le temps, mais très lentement du fait de l’opposition systématique du Parquet de Bruxelles dirigé à l’époque par M. Dejemeppe, apparaîtront toutes fausses.
 
Les investigations faites par R. Van Camp qui a un certain support du Président du Comité R, commencent à inquiéter les autorités. Comment freiner ces recherches qui peuvent altérer la réputation de diverses personnalités impliquées dans cette vilaine intrigue et mettre à mal la politique de non reconnaissance de la culpabilité de la Sûreté de l’Etat, plus précisément d’Albert Raes.
 
Le mandat du Président du Comité R, fonctionnaire de grande réputation, n’est pas renouvelé et celui-ci, ayant reçu l’honorariat, est désigné à une autre fonction importante. Un des conseillers du Comité R est également remplacé. Mais qui sera choisi comme nouveau président ? Un membre du Parquet qui a toujours été opposé à Benoît de Bonvoisin dans sa lutte pour être disculpé des fausses accusations d’A. Raes. En effet, le nouveau Président du Comité R désigné en 2006, est Guy Rapaille du Parquet général de Liège.
 
Je ne peux en effet, écrit R. Van Camp dans sa lettre du 31 juillet 2012 à Maître Julien Pierre, vous cacher mes regrets d’avoir été freiné dans mes investigations et mon enquête dès l’instant où M. RAPAILLE devint président du Comité permanent R, succédant à M. Jean-Claude DELEPIERE qui, lui, tout au contraire, m’encourageait à faire preuve de courage et de détermination par rapport à un dossier qui restait d’une sensibilité inouïe. Et quand on demandait à R. Van Camp : pourquoi une telle sensibilité ? celui-ci répondait : parce que l’Etat sait qu’il a tort.
 
M. RAPAILLE, ajoute R. Van Camp, décida très vite de restreindre la portée de l’enquête que le Comité permanent R précédent avait eu l’intelligence d’ouvrir très largement pour pouvoir appréhender les mécanismes occultes et récurrents susceptibles de sous-tendre les évènements et les expliquer.
 
Précisons ici que les premières investigations de R. Van Camp ont cependant été freinées :
 
1.  Par le veto opposé par A. Raes à son audition par le Comité R. Attitude plutôt suspecte qui ne plut pas au pouvoir législatif. Car celui-ci édicta qu’à l’avenir, même s’ils sont retraités, les fonctionnaires invités à témoigner ne pourraient s’y opposer.
 
2.   En novembre 2007, R. Van Camp accompagné du juriste du Comité R rendit visite à la bibliothèque centrale de l’université de Leuven où les archives de Walter De Bock sont conservées depuis 2006. Ils se virent refuser l’accès à quelque document que ce soit. Décision plutôt suspecte. Rappelons que De Bock est le journaliste du journal De Morgen qui publia, en juin 1981, la fausse note Sûreté.
 
3.  Lors des deux auditions à huis clos et sous serment d’Albert Raes devant la Commission parlementaire Wijninckx où, comme mentionné précédemment, Albert Raes mentit bien qu’étant assermenté. Ces auditions furent enregistrées. En effet, le pouvoir judiciaire avait demandé que soit enregistré sur bandes nouvelles le témoignage effectué par Raes sur les liens affirmés par lui entre Benoît de Bonvoisin et le Cepic avec des mouvements subversifs. Quoique n’ayant pas fait la plupart des devoirs d’investigation demandés par la Cour d’appel, le juge d’instruction Collin écrivit cependant au Sénat pour obtenir la version de cet enregistrement. Collin se vit refuser sa requête, le Sénat avançant le principe de la séparation des pouvoirs : justice vis-à-vis du législatif. Attitude suspecte ? Non. Mais là où le refus est bien des plus suspect, comme l’écrit R. Van Camp, c’est quand un seul pouvoir, le législatif, est concerné par cette demande : le Comité R demande la communication de ces enregistrements au Sénat et Armand De Decker, Président du Sénat, la refuse. Comme le précise R. van Camp : en 1998, le Parlement s’est doté de bras armés, les Comités permanents de contrôle des services de police et de renseignements, relevant directement de leur autorité, le législatif, et le refus notifié au Comité permanent R qui dépend lui aussi du législatif, n’a dès lors plus aucune raison d’être, si ce n’est de continuer à éviter que la vérité ne soit connue.
 
Le Comité R consacre une partie de son rapport de l’année 2009 aux résultats de ses investigations concernant la note Sûreté à propos de Benoît de Bonvoisin. Or le rapport de R. Van Camp contenait quelque 400 pages. Des pans entiers de ce rapport ne seront pas repris dans le rapport du Comité permanent R de 2008, M Guy RAPAILLE s’étant montré tout particulièrement timoré, écrit R. Van Camp. Ce rapport de 400 pages soulignant des dérèglements politico-judiciaires qu’est-il devenu ? N’a-t-il pas été maintenant précautionneusement détruit ?
 
Si ce rapport du Comité R comprend des manquements - R. Van Camp dira à Maître J. Pierre qu’il y avait bien plus dans son rapport que ce qui apparaissait dans le rapport officiel -, il se caractérise également par une contrevérité qui fit réagir R. Van Camp. Le rapport du Comité R indique que l’intérêt de la Sûreté concernant Benoît de Bonvoisin était légitime, et ce, en raison de ses activités, ses voyages et ses contacts, notamment avec des mouvements d’extrême droite. Le rapport tempère quelque peu ce qui précède en ajoutant : Il semble toutefois être devenu « la cible » des notes et rapports de la Sûreté qui étaient destinés au ministre de la Justice, et ce, pour des raisons peu claires.
 
Or dans sa lettre du 31 juillet 2012, R. Van Camp écrit : Pas une pièce, pas un document n’a été découvert dans les très nombreux dossiers examinés qui permette d’alléguer que Benoît de Bonvoisin ait jamais fait partie de l’extrême droite.
 
Aussi R. Van Camp alla trouver le Président Rapaille pour lui dire que cette réflexion concernant les contacts de Benoît de Bonvoisin avec des mouvements d’extrême droite était contraire à la vérité et ne devait donc pas figurer dans le rapport. Il se fit sèchement éconduire par M. Rapaille qui lui fit comprendre que ces instructions venaient de beaucoup plus haut, en lui disant, rapporta R. Van Camp : j’ai eu des conversations à cet égard avec la Ministre de la Justice. A l’époque, c’était Laurette Onkelinx. Il faut préciser ici qu’avant d’être transmis au Sénat, le rapport du Comité R doit, en effet, être envoyé au Ministre de la Justice. Et Laurette Onkelinx était préoccupée de constater que son camarade socialiste Philippe Moureaux était impliqué dans cette manigance, Philippe Moureaux dont La Libre Belgique remémorant sa vie politique écrivait récemment : Moureaux est prêt à tout, même aux procédés les moins glorieux.

Lettre du 31 juillet 2012 de M. Reinier Van Camp, officier de police judiciaire, ancien membre du Comité R, à Maître Julien Pierre :

Monsieur l'Avocat,

Concerne : Benoît de Bonvoisin
Notre entretien du 13 août 2009 à l'occasion de la reprise par vous soins des archives que Monsieur de Bonvoisin avait accepté de me confier mérite une suite écrite de ma part car j'ai toujours été animé du souci d'accomplir mes fonctions d'officier de police avec le souci constant de défendre l'intérêt général, le bien public et la recherche de la vérité.


Comme vous le savez, j'ai été chargé, en 2005, par le Comité permanent de contrôle des services de renseignements où j'ai été détaché jusqu'en 2010 et dont je relevais, de tenter de faire la lumière sur le rôle joué par la Sûreté de l'Etat et le Service Général de Renseignement et de Sécurité de la Défense nationale dans les affaires de BONVOISIN.

Il m'est précisément apparu que, comme le mentionne d'ailleurs le rapport officiel d'activités 2009 du Comité permanent R, des agents de la Sûreté de l'Etat ne se sont assurément pas comportés dans le sens de l'intérêt général et du bien public mais ont, au contraire, très gravement lésé celui-ci au travers de l'organisation de manoeuvres et d'opérations totalement déloyales commises au préjudice de Benoît de BONVOISIN, n'hésitant pas de surcroît à impliquer d'autres rouages essentiels de l'Etat, dont certains Parquets d'instance, certains Parquets généraux, certains fonctionnaires de police et des Ministres de la justice.

Les services de renseignements mettent parfois en oeuvre des techniques très spécifiques, qualifiées dans leur jargon d'« opérations », dont Benoît de BONVOISIN a manifestement fait les frais. Pendant les 30 ans qu'ont duré les péripéties dans lesquelles il a été plongé à son insu et malgré lui, plusieurs magistrats se sont fait rouler en très grands naïfs dans la farine par les responsables des forfaitures et seuls quelques très courageux magistrats indépendants, qui ont payé très cher leur réputation dans leur milieu professionnel, ont eu le courage d'assumer leur responsabilités et de faire barrage.


Les très nombreux rapports intermédiaires, le rapport provisoire établi avant la sortie de charge de M. Jean-Claude DELEPIÈRE et Walter DE SMEDT, respectivement président et conseiller du Comité permanent R avant leur remplacement par M. Guy RAPAILLE et Peter DE SMET et mon rapport final de 2008, tous destinés au Comité permanent R, contenait beaucoup plus d'indications à cet égard que le rapport officiel que le Comité permanent R a transmis à M. Armand DE DECKER, alors président du Sénat et de la Commission du suivi du Comité permanent R.

Mon premier rapport provisoire (2006) contenait quelques 400 pages. Des pans entiers de ce rapport ne seront pas repris dans le rapport du Comité permanent R de 2008, M Guy RAPAILLE s'étant montré tout particulièrement timoré.

Je ne peux en effet vous cacher mes regrets d'avoir été freiné dans mes investigations et mon enquête dès l'instant où M. RAPAILLE devint président du Comité permanent R, succédant à M. Jean-Claude DELEPIÈRE qui, lui, tout au contraire, m'encourageait à faire preuve de courage et de détermination par rapport à un dossier qui restait d'une sensibilité inouïe.

M. RAPAILLE décida très vite de restreindre la portée de l'enquête que le Comité permanent R précédent avait eu l'intelligence d'ouvrir très largement pour pouvoir appréhender les mécanismes occultes et récurrents susceptibles de sous-tendre les événements et les expliquer.


C'est ainsi que mon premier Comité m'avait chargé d'étudier la période comprise depuis l'arrivée en politique de M. Paul Vanden Boeynants jusqu'à l'arrêt de la Cour d'appel de Mons de 2000, puis de l’étendre encore aux événements survenant dans le cadre du procès dits des Faux du KGB. L'arrivée de M. RAPAILLE changea radicalement la donne puisqu'il décida de limiter les investigations aux années 1975-1981, c'est-à-dire de la date de la première pièce du dossier individuel ouvert à la Sûreté de l'Etat au nom de Benoît de BONVOISIN à la date de clôture des travaux de la Commission WIJNINCKX.

Malgré l'autorisation d'accès et de consultation du dossier CIDEP accordée par le Parquet général près la Cour d'appel de Bruxelles, M. RAPAILLE, prétextant une charge de travail trop lourde eu égard aux effectifs réduits du Service d'enquêtes du Comité permanent R, m'a interdit d'étudier ce dossier dans lequel il apparaissait pourtant bien, selon les informations que j'avais déjà pu recueillir, que certains agents de la Sûreté de l'Etat, notamment son patron, Albert RAES, se sont comportés et ont agi de façon inacceptable pour nuire à Benoît de BONVOISIN, contre lequel il faut bien admettre qu'il s'est acharné avec véhémence en usant et abusant des très hautes fonctions dont il avait la charge.

Mes investigations ont également été freinées par le veto opposé par Albert RAES à son audition par le Comité permanent R, tout comme par le veto du président du Sénat (Armand DE DECKER) à communiquer les bandes d'enregistrement des deux auditions à huis clos et sous serment d'Albert RAES devant la Commission WIJNINCKX ou leur retranscription (communication que le Sénat avait déjà refusée au magistrat instructeur COLLIN, à qui un arrêt de 1987 de la Chambre des mises en accusation de la Cour d'appel de Bruxelles avait prescrit ce devoir. Ce refus du Sénat avait alors été motivé par le respect du principe de la séparation des pouvoirs. Mais en 1998, le Parlement s'est doté de bras armés, les Comités permanents de contrôle des services de police et de renseignements, relevant directement de leur autorité et le refus notifié au Comité permanent R n'a dès lors plus aucune raison d'être, si ce n'est de continuer à éviter que la vérité ne soit connue.


Je retiens en tout cas certains grands traits de l'imposant travail que i'ai pu accomplir seul mais à temps plein pendant la durée de mon détachement au Comité permanent R :

- Pas une pièce, pas un document n'a été découvert dans les très nombreux dossiers examinés qui permette d'alléguer que Benoît de BONVOISIN ait jamais fait partie de l'extrême droite.

Mon rapport final ne mentionne d'ailleurs pas que Benoît de BONVOISIN avait des contacts avec l’extrême-droite, tant ceux-ci avaient été limités et en tout cas clôturés bien des années avant les notes litigieuses de 1981 de la Sûreté de l'Etat. J'en fis état à M. RAPAILLE qui refusa d'entendre mes arguments mais qui me prit méchamment en grippe : il se mit à me harceler moralement, interdisant à quiconque de me confier d'autres tâches ou missions (sinon de me faire colorier des cartes géographiques), puis de charger mon chef de service d'établir des notes extrêmement négatives et non justifiées sur ma personne, ce qui ouvrit la voie à un entretien de fonctionnement, préalable à une évaluation négative. A son tour, celle-ci allait  conduire au refus de renouvellement de mandat et mon éviction du Comité permanent R au  1er septembre 2010 !

- Christian SMETS m'a confirmé qu'il n'avait à aucun moment recueilli la moindre preuve de ce que Benoît de BONVOISIN avait financé l'extrême droite : les montants cités dans certains rapports et notes résultent d'une pure construction intellectuelle de sa part. Des informations recueillies auprès d'informateurs n'ont jamais été vérifiées et ont été communiquées telles quelles aux autorités : tel a été le cas du paiement du local du Front de la Jeunesse et du remboursement d'un emprunt conclu par le Front de la Jeunesse pour l'organisation à Bruxelles d'un meeting de l'Eurodroite en 1979 que la Sûreté a attribué à Benoît de Bonvoisin. Il en est de même pour le paiement de la rémunération d'un conseiller au Nouvel Europe Magazine et de l'évaluation d'un loyer payé par le baron pour abriter le NEM.


- Si Benoît de BONVOISIN a effectivement eu quelques contacts très restreints avec certains responsables du Front de la Jeunesse en 1975,  il se trouve qu'il a rompu tout contact avec eux dès qu'il s'est avéré que certains militants avaient été infiltrés dans ce mouvement  et y recouraient à la violence. Ce constat est très explicitement consigné dans quelques rapports de la Sûreté de l'Etat mais est resté confidentiel à dessein, ce qui est à la fois navrant et déloyal, mais a surtout permis la construction du personnage parfaitement faux du « Baron Noir », qualification   très   largement   et   souvent   relayée   par   des   journalistes, plus que vraisemblablement rémunérés par les caisses très spéciales d'Albert RAES. (que l'intéressé, contrairement aux prescriptions sur la comptabilité de l'Etat, détruisait annuellement, pour en éviter toute forme de contrôle)

- Une seconde « opération » consolidera et appuiera la construction du personnage du « Baron noir » : c'est le dossier Eckehard WEIL qui, par une extraordinaire manipulation, fera croire à l'opinion publique que Benoît de BONVOISIN est actif dans l’exfiltration de néonazis, ce qui est totalement faux mais soutenu avec un aplomb considérable envers et contre tout et tous.

- Au début de mes investigations, j'ai pu bénéficier, comme déjà souligné, tant de l'aide et de l'appui de mon chef de service (M Paul vander Straeten, que du président du Comité permanent R (M. Jean-Claude DELEPIERE), et du conseiller Walter DE SMEDT mais l'arrivée de M. Guy RAPAILLE, en contact fréquent avec la Ministre de la Justice, a ensuite constitué un frein permanent à celles-ci.


- M. RAPAILLE m'a interdit d'avoir accès au dossier CIDEP. Le motif invoqué - la charge de travail trop importante en regard de l'effectif réduit du Service d'enquêtes - était totalement fallacieux : c'était en effet à ce moment le seul dossier conséquent que le Service d'enquêtes et le Comité permanent R avait à traiter, et, le Service d'enquêtes, hormis moi qui était encore occupé par le dossier Benoît de BONVOISIN, s'est en réalité trouvé sans aucune occupation pendant de très nombreux mois (près d'un an) alors que deux nouveaux enquêteurs étaient recrutés ! Sa décision est particulièrement étrange car ce dossier m'est apparu et m'apparaît toujours avoir été créé pour empêcher la prescription du dossier PDG auquel il a été joint. En mai 2000, la Cour d'appel de Mons constatait la prescription de l'un et acquitta Benoît de BONVOISIN de toutes les charges retenues contre lui dans l'autre au bénéfice du doute. Mais les péripéties judiciaires de ces deux affaires (CIDEP et PDG) ont duré près de 20 ans au cours desquels la personne de Benoît de BONVOISIN et sa famille ont été traînés dans la boue lors de campagne de presse savamment orchestrées.

- les trop fameuses notes rédigées en 1981 par le Service d'Etudes de la Sûreté de l'Etat étaient rédigées au conditionnel. Elles furent transformées en indicatif présent « pour les rendre plus positives » et ont été transmises sous cette forme au Ministre de la Justice sur ordre d'Albert RAES et son adjoint Jacques DEVLIEGHERE. Et lorsque Jean GOL succéda à Philippe MOUREAUX au Ministère de la Justice et que, en 1983, il reçut l'assignation de Benoît de BONVOISIN, il chargea Albert RAES de lui faire un résumé de la situation. C'est alors qu'Albert RAES lui adressa une note quasiment identique aux notes qu'il avait adressées à Philippe MOUREAU en 1981 avec la très notable différence que les notes adressées à M. Jean GOL étaient rédigées au conditionnel. Faut-il une autre preuve de la fausseté des notes de 1981 ?


- L'écoute de l'enregistrement des deux auditions d'Albert RAES devant la Commission WIJNINCKX et/ou la transcription de ces enregistrements, soigneusement conservés dans les archives du Sénat, nous a été refusée. Ce refus est d'autant plus incompréhensible que la loi organique sur le contrôle des services de police et de renseignements a doté le Parlement d'un instrument d'enquête relevant directement de son autorité et travaillant principalement pour
lui et dotés d'un budget et de moyens qui sont loin d'être négligeables (le rapport qualité-prix de cet outil mériterait assurément d'être examiné dans le contexte de la crise budgétaired'aujourd'hui)

- La raison pour laquelle la Commission WIJNINCKX a précipité la fin de ses travaux est liée au fait que de nombreuses personnes dont Benoît de BONVOISIN, avaient été salies injustement et demandaient réparation à Philippe MOUREAU. La seule issue politique était de transmettre la note de la Sûreté de l'Etat au Parquet et d'ainsi clôturer les travaux de la Commission, le Parquet de Bruxelles ayant ouvert officiellement une information judiciaire.

- La consultation et l'étude approfondie de toutes les pièces des dossiers judiciaires, administratifs et extraits de presse qui ont émaillés 30 années de la vie de Benoît de BONVOISIN me permettent et m'autorisent de témoigner de ma grande surprise quant à l'attitude de certains magistrats, en particulier du Parquet et du Parquet général de Bruxelles :

- M. Jean DEPRETRE, devenu procureur du Roi de Nivelles, qui a entretenu de curieux contacts tant avec Albert RAES qu'avec le Parquet général, et qui s'autorisera d'insulter publiquement Benoît de BONVOISIN ;

- L'avocat général Jean-François GODBILLE qui fait disparaître une pièce essentielle du greffe correctionnel (probablement une liste de journalistes rémunérés par la Sûreté ; le registre du greffe fait apparaître sans ambiguïté qu'il l'a emportée et jamais restituée. Il témoignera devant plusieurs commissions d'enquêtes parlementaires à l’encontre de Benoît de BONVOISIN avant de se rétracter ;

- Le premier substitut MICHIELSEN qui aurait « hérité » de cette pièce et qui l'aurait égarée... mais qui ne la communique pas au Comité permanent R qui la lui demande...

- Le premier avocat général Pierre MORLET qui, réellement troublé, avoue ne pas comprendre pourquoi Christian SMETS n'a pas été renvoyé devant une juridiction de fond du chef de violation du secret professionnel alors que son réquisitoire a précisément pour objet de lui éviter de devoir comparaître ;(remise d’une situation fiscale de l’hebdomadaire POUR)

- Le procureur général Jacques DELENTDECKER, qui fut chef de cabinet du Ministre de la Justice Melchior WATHELET ne daignera répondre à aucune autorisation de consultation des dossiers judiciaires en cause de Benoît de BONVOISIN sollicitée par le Comité permanent R.

- Le procureur général Marc de le COURT, levant les bras au ciel s'écrie : « Attention, de BONVOISIN, c'est l'extrême droite ! »

J'apprends qu'un magistrat courageux et indépendant du Tribunal de Première Instance de Bruxelles a condamné l'Etat belge à indemniser Benoît de BONVOISIN du préjudice subi dans le cadre de ses affaires.

Sans connaître les motivations juridiques qui ont conduit à cette décision, l'existence de cette décision cent fois justifiées me rassure et me réjouit dans la mesure où elle apportera un peu de baume sur la vie gâchée d'un homme qui a courageusement affronté les outrances auxquelles se sont livrées certains agents de la Sûreté mais aussi le manque de clairvoyance, ou de courage de certains magistrats du fait des manipulations et des fausses notes de la Sûreté de l'Etat à laquelle ils ont attribué des vertus qu'en l'espèce elle a complètement dévoyées.

Mais je reste très sceptique et ai la conviction que l'Etat belge n'admettra pas sa faute et interjettera appel de ce jugement.

Ainsi, Monsieur l'Avocat, je compte sur vous, peut-être paradoxalement, pour me libérer d'un très lourd fardeau qui pèse sur ma conscience. J'ai perdu la foi dans nos institutions que j'ai vu péricliter au fil du temps. Vous faites partie de ce cercle extraordinaire de très grands avocats pénalistes qui m'ont convaincu d'entreprendre une carrière de responsable policier il y a près de 40 ans, pour contribuer à permettre à la justice de faire son oeuvre.

Je reste à votre disposition si vous le souhaitez pour que vous puissiez contribuer à ce que justice soit définitivement rendue à Benoît de BONVOISIN et à l'honneur de sa famille. J'ai consacré cinq ans de ma vie professionnelle à étudier ce dossier et probablement suis-je le seul à avoir pu en examiner toutes les composantes et les aspects. J'apprécierais pouvoir connaître l'épilogue de ce dossier avant de disparaître.

Je vous prie d'agréer, Monsieur l'Avocat, très cher Maître, l'assurance de ma considération très distinguée.



                              R. Van Camp
31/07/2012                                                                                                                        


TRIBULATIONS JUDICIAIRES
 
Le Ministre de la Justice fut alerté par l’avocat de Benoît de Bonvoisin concernant le déni de justice dont son client était la victime : instruction lacunaire, devoirs complémentaires requis par la Cour, non effectués, affirmation de non intention de nuire de la part de Raes alors que c’était lui-même qui avait exigé que l’administrateur adjoint, Jacques De Vlieghere remplace le conditionnel par l’indicatif présent, enfin arrêt indigne d’un Etat de droit, stigmatisé de façon exhaustive par le professeur Bernard Bouloc.

Ces magistrats qui avaient prononcé un non-lieu en faveur de Raes et Smets, malgré les faits accablants précités, ont-ils été inspirés par l’Allemagne des années 30 ? Il y a certaines similitudes. Car avec l’arrivée au pouvoir d’Hitler en 1933, la Cour Suprême de Prusse avait déclaré en 1935 que les décisions et les actions de la Gestapo, fondée en Prusse par Hermann Göring, n’étaient pas sujettes à examen judiciaire. Quant à la loi fondamentale de la Gestapo, promulguée par le gouvernement le 10 février 1936, elle plaça l’organisation de la Police Secrète au-dessus de la loi. En quelque sorte comme en Belgique où le pouvoir plaça Raes/Sûreté de l’Etat au-dessus de la loi applicable à tout un quidam. Les tribunaux allemands n’avaient le droit d’intervenir d’aucune façon dans ses activités. Comme l’expliqua le Docteur Werner Best, un des bras droits d’Himmler à la Gestapo : « Dès l’instant que la police exécute la volonté du gouvernement, elle agit légalement. »


Agissant sur base de l’article 485 du code de procédure pénale concernant des infractions de la magistrature, le déni de justice dans le cas présent, le Ministre de la Justice décida après examen de demander une enquête et pour ce faire référa le cas à la Cour de Cassation. Au lieu d’arriver à la Cour de Cassation, organe indépendant de l’exécutif, le dossier atterrit chez le Procureur général de la Cour de Cassation qui le transféra au Procureur général du Parquet de Bruxelles, André van Oudenhove. Ce Parquet était  j u s t e m e n t  celui qui avait requis un non-lieu à l’encontre de Raes, non-lieu faisant l’objet de critiques sévères de la part du professeur Bouloc. M. Van Oudenhove allait-il se déjuger ?
 
Et  M. Van Oudenhove de classer tout simplement ce dossier sans suite. Ce qui est « verbijsterd » - déconcertant - relate alors De Tijd, car en violation du principe fondamental de la séparation des pouvoirs dans un Etat de droit.
 
Or, ce n’était pas la première fois que le Ministre de la justice se voyait éconduit par la haute magistrature.

Le Ministre de la Justice étant le chef hiérarchique du Parquet,  l’attitude de M. Van Oudenhove, est inexplicable. Mais le Parquet, habité d’un sentiment de présomption de légitimité quels que soient ses agissements, jouit d’une quasi impunité.
 
Ce n’était pas la première fois qu’un problème se présentait entre un Ministère public et l’exécutif. Certains états en ont tiré les conséquences, notamment la Suisse où le cordon ombilical qui avait toujours relié le Ministère public à l’exécutif a été coupé, en 2012. Le Parquet est y maintenant soumis à la surveillance d’une autorité ad hoc, élue par le Parlement et composée de magistrats, d’avocats et d’experts. Ainsi le Parquet n’y est plus soumis au pouvoir exécutif et peut faire l’objet d’un certain contrôle, ce qui manque de façon manifeste en Belgique.
 
Car, en démocratie, disait Francis Delpérée, député fédéral CDH et professeur de droit constitutionnel, lors d’une émission dominicale, aucun pouvoir ne peut échapper à la responsabilité et donc à un contrôle émanant d’une autre instance. Or, en Belgique,  le Parquet, lui, échappe à tout contrôle externe. Ce qui peut conduire à des abus.
 
A titre d’exemple, en 1995, lors d’une comparution de Benoît de Bonvoisin, le substitut du procureur du Roi, Jean-François Godbille déclara qu’il demandera que le glaive de la Justice s’abatte sans pitié s’il entend la défense dire que la presse s’est liguée avec la Sûreté de l’Etat. Or, c’est Godbille lui-même qui enleva au greffe du tribunal de Bruxelles la liste des journalistes payés par la Sûreté de l’Etat (voir plus loin) et il sait, à cette époque, que deux sur trois des affirmations de la (fausse) note de la Sûreté sont inexactes. Quelle hypocrisie !
 
Et, en 1996, c’est le substitut du Procureur du Roi, Jean-Marie Mawet qui se disqualifie en déclarant à Benoît de Bonvoisin qu'en offensant systématiquement les institutions de notre pays comme la Sûreté de l’Etat, c’est la démocratie elle-même qu’il met en péril. Or, lui aussi sait – unicité du Parquet – que deux des trois accusations contenues dans la (fausse) note de la Sûreté de l’Etat sont inexactes et que les notes de la Sûreté sur Benoît de Bonvoisin rédigées au mode conditionnel ont été, par Jacques De Vlieghere, transformées en indicatif affirmatif, cela sur ordre d’Albert Raes.
 
Bref, ces deux magistrats ont manqué de loyauté par rapport à leur serment.
 
Mais il y a plus.
 
Lors d’une perquisition à la Sûreté de l’Etat, est saisie une liste de journalistes rémunérés par la Sûreté de l’Etat. Cette liste comprend une vingtaine de noms. Surprenant ! Car une perquisition à la Sûreté ne s’effectue pas comme chez n’importe quel citoyen. Le Comité Supérieur de Contrôle chargé de cette perquisition avait préalablement prévenu M. Raes par téléphone. Alors qu’une perquisition est effectuée par une escouade d’enquêteurs, Raes demanda qu’une seule personne du Comité se présente. Et ceci fut accepté ! Ce n’est pas exactement ce qui est prévu par le code d’instruction criminelle.
 
Cette liste de journalistes rémunérés par la Sûreté ayant été saisie, qui peut y avoir accès ? Le juge d‘instruction, le Parquet et les avocats des parties intéressées. C’est ainsi que les avocats de Benoît de Bonvoisin, Maître Mario Spandre et Maître Julien Pierre, purent prendre connaissance de cette liste et en relever les noms, une dizaine en tout. Lorsqu’ultérieurement, ils voulurent en prélever une copie, le greffier, examinant son registre, leur indiqua que la liste avait été « empruntée » par Jean-François Godbille. Revenant ultérieurement au greffe, ils reçurent la même réponse. Celle liste ne fut jamais retournée par M. Godbille. Obstruction à la justice ! Dans certains pays, tels les Etats-Unis, cette action est qualifiée de crime. Quand M. Godbille fut nommé avocat général à la Cour d’appel, il remit la liste en question à son successeur B. Michielsen. Interrogé par M. Reinier Van Camp du Comité R, M. Michielsen lui répondit qu’il ne savait plus ce qu’il avait fait de ce document. M. Van Camp alla alors s’en ouvrir au Procureur général Marc de le Court qui refusa d’ouvrir une enquête.
 
Il est vrai que, très curieusement, depuis le début de ses difficultés judiciaires, à la veille des audiences concernant Benoît de Bonvoisin,  il s’est souvent trouvé un des journalistes figurant sur cette liste pour écrire un article négatif sur Benoît de Bonvoisin.
 
Mais il y a plus et pire.
 
Lors de la Commission d’enquête parlementaire sur les tueries du Brabant Wallon, Jean-François Godbille interrogé sous serment, le 25 février 1997, déclara que Benoît de Bonvoisin pouvait être vu comme le financier d’une mouvance mafieuse qui était à l’origine des tueries du Brabant Wallon.  Là-dessus, Benoît de Bonvoisin se rendit de sa propre initiative auprès du magistrat en chef responsable de l’enquête M. Freddy Troch. Il lui référa les réflexions de M. Godbille et lui indiqua qu’il se tenait à sa disposition pour être interrogé. Celui-ci déclina de l’interroger. Benoît de Bonvoisin insistant, M. Troch lui dit alors que s’il avait eu le moindre soupçon, il l’aurait convoqué depuis longtemps. Et la visite se termina là.
 
Quand le procès-verbal de son audition devant la Commission d’enquête fut présenté à M. Godbille pour son approbation, M. Godbille barra ce qu’il avait indiqué, comme précisé plus haut, à propos de Benoît de Bonvoisin. Déloyauté, perversité, intention de nuire de M. Godbille ?
 
Mais connaissant le poids oppressant de la hiérarchie au sein du Parquet, plus écrasant que celui existant au sein de l’armée où aujourd’hui un militaire peut refuser d’obtempérer à un ordre que réprouve sa conscience, M. Godbille n’a pas pu proférer semblable aberrante contrevérité sans l’accord de sa hiérarchie. Or le Procureur général à l’époque était M. André Van Oudenhove.
 
Là-dessus, Benoît de Bonvoisin déposa plainte à l’encontre de M. Godbille. Celle-ci, en vertu du privilège de juridiction dont jouissent les magistrats, fut référée au Procureur général, M. André Van Oudenhove qui classa tout simplement l’affaire sans suite. Cela pouvant être interprété comme un aveu. Il est bon de rappeler ici cette réflexion du Professeur Bouloc : « il est inadmissible, que dans un Etat de droit, pour tenter de sauver l’honneur d’une institution, la Sûreté de l’Etat -  qu’un arrêt de non-lieu a tenté de mettre hors cause - on sacrifie et continue à sacrifier l’honneur d’un citoyen. A terme, après la Sûreté, la justice belge y laissera, elle aussi une partie de son honneur ».
 
Ce qui précède montre qu’un contrôle des agissements du Parquet devrait être établi. De même qu’une possibilité de recours quand un magistrat du Parquet enfreint le principe de loyauté contenu dans son serment de magistrat.

Citons ici la réflexion d’Hendrik Vuye, député N-VA et professeur de droit constitutionnel à l’université de Namur : « ce qui importe, c’est l’indépendance et l’impartialité des juges…  La justice doit s’adapter à un monde qui change. Elle devrait également rendre des comptes. Or, qui contrôle aujourd’hui les hauts magistrats ? Je me le demande. »

 
En ce qui concerne les dysfonctionnements judiciaires, citons celui du juge d’instruction M. Jean-Claude Van Espen. Dans le cadre de l’affaire PDG-Cidep, M. Van Espen fait mettre les scellés sur la cave d’un immeuble appartenant à Benoît de Bonvoisin à Etterbeek sous prétexte qu’il y a dans la cave des documents à examiner. En semblable circonstance, on emporte les documents qui sont visés et on laisse le local à disposition. Pas dans ce cas-ci. Les scellés portent sur les deux pièces où se trouvent notamment les tableaux électriques et la chaudière. Ceci rend l’immeuble indisponible tant pour la vente que pour la location ce qui paraît l’évidence même et de plus va à l’encontre des exigences du code bruxellois du logement. Benoît de Bonvoisin est blanchi en mai 2000 dans le cadre de l’affaire PDG-Cidep au grand dam de la Justice qui espérait ainsi pouvoir prouver qu’au moins une petite partie de la note Sûreté était vrai. Or, il n’y a  j a m a i s  eu aucuns devoirs d’enquête concernant le contenu de cette cave mise sous scellés. Le juge d’instruction ou un de ses adjoints n’est jamais venu examiner les pièces contenues dans la cave. Alors ces scellés, ils procédaient de quoi, d’une intention de nuire ? Quant à la levée des scellés, elle ne fut pas automatique après l’acquittement de Benoît de Bonvoisin. Après en avoir demandé de nombreuses fois la levée et en avoir alerté notamment le Procureur général de Bruxelles où l’immeuble de Benoît de Bonvoisin est situé et le Parquet général de Mons, Mons où Benoît de Bonvoisin avait été acquitté,  r i e n  ne bougea, les scellés n’étaient toujours pas levés. Finalement les scellés furent levés six ans après l’acquittement de Benoît de Bonvoisin par le curateur de Cidep qui décida d’autorité de les lever.
 
Ceci est manifestement un abus de puissance, causant un dommage à Benoît de Bonvoisin. Celui-ci lança une assignation à l’encontre de l’Etat belge. En première instance, le tribunal, soulignant l’acharnement de l’Etat belge à l’égard de Benoît de Bonvoisin,  condamna l’Etat à des dommages en faveur de Benoît de Bonvoisin avançant que « la mise sous scellés a été pratiquée d’une manière préjudiciable et en violation des règles de proportionnalité qui s’imposaient au juge d’instruction et qu’elle a par la suite été maintenue pour une durée parfaitement anormale ». Quand on sait la circonspection avec laquelle les magistrats rédigent leurs commentaires, ce qui précède est un soufflet tant à l’égard du juge d’instruction Van Espen que des magistrats du Parquet qui délibérément refusaient la levée des scellés. L’Etat ne pouvant supporter que le comportement d’un juge d’instruction soit mis en cause, il se pourvut en appel et la Cour confirma la décision du tribunal de première instance.
 
Il est approprié d’indiquer ici la réflexion de Camille Desmoulins : Ce sont les despotes maladroits qui se servent des baïonnettes : l’art de la tyrannie est de faire les mêmes choses avec des juges.

                                                                                                                 
REFLEXIONS ELECTORALES … ET AUTRES
 
Avant d’examiner l’affaire des faux documents rédigés comme suite à la provocation incitée par un officier de police judiciaire, où l’Etat confirme le vieil adage latin  « errare humanum est, perseverare diabolicum », affaire sévèrement critiquée par le professeur Bouloc, penchons-nous sur les changements électoraux résultant du mensonge de Raes, sous serment, à la Commission parlementaire Wijninckx et à celui de Moureaux à la Chambre, en juin 1981.
 
Du fait du contenu de la (fausse) note Sûreté, Gérard Deprez, Président du PSC, suspend provisoirement les membres directeurs du Cepic. Ceci apparaît être une mesure normale. Ce qui l’est moins, c’est la dissolution pure et simple du Cepic, sans en entendre ses responsables quant à la nature des faits qui leur sont reprochés, cela sous la pression médiatique anti-Cepic organisée par des journalistes stipendiés par la Sûreté. Ces journalistes sont informés parfois/souvent par certains en violation de leur secret professionnel, comme le précise l’auteur du livre L’Enquête qui écrit : « Ma gratitude s’adresse également aux policiers, gendarmes et magistrats qui, guidés par un réflexe démocratique, m’ont aidé de leur documentation, conversations et conseils. Pour des raisons évidentes, je ne peux les citer nommément dans ce livre ». Et ces policiers, gendarmes et magistrats ne seront ni poursuivis, ni admonestés. La violation récurrente du secret de l’instruction dans cette affaire est pour les autorités judiciaires et policières un concept à géométrie variable : en fait, elle n’est sanctionnée que quand elle dérange, non pas le citoyen présumé innocent mais le système judiciaire et policier dans son ensemble.
 
Gérard Deprez  -  qui fut condamné pour ses propos calomnieux formulés à l’égard du Cepic, par la 1ère chambre civile du tribunal de première instance de Namur, malgré le fait qu’il invoqua l’immunité parlementaire en tant que membre du parlement européen  -  n’eut pas cette prescience de la Libre Belgique qui dans son édition du 14 avril 1988 titrait : Un faux a-t-il été fabriqué pour perdre le CEPIC et son trésorier ? Précisons ici que le nom d’aucun journaliste de la Libre Belgique n’apparaissait sur la liste des journalistes stipendiés par la Sûreté, liste subtilisée par Jean-François Godbille comme précisé ci-avant.
 
La décision brutale de Gérard Deprez de dissoudre le Cepic, mouvement centriste, explique le déclin régulier, qui semble inéluctable depuis lors, du PSC malgré sa mue de PSC en CDH en 2002. Quel pressentiment avait donc le docteur Georges Henrard, président du Cepic en janvier 1982 quand, dans une interview à La Libre Belgique, il déclarait « Sans le Cepic, le PSC est condamné à disparaître ». C’est ce que Gérard Deprez, Président du PSC de 1981 à 1996 a dû réaliser puisqu’il rejoignit ensuite le PRL, prédécesseur du MR où il retrouva nombre d’anciens membres du Cepic.


Du fait de cette campagne à l’encontre du Cepic, mouvement centriste du PSC que la (fausse) note Sûreté associe à l’extrême droite pour le perdre, le PSC et son frère néerlandophone, le CVP, encaissent aux élections législatives du 8 novembre 1981 une dégelée et perdent respectivement 7 et 14 sièges à la Chambre tandis que le PRL et son frère néerlandophone en gagnent respectivement 9 et 6. Les élections du 8 novembre 1981 ont été la plus grande défaite électorale du CVP dans l’après-guerre. Les résultats du PSC furent également désastreux. Les grands vainqueurs des élections étaient les libéraux, écrit Wilfried Martens dans ses mémoires.
 
Philippe Moureaux dont le parti PS gagne 4 sièges, voit son but atteint : s’assurer qu’une aile centriste ne viendra pas faire de l’ombre à la Démocratie chrétienne, aile gauche du PSC.
 
Bernard Bouloc dans ses remarques datées du 21 février 1995 souligne les positions empreintes d’abus de puissance morale de trois Ministres de la Justice successifs, Philippe Moureaux, Jean Gol et Melchior Wathelet.
 
Les attitudes de ces trois Ministres, certes condamnables sur le plan moral, s’expliquent par des considérations bassement politiques pour Moureaux et Gol mais restent plutôt inexplicables pour Wathelet.
 
1.   Moureaux qui, le 24 juin 1981, lors du débat sur la fuite dans la presse de la (fausse) note Sûreté devait s’entendre reprocher à la Chambre : « L’attitude du Ministre laisse croire en tout état de cause que la Justice peut être manipulée pour des raisons politiques ».
 
Moureaux a réalisé ce qu’il recherchait : détruire l’expansion d’une aile centriste au sein du PSC en dénaturant malicieusement les buts poursuivis par le Cepic en le teintant d’extrême droite. Ce qui est tout à fait faux quand on consulte le programme, les statuts du Cepic que la Cour avait demandé d’examiner, ce que le Juge d’instruction Collin s’abstiendra de faire*.
 
2.    Gol que Benoît de Bonvoisin rencontre pour lui demander de rétablir la vérité s’en abstient, alors que Gol sait que Raes a commis un faux avec la première version du document Sûreté rédigé au conditionnel et sous son ordre transformée de façon affirmative à l’indicatif présent et sa seconde version – celle demandée par Gol – retransformée, elle, comme initialement rédigée au conditionnel. Ce qui se passe électoralement sert Gol, disons son parti, car nombre de ceux qui ont quitté le Cepic, l’aile centriste du PSC, se sont alors ralliés au parti libéral.
 
Lors de cette audition, Jean Gol déclare : « Il est évident que la Sûreté de l’Etat a fait l’objet d’attaques violentes depuis plusieurs années. Ces attaques émanaient notamment d’une personne se jugeant gravement diffamée par une note communiquée à mon prédécesseur, Philippe Moureaux, et publiée par la presse. Cette personne - Gol ne nomme pas Benoît de Bonvoisin - est actuellement prévenue sur base de faits établis par le dite Sûreté de l’Etat ». Ainsi, Gol, malicieusement, donne du crédit à la (fausse) note Sûreté alors qu’à cette époque deux des trois accusations de Raes sont confirmées fausses par le Parquet dont Gol est le chef hiérarchique. De plus, Gol est au courant que la note Sûreté est un faux car si la note Sûreté envoyée à Moureaux était, sur ordre de Raes, rédigée non plus au conditionnel mais à l’indicatif présent, celle demandée par Gol à Raes lui fut remise comme dans sa version originale, au mode conditionnel, par le même Raes. Ce faux, à cette époque, Benoît de Bonvoisin n’en était pas au courant car il ne sera révélé que des années plus tard, en 2009, par le Comité R.
Mais depuis quand un ancien Ministre de la Justice, Jean Gol, intervient-il dans une affaire judiciaire pour charger un citoyen sur base d’une note qu’il sait fausse ?
Certains ont dû se rendre compte de cette situation irrégulière. En effet, si ce qui précède ressort avec précision du compte rendu analytique de la réunion publique de la Commission de la Justice, les Annales parlementaires, elles, en présentent une version un peu différente, édulcorée. Ce que plus d’un considère comme un faux. Et cerise sur le gâteau, Gol déclare à la Chambre ce jour-là, pour redorer la réputation écornée de Raes que ce dernier, récemment, avait fait l’objet de l’attribution d’une distinction honorifique importante.  
Mais depuis quand un haut fonctionnaire, alors qu’il est inculpé, reçoit-il une distinction honorifique importante ?

 
Ceci explicite ce que le Procureur général André Van Oudenhove disait à Maître José Saels lors de ses entretiens avec lui les jeudis 4 et 11 août 1994. Concernant le problème Sûreté -  Benoît de Bonvoisin, Van Oudenhove précise en avoir parlé au Ministre de la Justice. Il ne comprend pas le point de vue adopté par le monde politique et regrette qu’il n’y ait pas eu d’ouverture du gouvernement. Il parle d’inexplicables errements et de dérapage. Il est embarrassé par cette affaire qu’il qualifie de délicate et ennuyeuse et il ajoute qu’elle va entacher son ministère. M. Van Oudenhove se rappelait-il qu’en 1990, il avait déclaré, comme le releva La Libre Belgique,  « si le ministère public devait devenir une annexe du pouvoir exécutif, on en arriverait à une immixtion inacceptable du politique dans le domaine judiciaire ». C’est précisément ce qui arriva alors qu’il était Procureur général à Bruxelles.


Van Oudenhove, comme on le verra par la suite, eut un rôle maléfique dans l’affaire des faux documents. En effet, mis au courant par un Bâtonnier qu’il s’agissait d’un complot, il se refusa, comme il en avait l’obligation, à ouvrir un dossier dans la suite de l’article 29 du Livre Ier du Code d’instruction criminelle, cela pour mettre fin à ce complot et protéger la victime, Benoît de Bonvoisin. Comment comprendre cette attitude de sa part, cette incapacité à résister à des pressions extérieures ? Arrivé à ce niveau de carrière, on devrait pouvoir se libérer de tout réflexe de soumission.

L’implication du pouvoir exécutif dans le monde judiciaire, soulevée par le professeur Bouloc, est manifeste et répétée comme le montre aussi l’exemple suivant : en mai 1990, Maître Saels accompagné de Maître Roland Houver, avocat à Strasbourg, rendent visite à Jean-François Godbille, Premier substitut du Procureur du Roi. Leur conversation est interrompue par un coup de téléphone qui mécontente Godbille qui s’oppose à la proposition qui lui est faite.
La conversation terminée, Godbille, énervé, dit à ses deux interlocuteurs qu’on* lui demande d’inculper Benoît de Bonvoisin dans l’affaire des horodateurs à Liège. Il précise qu’il s’y est opposé car Benoît de Bonvoisin n’a rien à voir dans ce dossier, ajoutant qu’il n’a jamais subi autant de pression que dans le dossier Bonvoisin.
 
Et cependant Benoît de Bonvoisin sera inculpé dans cette affaire des horodateurs où sont poursuivies une dizaine de personnes. Sa conscience, son jugement de valeurs se volatilisent-ils dans cette organisation implacable qu’est le Ministère public qui dépend de l’exécutif ?
 
Comment Godbille peut-il alors justifier son inconséquence quand durant cette  m ê m e année 1990, il déclare sous serment à la Commission d’enquête parlementaire présidée par M. Van Parys : aucune pression politique n’a été  exercée à  l’égard d’un magistrat chargé de dossiers délicats.
 
A noter que Benoît de Bonvoisin sera le  s e u l  à être relaxé dans l’affaire des horodateurs et que Godbille aura pourtant un sursaut de sens moral dans l’affaire des faux documents.
 
Ajoutons que dans sa lettre du 11 mai 2000 adressée au Ministre de la Justice, l’avocat Julien Pierre lui mentionnait l’attitude inacceptable de Monsieur le Premier Substitut Godbille. A titre d’exemple, dans l’affaire PDG-Cidep, Godbille téléphona à l’avocat d’un des co-inculpés pour lui suggérer que son client enfonce Benoît de Bonvoisin et que, dans ce cas, il serait acquitté. Cela en Belgique ! Comme c’était le cas dans l’URSS de Staline.



Dans le même ordre d'idée, mentionnons aussi qu’en novembre 1986, après avoir mis fin au différend qui l’avait opposé à Claude Eerdekens, bourgmestre d’Andenne, qui l’avait rudoyé sur base de la (fausse) note de la Sûreté, Benoît de Bonvoisin téléphona à Raes lui proposant d’enterrer également avec lui la hache de guerre. Comme l’indiqua Benoît de Bonvoisin lors d’une interview à De Tijd, la réponse de Raes fut « Ik wil well, maar daartoe moet ik eerst toestemming vragen aan procureur Van Honste van het Hof van Beroep ».
 
3.   Wathelet, père, devient Ministre de la Justice en mai 1988 et le sera jusqu’en juin 1995. Il entre en fonction alors qu’a été rendu l’arrêt de 1987 demandant de nombreux devoirs complémentaires dans l’instruction de la plainte de Benoît de Bonvoisin à l’encontre de Raes, devoirs qui ne seront dans l’ensemble pas effectués*, ce qui ne dérangera pas la Cour d’appel pour décider, en 1992, d’un non-lieu en faveur de Raes dans un arrêt déclaré indigne d’un Etat de droit par le professeur Bouloc. Or cet arrêt est rendu comme suite aux recommandations du Parquet général, où le maître est André Van Oudenhove dont le chef hiérarchique est Wathelet. Or ce dernier connait la forfaiture d’Albert Raes. En 1991, dans l’avion le conduisant au Maroc, pour la signature à Rabat d’une convention belgo-marocaine portant sur la situation d’enfants de couples belgo-marocains, Wathelet confiera à certains   -   qui le rapporteront à Maître José Saels   -   que cette affaire Sûreté de l’Etat le préoccupe, qu’il faut trouver une solution honorable et que cela pourrait finir par salir son mandat à la Justice. Wathelet leur demandera de rester discret à cet égard. Wathelet ne fera rien, étant sans doute lui aussi soumis à de (trop) fortes pressions ?

Car Wathelet connaissait la « faute » de Raes et confirmait d’ailleurs qu’il la connaissait bien : lors de cette réunion de la Commission de la Justice du 7 novembre 1990, interrogé par Gol sur l’aspect mesure disciplinaire au sein de la Sûreté de l’Etat, Wathelet indiqua : « Il y en a une qui est de toute façon arrêtée par une instruction judiciaire en cours », celle de Benoît de Bonvoisin à l’encontre de Raes pour sa fausse note. Et Wathelet d’ajouter : Pour moi, c’était une erreur de ne pas reconnaître la  f a u t e  immédiatement et de ne pas en tirer tout de suite les conséquences.
 
Wathelet a pour chef de cabinet Jacques De Lentdecker qui plus tard devint Procureur général à Bruxelles. Ce dernier ne daignera répondre à  a u c u n e  demande de consultation des dossiers judiciaires concernant Benoît de Bonvoisin sollicitée par le Comité R. Alors que d’après la loi de 1991, le Comité R peut se faire transmettre tout document qu’il juge nécessaire et entendre toute personne dont l’audition lui paraît utile.
 
En résumé, Wathelet de même que Gol  sont restés p a s s i f s devant le fait répréhensible de Raes. Quand on se rappelle qu’un ecclésiastique a été, lui, condamné, en 2015,  par la Cour d’appel de Liège pour être resté p a s s i f quand un fait répréhensible – le cas d’un prêtre pédophile -   lui a été dénoncé et pour avoir maintenu la victime dans un sentiment d’injustice et d’abandon, il semble y avoir une justice à deux vitesses en Belgique.
 
Quand Benoît de Bonvoisin enverra à Wathelet l’étude de Bernard Bouloc (déni de justice, simulacre de justice, arrêt indigne d’un Etat de droit…), Wathelet la lui renverra tout simplement sans un mot d’explication ce qui est peu élégant de sa part et traduit un certain sentiment de culpabilité. A noter que ce même mémorandum de Bernard Bouloc adressé à André Van Audenhove amènera ce dernier à en accuser réception à Benoît de Bonvoisin.
 
L’infamie de Raes devait tout de même titiller Wathelet sur les plans justice, éthique, moral mais en plus, il devait en constater les dégâts encourus par son parti, le PSC, aux élections législatives successives depuis que le parti dont le Président était Gérard Deprez, avait dissout le Cepic, faisant foi à la (fausse) note Sûreté et à la prose de journalistes stipendiés par Raes.
 
C’est alors que Wathelet est Ministre de la Justice, la Sûreté rapportant à ce Ministère, que Raes dont la réputation/crédibilité est de plus en plus mise en cause, est amené à « donner » sa démission en juin 1990. Dans le cadre de la plainte de Benoît de Bonvoisin à l’encontre de Raes, un arrêt de la Cour d’appel de Bruxelles de 1992 déclare un non-lieu pour Raes, arrêt, rappelons-le, déclaré indigne d’un Etat de droit par le professeur Bouloc.
 
Là-dessus, Raes formule un recours au Conseil d’Etat et celui-ci ordonne à Wathelet de réintégrer Raes.
 
Comment ces hauts magistrats du Conseil d’Etat ont-ils pu rendre pareil avis ? Cela ne signifie-t-il pas que Wathelet n’a pas informé le Conseil d’Etat de ce que le rapport Sûreté était un faux et que Raes avait menti sous serment à la Commission d’enquête Wijninckx ?
 
Alors que son parti, le PSC, s’étiole et rencontre des vents contraires, le Président Gérard Deprez prône l’idée d’une fédération regroupant le PSC, le PRL et le FDF. A cela le PSC rechigne n’étant pas ouvert à un certain multiculturalisme. Et en janvier 1998, le Comité directeur élargi du PSC annonce l’exclusion de Gérard Deprez du parti. Deprez poursuit cependant sa carrière politique, entraînant avec lui des membres du PSC, en fondant le Mouvement des Citoyens pour le Changement (MCC) qui ultérieurement rejoindra le MR, ceci étant le nouveau nom du PRL où Deprez retrouve bon nombre d’anciens membres du Cepic. Résultat : aux élections fédérales de 1999, rebelote pour le PSC qui perd un peu plus de 100.000 voix. Le déclin du monde catholique traditionnel et de ses institutions si pas de ses valeurs semble devoir entraîner le déclin irrémédiable du PSC qui se positionne dans une vision de la société de plus en plus socialiste. Le PSC se renommera cdH en 2002 et comme le disait Deprez en 2014, il incline systématiquement à gauche.


PHILIPPE DESTATTE – PARQUET DE LIEGE
  
Philippe Destatte, Directeur général de l’Institut Destrée et professeur d’histoire à l’université de Mons et auprès de deux universités en France, écrit dans un livre intitulé « Nouvelle Histoire de Belgique (1970-2000) », publié en 2009, des assertions tout à fait fausses sur Benoît de Bonvoisin basées sur la (fausse) note de Raes.
 
Ses erreurs, M. Destatte refuse de les corriger dans la prochaine édition de son ouvrage, comme cela lui est proposé, preuves à l’appui. De ce fait, Maître Pierre, l’avocat de Benoît de Bonvoisin, lui écrit le 5 janvier 2012 : « L’erreur commise par un quidam serait déjà inacceptable. Qu’elle soit commise par un historien de votre statut est purement et simplement incompréhensible et révèle d’ailleurs au passage que non seulement le grand public mais même des gens réputés avertis ont été complètement conditionnés dans ce dossier par une presse irresponsable souvent au service de la Sûreté de l’Etat. Quoiqu’il en soit, il me plaît de considérer que les scientifiques se référant simplement à des articles de presse pour fonder leurs écrits se discréditent sérieusement ».
 
Tenant compte du refus répété de Philippe Destatte à la solution souple qui lui est proposée, assignation est lancée à son encontre. L’affaire vient devant le tribunal de Première Instance de Liège, le 15 janvier 2013.
 
Comme il s’agit d’un procès de presse, le Parquet doit être présent. Aussi le dossier avait-il été confié, pour examen préalable, à une représentante du Ministère Public.  Et celle-ci, à l’audience,  réfutera le point de vue de l’avocat de Benoît de Bonvoisin donnant donc fallacieusement foi aux fausses accusations de la note de Raes, négligeant de tenir compte – unicité du Parquet -  de ce que son collègue J.Fr. Godbille avait déclaré sous serment devant la Commission parlementaire présidée par M. Bourgeois « concernant le dossier de Bonvoisin, j’oppose un démenti formel à la note de la Sûreté de l’Etat parue le 5 mai 1981 dans De Morgen ».
 
La présidente du tribunal ne suivra pas le point de vue falsifié du Parquet et condamnera Destatte qui ne se risquera pas à se pourvoir en appel.
 
Autrement dit, dans le cas présent, le Parquet de Liège fait du négationnisme en enjoignant à une de ses membres de masquer la réalité car le Parquet sait que les trois dénonciations de la perfide note de la Sûreté sont fausses. Se rappelant vraisemblablement la réflexion de Voltaire « plus l’abus est antique, et plus il est sacré », le Parquet
 persiste à occulter la vérité en tentant de jeter un voile d’amnésie sur les années 80, années troubles pour la Sûreté et certaines instances du pouvoir judiciaire, ce qui continue à déranger plus d’un. 
 
Un quidam qui viendrait avancer, dans quelque affaire, semblable contrevérité telle que celle avancée par le Parquet serait assurément condamné par les tribunaux et cela certes à la demande du Parquet lui-même.
 
Contrefaire une réalité qui dérange, manipuler fallacieusement l’opinion publique dans le but de lui donner une orientation destinée à légitimer la bavure de la Sûreté de l’Etat, cela avec l’aide d’une presse stipendiée et ici du Parquet qui, encore aujourd’hui, tente de légitimer l‘action du pouvoir exécutif. C’est ce que le Ministre de la Justice Wathelet appelait une  e r r e u r. Cela s’est passé en Belgique, c’est la caractéristique des pays totalitaires où le respect et le sort de l’individu sont sans importance.




L’AFFAIRE DES FAUX DOCUMENTS OÙ APRÈS AVOIR FAIT DES FAUTES CONTRE L’ESPRIT, LA JUSTICE EN COMMET UNE, INDÉLÉBILE, CONTRE SON HONNEUR

Benoît de Bonvoisin ayant été acquitté par la Cour d’appel de Mons, en mai 2000, dans l’affaire PDG Cidep, cela signifiait qu’après les deux premières accusations de la Sûreté de l’Etat qui étaient apparues inexactes, la troisième accusation devenait fausse également.
 
Le pouvoir, l’exécutif était très mécontent de cette décision judiciaire et le Président de la Cour d’appel de Mons allait en subir les conséquences. Le pouvoir devait s’attendre à semblable verdict judiciaire.
 
Pour tenter de discréditer Benoît de Bonvoisin fut concoctée l’affaire des faux documents qui fut initiée avant l'acquittement de mai 2000. Après la désinformation et la diffamation de la part de l’Etat, voilà maintenant une manœuvre de provocation de la part de celui-ci.


Pourquoi donc ?
Le premier point de la (fausse) note Sûreté, l’aspect Front de la Jeunesse, s’était avéré faux. Le second point de la (fausse) note Sûreté, l’aspect Ekkerhard Weil, également.
Et si le troisième point, l’affaire PDG-Cidep, s’avérait faux également ? Le pouvoir le craignait. Il fallait donc empêcher Benoît de Bonvoisin de pouvoir assigner l’Etat. Et pour cela, le pénal tenant le civil en l’état, fut montée une affaire pénale, l’affaire des faux documents.


Ces documents furent réalisés par un repris de justice en mission d’infiltration auprès de Benoît de Bonvoisin, à l’instigation de l’officier de police judiciaire J.P. Elise de la 23ème brigade spéciale de recherche de la gendarmerie, comme le précise un courriel de décembre 2001 adressé à Philippe Brewaeys. Et cela soit sur un ordinateur d’un des copy-shops du boulevard Général Jacques à Bruxelles, soit sur son ordinateur personnel. Quand la situation devint dangereuse pour lui, c’est J.P. Elise lui-même, à l’époque en fonction à Bruxelles puis transféré ensuite en Wallonie à la Police Judiciaire Fédérale de Namur en tant que Commissaire Divisionnaire de Police, qui alla chez ce repris de justice pour subtiliser son ordinateur personnel.

Benoît de Bonvoisin montra ces documents à un bâtonnier qui déclara « si ces documents sont vrais, c’est grave et s’ils sont faux, c’est grave également ». Sur son conseil, l’avocat de Benoît de Bonvoisin, Maître Mario Spandre alla en montrer certains au Parquet de Bruxelles.
 
Ayant appris la conjuration contre Benoît de Bonvoisin, un bâtonnier célèbre, autre que le précédent nommé, demanda audience au Procureur général de Bruxelles, M. Van Oudenhove qui était alors assisté du Premier avocat général Morlet. Il fut reçu par eux, le 6 décembre 1995.
Il leur précisa qu’il avait appris le complot en cours à l’encontre de Benoît de Bonvoisin, leur indiqua qui avait fabriqué les faux destinés à discréditer Benoît de Bonvoisin, de même que le nom de l’officier de police judiciaire derrière le complot. Le Procureur général et le Premier avocat général l’écoutèrent mais ne réagirent nullement pour faire cesser ce complot. A la fin de l’entretien, le bâtonnier se rendit chez le bâtonnier en fonction, Maître Georges-Albert Dal et lui fit rapport sur la conversation qu’il venait d’avoir. Ceci Maître Dal le consigna dans un rapport écrit pour le bâtonnat.
 
En fait, l’article 29 du Livre Premier du Code d’instruction criminelle enjoignait aux deux magistrats précités d’agir. En effet, cet article indique que toute autorité constituée, tout fonctionnaire ou officier public qui, dans l’exercice de ses fonctions acquerra la connaissance d’un crime ou d’un délit, sera tenu d’en donner avis sur le champ au procureur du Roi près le tribunal dans le ressort duquel ce crime ou ce délit aura été commis ou dans lequel l’inculpé pourrait être trouvé et de transmettre à ce magistrat tous renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs. En s’abstenant de toute intervention, ces magistrats du Parquet général commettaient un manquement sérieux.
 
Quand on pense que la justice a condamné, en 2015, Monseigneur Léonard pour être resté passif, alors qu’il était archevêque de l’archidiocèse de Malines-Bruxelles, quand un fait de pédophilie lui avait été dénoncé. La Cour avait considéré que Monseigneur Léonard avait non seulement sous-estimé la gravité des faits mais qu’il n’avait pris aucune sanction d’écartement à l’égard de l’abuseur. Tout comme la paire Van Audenhove-Morlet qui n’a pris aucune mesure d’écartement à l’égard du confectionneur de faux.

Qui plus est, le 23 décembre suivant, le bâtonnier en question revoyait M. Morlet en fin de matinée et lui rappelait la nature de l’entretien du 6 décembre. Morlet lui a alors dit qu’il s’en rappelait mais ajouta, contrairement à ce que sa fonction lui impliquait de faire, qu’il ne voulait pas s’en occuper et qu’il devait s’adresser, à cet égard, au Procureur général Van Oudenhove. Ce que le bâtonnier fit le 24 décembre à 9h30. Van Oudenhove l’écouta avec aménité et le remercia d’être venu. Et Van Oudenhove ne fit rien, cela en contradiction flagrante avec l’article 29 précité, agissant donc avec déloyauté et galvaudant l’honneur de sa fonction. Quand on glisse sur le toboggan du déshonneur, on semble ne plus pouvoir s’arrêter.
 
En résumé, ces deux magistrats se rendent tous les deux auteurs d’outrage à magistrat ce qui amènera le professeur Bouloc qui s’est penché sur le comportement infractionnel de ces deux personnes à écrire qu’ils sont tous les deux les complices intellectuels de faux. D’autant plus qu’après les entretiens des  6, 23 et 24 décembre, ces hauts magistrats ne faisant  r i e n, ils confortent le Parquet de Bruxelles, dirigé par M. Dejemeppe, à faire des perquisitions, quelques jours plus tard, le 6 janvier 1996, dans la famille Bonvoisin. Cela, comme on le précisa à Maître Spandre, après des hésitations de certains au sein du Parquet qui se rendaient compte qu’il s’agissait d’un complot organisé. On ne faisait pas mieux, à Moscou, durant l’ère soviétique, à l’époque où Vychinski était Procureur général de l’URSS.


Et le Ministère public s’acharne alors contre Benoît de Bonvoisin. D’abord la Chambre du Conseil  puis en appel, la Chambre des Mises en accusation où le Parquet général requiert son renvoi en correctionnelle alléguant, fallacieusement, qu’il avait peut-être sollicité la réalisation de ces faux. Alors que c’était, à sa demande, que son avocat avait alerté le Parquet que des faux circulaient. Quelle mauvaise foi du Procureur général. Rappelons ici que le droit est la plus puissante des écoles de l’imagination, disait Jean Giraudoux.
 
Animé par un (tout nouveau) sentiment de correction morale, Jean-François Godbille alors substitut du Procureur du Roi, au courant du fait qu’il s’agissait d’une machination montée contre Benoît de Bonvoisin ---ce pourquoi il refusa, contrairement à d’autres, de se constituer partie civile contre lui du fait que son nom apparaissait dans certains faux documents--- lui conseilla de demander au tribunal de le faire comparaître pour qu’il y témoigne en ce sens.  Lors d’une audience où l’avocat de Benoît de Bonvoisin fit cette requête au tribunal, le Parquet représenté par Jean-Marie Mawet s’y opposa avec frénésie. Quant au Président, se rendant compte de l’imbroglio dans lequel semblable requête allait plonger le tribunal ---un membre du Parquet allait disqualifier un autre membre du m ê m e Parquet---,  il finit par refuser la comparution de Godbille alors que son devoir était cependant de rechercher la vérité et de la faire éclater.
 
L’attitude précitée du Procureur général choque le bâtonnier qui avait prévenu du complot en cours le Parquet général, en la personne du Procureur général Van Oudenhove alors assisté de son Premier avocat général Morlet.
Aussi, lors de l’audience du 3 septembre 2008, le bâtonnier arrivé bien en avance attend Maître Julien Pierre, l’avocat de Benoît de Bonvoisin. Dès son arrivée, le bâtonnier, qui avait fait demander que le Président de la Chambre veuille bien retarder l’audience, monte avec Maître Pierre chez le nouveau bâtonnier en exercice, Maître Jean Cruyplants. Il lui est précisé l’entrevue que le bâtonnier avait eue avec son prédécesseur, Maître Dal, qui en avait couché par écrit le contenu de la conversation que le bâtonnier avait eu avec Van Oudenhove et Morlet, écrit qui est bien retrouvé dans les archives. Outré, Maître Cruyplants se montre prêt à intervenir à l’audience mais pas ce jour-là,  devant alors précipitamment quitter le Palais de Justice, son épouse devant subir une intervention chirurgicale ce matin là. Aussi, suggère-t-il à Maître Pierre de demander au Président de la Chambre de surseoir à statuer pour permettre au bâtonnier de venir ultérieurement témoigner dans cette affaire. Ce que le Président accepte.
Et lorsque cette affaire reviendra, le bâtonnier Cruyplants se débinera, indiquant qu’il avait été soumis à de fortes pressions pour ne pas venir témoigner et avançant alors que le rapport de son prédécesseur concernant le complot devait être considéré comme soumis au secret professionnel du bâtonnat. Ainsi Cruyplants réalise que son silence abject empêche certes un scandale d’éclater mais qu’il risque de faire condamner un innocent. Quelle lâcheté.
 
Scandalisé, le bâtonnier qui avait prévenu Van Oudenhove et Morlet écrit alors une lettre, datée du 24 septembre 2008, à Benoît de Bonvoisin où il lui résume toute la conversation, dévoilant le complot à son encontre, qu’il avait révélé au Parquet général.
Cette lettre est ultérieurement transmise à Van Oudenhove et Morlet qui continuent dans leur inaction. Mais quel exemple ces deux hauts magistrats donnent-ils à leur entourage qui est au courant de cette situation répréhensible.
Etant donné l’attitude incompatible de Van Oudenhove et de Morlet avec leurs fonctions,  d’ailleurs qualifiée de crime par le code pénal, l’avocat de Benoît de Bonvoisin en avertit, le 28 décembre 2010,  le Ministre de la Justice sur base de l’article 486 du code d’instruction criminelle.




DÉLAI (DÉ)RAISONNABLE  ?
 
Le (faux) rapport de la Sûreté de l’Etat sur Benoît de Bonvoisin date de mai 1981. Après que le Front de la Jeunesse auquel Albert Raes liait Benoît de Bonvoisin eut été condamné sans que ce dernier n’ait été ni inculpé ni même interrogé, Benoît de Bonvoisin déposa en 1983 une plainte contre Raes et son collègue Smets, ainsi qu’une assignation contre l’Etat belge responsable de son entité Sûreté.
 
Est-ce normal qu’en 2017, soit 34 ans plus tard, celle-ci n’ait pas trouvé son épilogue ? Comment expliquer semblable retard ? Par des manœuvres dilatoires répétées de l’Etat destinées à éviter de reconnaître sa responsabilité et à décourager Benoît de Bonvoisin de continuer à s’efforcer de faire transparaître la vérité.
 
Le Parquet de Bruxelles dirigé par M. Poelman savait depuis le début que Benoît de Bonvoisin n’était en aucune façon lié au Front de la Jeunesse, mouvement subversif, et il n’émit aucun démenti malgré le fait que cette connexion Front de la Jeunesse - Benoît de Bonvoisin  fit beaucoup de bruit dans la presse et lia ce dernier, erronément, à des milices privées. En d’autres circonstances, on a vu le Parquet agir avec plus d’éthique et de sens de la responsabilité pour la réputation d’autrui. La note de Raes indiquait également que Benoît de Bonvoisin avait des accointances avec Eckerard Weil, un néo-nazi en fuite qui s’était trouvé en Belgique. Là, suite à l’insistance de feu Maître José Saels, le Parquet lui précisa finalement dans sa lettre du 24 octobre 1983, que dans le dossier en cause Eckerard Weil, il n’est nullement question de votre client, Benoît de Bonvoisin. Bref avec un retard de deux ans et demi !
Intention de nuire ? On ne peut que répéter que dans des cas similaires, le Parquet avait l’habitude d’agir avec un plus grand sens de l’éthique et du respect du citoyen innocent. Car ces manquements du Parquet alimentaient rumeurs et calomnies qui firent leur œuvre dans la durée.
Intention de nuire ? Là où il y eu intention de nuire c’est quand l’arrêt de 1987 fait le reproche que les inculpés – Raes et Smets – n’ont jamais fait parvenir à la presse un démenti au sujet de faits déjà apparemment inexacts, en l’espèce les affaires Front de la Jeunesse et Eckerard Weil. Et notons que le Ministre de la Justice ayant autorité sur la Sûreté n’enjoignit pas Raes et Smets de le faire.
 
La plainte à l’encontre de Raes et Smets fut traitée par la juge d’instruction Lyna. Elle dura quatre ans durant lesquels Mme Lyna ne fit pratiquement rien et en conséquence son instruction fut en 1987 jugée « lacunaire » par la Cour d’appel. Donc quatre ans de perdus. La Cour d’appel renvoya cette plainte à l’instruction en la confiant à un autre juge d’instruction, le juge Collin, requis d’effectuer quelque vingt devoirs complémentaires. En 1992, soit plus de quatre années plus tard, la Cour constata que la très grande majorité des devoirs demandés n’avaient pas été effectués et cette Cour avec le même président, M. Jans, que celle qui avait requis ces devoirs, passa outre à leur non-exécution. Aberrant, alors que l’arrêt de 1987 précisait : Dit y avoir lieu dans les meilleurs délais à l’exécution des devoirs complémentaires suivants : …  Autrement dit, les devoirs que la Cour dit en 1987 devoir être effectués dans les meilleurs délais, la même Cour avec le même président vient dire, en 1992, qu’ils -  la très grande majorité -  ne sont pas d’une importance telle que leur examen plus approfondi pourrait contribuer, en l’espèce, à la manifestation de la vérité ! Quelle hypocrisie, quelle déloyauté de ces magistrats par rapport à leur fonction qui consiste à rechercher la vérité. Car n’était-il pas incontestable qu’il était nécessaire, comme c’était requis par l’arrêt de 1987, de :
- rechercher de quels éléments disposaient les inculpés Raes et Smets pour rédiger le contenu de la note destinée à la Commission et entendre tous témoins à ce sujet,
- rechercher en quoi le contenu de la note divulguée constitue un amalgame, reconnu déjà partiellement par le ministre responsable de la Sûreté de l’époque, 
- rechercher dans la comptabilité de la Sûreté si des journalistes,
dont Walter De Bock du journal De Morgen qui avait publié le contenu de la fausse note, ont été rémunérés par la Sûreté et à concurrence de combien, et dans l’affirmative si c’était pour publier des articles concernant la partie civile et ou les membres du Cepic,
- rechercher si c’est encore possible qui est l’auteur de la communication de la note incriminée à un journaliste du « Morgen »,
- rechercher s’il y a eu concertation préalable et incitation par la Sûreté de l’Administration de l’inspection spéciale des impôts à faire déclencher des poursuites et ainsi des perquisitions au Cepic et chez ses membres et s’il y a simple coïncidence entre le fait que les perquisitions se seraient effectuées le même jour que la parution dans le « Morgen » de la note de la Sûreté, soit le 19 mai 1981 ? Dans quel but et en vertu de quelles dispositions légales la Sûreté se croit-elle autorisée à consulter les dossiers fiscaux
etc...etc…
 
Et cette Cour, grâce à tous ces nombreux devoirs pertinents intentionnellement non effectués, déclara alors un non-lieu, en 1992, en faveur de Raes et Smets dans un arrêt qui sera qualifié par le professeur Bouloc d’indigne d’un Etat de droit, qui constitue une duperie, la Cour n’ayant pas craint de se déjuger.
 
Ensuite finalement, en mai 2000, après cassation, Benoît de Bonvoisin est acquitté par la Cour d’appel de Mons, mettant fin ainsi aux fausses accusations de la Sûreté. Se poursuit ensuite le complot faux documents à l’encontre de BdB, complot dénoncé par un bâtonnier au Parquet général de Bruxelles (M. Van Oudenhove et M. Morlet) qui s’abstint de le faire cesser, et ce en violation de sa fonction et de la loi. On peut rappeler ici ce que disait Albert Einstein : « Le monde est dangereux à vivre pas tant à cause de ceux qui font le mal, mais à cause de ceux qui regardent et laissent faire ».
 
L’assignation contre l’Etat belge vient devant le tribunal de première instance de Bruxelles et le jugement du 20 avril 2012 condamne l’Etat à une indemnité de 100.000 euros. Au lieu d’en terminer là, refusant toujours de reconnaître sa responsabilité, l’Etat va en appel.
Et l’affaire est inscrite devant la 21ème chambre de la Cour d’appel de Bruxelles.
Fin avril 2016, les avocats de Benoît de Bonvoisin sont avisés que l’affaire sera plaidée le 26 mai qui suit, non devant la 21ème chambre mais bien devant la 18ème F. Pourquoi ce changement inhabituel ? La 18ème F est présidée, pour cette affaire, par Madame Mireille Salmon assistée de deux conseillers, tous les trois n’étant pas attachés à cette cour spécialement constituée ainsi pour statuer sur la responsabilité de l’Etat. Un hasard ? Ou bien cela fait-il penser à une juridiction d’exception spécialement constituée, comme dans les Etats totalitaires quand ceux-ci désirent connaître un verdict prédéterminé par eux ? Les historiens jugeront notamment étant donné ce qui suit : Madame Salmon, comme tout un chacun, est précédée d’une certaine réputation, à savoir qu’elle est sociologiquement, politiquement, d’extrême gauche. Faut-il y voir une connexité avec le fait qu’un haut magistrat de Bruxelles avait déclaré récemment « mon cœur est à gauche, je suis proche du PS et c’est une proximité que j’assume sans problème ». Et le président du Mouvement Réformateur avait rétorqué : « L’impartialité du magistrat, c'est-à-dire sa neutralité, est une exigence fondamentale de la régularité d’un procès. Chaque partie doit avoir la certitude que le juge n’a ni parti pris ni intérêt personnel. Maintenant que ce magistrat affiche publiquement sa proximité avec un parti politique, cette impartialité n’est plus assurée ». Or, c’est ici qu’il faut mentionner qu’une personnalité flamande  –  qui est favorable à la scission de la justice entre le nord et le sud du pays – disait que le différend Raes/Benoît de Bonvoisin était caractérisé par de sérieux dysfonctionnements de la justice  f r a n c o p h o n e   s o c i a l i s t e.
 
Quoiqu’il en soit, la chambre 18 F de la Cour d’appel rend, le 29 septembre 2016, un arrêt qu’une personne familière du Palais de justice qualifia de monstrueux.
Cet arrêt fait donc suite au jugement du tribunal de première instance de Bruxelles condamnant l’Etat, jugement contre lequel l’Etat s’était pourvu en appel. Et à la suite de cela, Benoît de Bonvoisin fit un appel incident. Dans son arrêt, Madame Salmon avance que l’appel incident de Benoît de Bonvoisin est  i r r e c e v a b l e  du fait qu’ayant été victime d’un AVC en 2008, sa capacité à exercer son droit d’ester en justice est mise en question. Par là, Madame Salmon fait fi de l’article 440 alinéa 2 du code judiciaire précisant qu’un avocat est réputé valablement mandaté par son client sans avoir à produire le moindre justificatif. Qui plus est, Madame Salmon n’a pas posé, à cet égard, la moindre question aux avocats présents. Sinon, ceux-ci auraient indiqué qu’ils avaient, séparément, rendu visite à Benoît de Bonvoisin pour s’enquérir s’il désirait défendre son dossier devant la Cour, ce que Benoît de Bonvoisin leur avait intimé de faire. De plus, l’arrêt ordonne que Benoît de Bonvoisin soit à l’avenir représenté par un administrateur provisoire.  Si la présidente Salmon avait soulevé cet aspect des choses durant les débats au tribunal, les avocats lui auraient précisé, indépendamment du contenu de l’article 440  alinéa 2 précité, que Benoît de Bonvoisin était juridiquement représenté par un proche suivant les termes d’un acte notarié, qu’un autre acte notarié confiait à un membre de sa famille le fait de le représenter et de le défendre en justice, et qu’un juge de paix  -  celui-ci est le seul qualifié pour décider si un administrateur provisoire doit être désigné -  avait déjà antérieurement déclaré que Benoît de Bonvoisin ne devait pas être mis sous administration provisoire.
C’est donc un arrêt monstrueux visant à empêcher Benoît de Bonvoisin de rétablir sa réputation et de se défendre en justice du fait d’un service fautif de l’Etat, à savoir la Sûreté de l’Etat à l’époque où Albert Raes en était le chef.
Et contre cet arrêt, un pourvoi en cassation a maintenant été introduit. Ce qui précède indique que le délai  d é r a i s o n n a b l e  va continuer à s’allonger, ce qui est le but recherché par l’Etat depuis le début.

La situation prédécrite amène à réfléchir à la notion d’impartialité du magistrat. Feu Roger Lallemand, à l’époque où il était Président de la Commission de la Justice du Sénat, disait, non écrivait : L’INDEPENDANCE est un mythe. Mais elle est un des mythes constitutifs de la Justice et de la démocratie. Un mythe étant, d’après le Larousse, une construction de l’esprit qui ne repose pas sur un fond de réalité.
Et Roger Lallemand ajoutait : La revendication de l’indépendance est liée à celle de la séparation des pouvoirs : le juge est indépendant parce que le corps des magistrats l’est par rapport au pouvoir exécutif. Mais cette affirmation, formulée in abstracto, comme principe et comme réalité ne manque pas d’audace. Mais ce juge qui prétend ne se soumettre ni à ses supérieurs, ni à ses origines, ni à ses opinions suscite l’inquiétude, Roger Lallemand considérant que le juge ne peut prétendre échapper à tous les présupposés du pouvoir, à toutes les pesanteurs de son histoire personnelle. Et il ajoute qu’il est plus insensé pour un juge de revendiquer son indépendance qu’à une molécule d’affirmer sa liberté.
 
La notion d’indépendance ne concerne pas le Ministère public qui dépend du Ministre de la Justice, membre de l’exécutif, quoique la Cour européenne des droits de l’homme se soit déjà préoccupée de l’impartialité du Ministère public en Belgique, en raison parfois de la proximité de la Cour et du Parquet.
La notion d’indépendance concerne la Magistrature assise pour laquelle il est difficile de se persuader que les réflexions de Roger Lallemand soient un peu exagérées certes quand le magistrat doit juger un cas qui heurte ses opinions, ses convictions profondes résultant de son passé, de son histoire. Cela dans des dossiers sensibles influencés par ce qu’on appelle la Raison d’Etat où alors il n’y a plus de raison du tout, ce qui semble bien avoir été le cas dans la situation présente.

Les avocats savent que les tribunaux de première instance ont toute liberté pour décider de leur verdict. Mais quand l’Etat est impliqué dans une procédure embarrassante, comme c’est le cas ici, nombre d’avocats savent --- pas le grand public ---  que des « influences extérieures » peuvent alors se manifester au niveau des Cours d’appel et au niveau de la Cour de cassation.


Mais il y a plus à critiquer dans cet arrêt.
Sans se pencher sur le préjudice sérieux encaissé par Benoît de Bonvoisin et sa famille du fait de la (fausse) note Sûreté, Madame Salmon rappelle dans son arrêt que le (faux) document transmis par Raes à son Ministre de tutelle, Philippe Moureaux, Ministre de la justice, fut ensuite par ce dernier transmis à la Commission parlementaire présidée par M. Wijninckx, Commission portant sur le maintien de l’ordre et les milices privées. Et que ce document, du fait d’une fuite, s’est par après retrouvé au journal De Morgen qui le publia le 19 mai 1981. Mais l’arrêt soulève que le journal l’obtint par des voies qui demeurent inconnues à ce jour. En quelque sorte comme pour exonérer l’Etat de sa responsabilité, tout comme la Ministre de la justice Annemie Turtelboom l'avait indiqué en 2013 suite à une interpellation parlementaire. Etant donné qu’on ne sait pas qui a transmis le document au journal De Morgen, l’Etat ne peut en être rendu responsable soulignent les avocats de l’Etat. Quelle mauvaise foi : il n’y aurait eu aucun problème si le document qui a fait l’objet d’une fuite avait eu un contenu exact. Mais ce contenu est  f a u x  sur les trois accusations à l’encontre de Benoît de Bonvoisin. D’où la responsabilité de l’Etat, dont un des services écrit des assertions intentionnellement inexactes.
 
Ne sait-on vraiment pas qui a transmis le (faux) document au journal De Morgen ou bien n’a-t-on pas voulu le savoir, le rechercher ?


1.   Quelle est l’origine de la fausse note Sûreté ? La Sûreté ne s’est intéressée à Benoît de Bonvoisin qu’à l’époque où Moureaux devient Ministre de la Justice, ce ministère étant celui qui a la tutelle sur la Sûreté de l’Etat. Les notes sur Benoît de Bonvoisin au sein de la Sûreté, Philippe Moureaux demanda à Raes de lui en faire une synthèse. Et Raes demanda, exigea que Jacques De Vlieghere, administrateur-directeur général adjoint, transforme dans ces notes le mode conditionnel – qui exprime un doute, une hypothèse – en indicatif présent – qui exprime une réalité, une affirmation. Quand on pense que l’arrêt de la Cour d’Appel de Bruxelles – présidée par M. Jans dont les deux conseillers étaient M. Mahieu et M. Goldberg – du 12 mars 1992 accorda un non-lieu à Raes car il n’y avait pas dans son chef l’existence d’une intention spécifique de nuire à la partie civile, à savoir Benoît de Bonvoisin. Mais quelle justice avions nous à cette époque, disent aujourd’hui certains magistrats au courant de cette contradiction. 
Cette note de synthèse, Philippe Moureaux la communiqua aux 22 sénateurs composant la Commission d’enquête Wijninckx de même qu’au conseil des ministres. Vu le nombre de personnes informées, inévitablement la presse en a reçu copie et l’a publiée à partir du 19 mai 1981, écrit Marcel Trousse, Président émérite du tribunal de première instance de Liège, dans une chronique publiée dans le Journal des Procès du vendredi 30 septembre 1994.

 2.   A la Chambre, Philippe Moureaux déclara, en juin 1981, qu’il avait transmis la note de synthèse de Raes sans y avoir apporté aucune addition et qu’il n’en avait altéré nullement le contenu ni d’ailleurs le titre. Le Comité supérieur de Contrôle constatera dans un procès-verbal du 30 juillet 1990 que c’était faux et que des modifications avaient été apportées pour polariser l’attention sur Benoît de Bonvoisin. Et l’arrêt du 12 mars 1992 de la Cour d’appel de Bruxelles souligne d’ailleurs que, néanmoins, si la note attribuable au Cabinet est nettement plus orientée sur la partie civile que les notes émanant de la Sûreté : ce qui montre la perfidie de Moureaux. L’on ne souligne pas assez que le Ministre ment, et Monsieur Raes avec lui, tous deux sachant dès la rédaction de la note de synthèse que celle-ci est fausse, écrit feu Maître José Saels dans ses conclusions.

3.   Interrogé à la Chambre en juillet 1981, Philippe Moureaux déclara : Deux intervenants m’ont demandé si j’avais déposé une plainte ou fait organiser une enquête sur les fuites. En ce qui me concerne, comme Ministre de la Justice, je ne demanderai jamais pareille enquête, pareille poursuite, parce que, ainsi que je l’ai déclaré en d’autres occasions, à partir du moment où l’on s’engage dans cette voie, on touche très rapidement à la liberté de la presse.
Là, Philippe Moureaux a tout faux : cela aurait été une atteinte à la liberté de la presse si on avait perquisitionné au siège du journal De Morgen ou au domicile du journaliste Walter De Bock sous la signature duquel la (fausse) note avait été publiée. Alors que Philippe Moureaux dit à la Chambre qu’il y a un grave problème général de fuites provenant d’organes très importants qui devraient être discrets de l’appareil de l’Etat, malgré cela, il n’a pris aucune mesure particulière eu égard à une note des plus sensibles. N’est-ce pas une faute de sa part de ne pas diligenter une enquête interne à son Cabinet pour connaître l’origine de la fuite ? En quoi une enquête interne sur le fonctionnement d’un service public et le comportement de ses fonctionnaires peut-il porter atteinte à la liberté de la presse ?
Mais Philippe Moureaux ne voulait pas d’enquête au sein de son cabinet.

4.    Le 30 novembre 1990, Michel Dufrane, ancien inspecteur à la Sûreté de l’Etat déclare que Joseph Kausse, ancien membre de la Sûreté, lui a dit qu’il était certain à 90% que c’est Serge Dumont, alors attaché de cabinet du Ministre de la Justice Moureau, qui l’a transmise (la note) à Walter De Bock afin qu’il réalise son article et débute la campagne contre de Bonvoisin. L’attitude de Serge Dumont dans ses articles m’a cependant paru assez particulière à une certaine époque. En effet, durant plusieurs mois Serge Dumont a publié des articles virulents contre la Sûreté et plus spécialement contre messieurs Raes et Smets. Brusquement il y eut cependant un revirement et pendant un certain temps Serge Dumont s’est abstenu de publier des articles contre la Sûreté pour par après en publier d’autres qui étaient manifestement pro-Sûreté. Ce changement d’attitude m’a toujours laissé penser que Dumont avait été « acheté » par la Sûreté sans que j’en aie cependant une preuve matérielle. J’ai eu la même réflexion au sujet de Walter De Bock. Et Dufrane ajoute : Il est certain qu’au niveau de la Sûreté de l’Etat certains journalistes sont payés en qualité d’agent d’influence. Cette relation avec ces journalistes permet donc à la Sûreté de diffuser dans le public des informations allant dans le sens de sa politique. Certains de ces journalistes sont répertoriés étant donné les sommes versées à ces personnes.

5.    Le 15 janvier 1991, Joseph Kausse déclare lors de son audition par le Comité Supérieur de Contrôle qu’en ce qui concerne la note Sûreté litigieuse, il situe la fuite au Cabinet du Ministre Moureaux. Et cela à l’intermédiaire de Serge Dumont qui, à l’époque, était attaché au Cabinet en question. Il allait d’ailleurs devenir le journaliste le plus virulent à l’encontre de Benoît de Bonvoisin dans des articles signés par lui dans Le Vif Express. Et Kausse d’ajouter : je sais que, à l’époque où je travaillais encore à la Sûreté, celle-ci a organisé des réunions secrètes en vue d’influencer les journalistes, et de défendre les thèses officielles de la Sûreté. 

6.   La note Sûreté litigieuse se retrouve à la télévision française, l’ORTF, prédécesseur de  TF1. Mais elle s’y retrouve avec la copie de l’o r i g i n a l de la lettre d’expédition de Moureaux au Président de la Commission, M. Wijninckx. Surprenant… Or, la publication d’un document confidentiel constitue un recel dans le chef de celui qui en fait usage. Interrogé à cet égard par feu Maître José Saels, Philippe Moureaux ne répond pas à la question qui lui est posée, tourne autour du pot et ajoute dans sa réponse : je m’étonne de l’importance que vous semblez attacher à une banale lettre de transmission de ce rapport. Il semblait oublier que cette lettre était de nature confidentielle.  Réinterrogé ensuite par Maître Saels, Philippe Moureaux agacé, refuse de répondre à la question posée et termine de façon menaçante en écrivant qu’il se réserve la possibilité de soumettre cette question au Bâtonnier.

7.   Alors que Philippe Moureaux en était le Président, la Communauté Française finance   -   est ce vraiment dans ses attributions d’utiliser ainsi l’argent public ? -  un film, « L’orchestre noir », liant Benoît de Bonvoisin à des milices privées d’extrême droite, ce que le pouvoir judiciaire ne retint jamais à son encontre. Et ce film est conçu avec la collaboration de qui ? de Serge Moureaux, député, frère de Philippe Moureaux, et de George-Henri Beauthier, avocat de Raes.  . Un tel recours au cinéma pour accabler un individu sous le coup de poursuites judiciaires ne s’est rencontré que dans l’Allemagne nazie. Il est piquant de voir que le ministre Philippe Moureaux, une des figures emblématiques du parti socialiste belge, utilise des méthodes du parti national-socialiste, écrit feu Maître Mario Spandre dans son livre L’Etat coupable, Editions Jourdan le Clercq, 2005.

8.   Dans ce même livre, Maître Spandre écrit : Pourquoi ledit rapport de la Sûreté a-t-il été malicieusement mis à la portée de la presse par une fuite du cabinet de la Justice, Philippe Moureaux ?

Chacun des éléments prédécrits a une certaine importance, mais ces indices troubles pris dans leur ensemble sont accablants pour Philippe Moureaux. Surtout quand on sait que Philippe Moureaux envoya une lettre de Raes à la Cour Européenne des Droits de l’Homme à Strasbourg, lettre concernant sa (fausse) note où Raes le remerciait notamment de l’avoir couvert au Parlement. Comme l’écrit dans le livre précité, L’Etat coupable, feu Maître Mario Spandre : c’est alors que le pire est apparu : Philippe Moureaux, de sa propre main, avait écrit que cette lettre ne pouvait être utilisée devant les juridictions belges mais uniquement dans la procédure à Strasbourg.  Invraisemblable ! Moureaux, Ministre de la Justice ou Ministre de l’Injustice ?
Philippe Moureaux fut donc au centre de ce complot à l’encontre de Benoît de Bonvoisin.

Lors d’audiences, les avocats de Benoît de Bonvoisin ont plusieurs fois demandé que Philippe Moureaux soit appelé comme témoin. Le Président du tribunal le déclina toujours, au motif que cela n’était pas nécessaire à la manifestation de la vérité ! Indépendance de la Justice ou soumission au pouvoir politique ? On peut rappeler ici la réflexion d’André Malraux « je ne sais pas ce qu’est la vérité, mais je sais ce qu’est le mensonge ».

Quand on se rappelle que la loi Moureaux condamne toute discrimination, de quelle discrimination Benoît de Bonvoisin n’a-t-il pas été la victime par Moureaux lui-même ? Moureaux, lors de l’émission dominicale sur RTL le dimanche 21 février 2016, disait : j’ai une conception de la politique où on est au service des gens. Ceci renvoie à cette statue de Janus sur le forum à Rome où Janus est représenté avec deux visages, tout différents.

Interrogée au Sénat le 23 janvier 2013 sur le fait que des journaux avaient mentionné que l’Etat avait été condamné par le tribunal de première instance de Bruxelles à verser 100.000 euros de dommages et intérêts à Benoît de Bonvoisin, la Ministre de la Justice, Madame Turtelboom – qui dans l’affaire des faux documents avait adopté une attitude tout à fait contraire à celle qu’on attend d’un ministre de la Justice – répondit que l’Etat faisait appel du jugement et qu’en ce qui concerne la fuite vers le journal De Morgen, on n’a jamais pu établir avec certitude qui était à l’origine de la fuite. 
Elle aurait mieux fait de dire qu’on n’avait jamais voulu découvrir qui était à l’origine de la fuite d’un document faux émanant d’un service de l’Etat.




COMMENT EN EST-ON ARRIVE LA, DANS UN ETAT SOI-DISANT DE DROIT ?
 

Dans les années d’après-guerre, l’électorat favorisa des opinions orientées à gauche, ce qui explique le développement des partis socialistes en Europe. Avec le temps, ils évoluèrent, certains de façon pragmatique d’autres de façon dogmatique. Ceci allait entraîner progressivement une réaction.
En Belgique, le monde politique était dans ces années-là dominé par le Parti social chrétien (PSC) et le Parti socialiste (PS), le Parti libéral ne jouant qu’un rôle secondaire, et ce jusqu’au début des années 60 quand, sous la présidence d’Omer Vanaudenhove, il renonça à certaines opinions anticléricales pour développer une politique d’ouverture. Ceci se traduisit d’ailleurs par un changement de nom, le Parti de la Liberté et du Progrès qui allait devenir ultérieurement Le Mouvement Réformateur (MR).
 
Dans les années 50, le PSC était alors le principal parti politique dont l’électorat le soutenait d’une part pour des raisons philosophiques et était par ailleurs constitué d’une aile gauchiste en progression constante, la Démocratie chrétienne. Elle était proche de la Confédération des syndicats chrétiens qui bien après les années de privation qui caractérisèrent la période d’après-guerre, prônait lors de son congrès général de décembre 1975 la constitution d’un cadastre des fortunes et des droits de succession allant jusqu’à 100%, de façon à assurer que la propriété immobilière soit progressivement transférée au profit de la communauté.
 
Le côté de plus en plus dominant de la Démocratie chrétienne au sein du PSC mena à l’incitation de Paul Vanden Boeynants à la création d’une aile centriste au sein du parti, le Cepic, Centre politique des indépendants et cadres chrétiens. A l’instigation de Benoît de Bonvoisin et de bien d’autres, il se développa d’abord à Bruxelles, puis en Wallonie de même qu’en Flandre. Le succès du Cepic inquiéta de plus en plus les mouvements de gauche du pays, notamment Alfred Califice, vice-président du Mouvement ouvrier chrétien depuis 1964 et figure de proue de la Démocratie chrétienne, de même que nombre de socialistes, notamment Philippe Moureaux figure marquante du PS.
 
Comment lutter contre une aile centriste en progression au sein d’un parti bien établi ? Pas en critiquant ses statuts ni son programme, équilibrés –  ceux-ci seront consultables sur internet -  qui enthousiasmaient plus d’un. Comment lutter ? En utilisant ce que les Anglo-saxons appellent la technique du « big lie » : mentir d’une façon tellement incroyable que personne ne pourrait penser qu’on puisse mentir à ce point-là. Et c’est bien ce qui fut élaboré à l’encontre de Benoît de Bonvoisin, trésorier et personnalité influente du Cepic, de façon à  le noircir lui et d’autres personnalités du mouvement pour ternir son image. Par après, on s’attaquerait également à Paul Vanden Boeynants : il fut inculpé et condamné pour fraude fiscale. Mais plus d’un aujourd’hui se demande si ce chef d’accusation n’était pas destiné à s’attaquer à Van den Boeynants en tant que Président du Cepic.
C’est ainsi que fut concoctée par Albert Raes, administrateur-directeur général de la Sûreté de l’Etat une fausse note sur Benoît de Bonvoisin. Quand cela ? Juste après que Philippe Moureaux devint Ministre de la Justice et des Réformes institutionnelles dans le gouvernement Martens IV en octobre 1980, le Ministre de la Justice étant le Ministre de tutelle de la Sûreté de l’Etat. Car avant cela la Sûreté n’avait pas de réel dossier sur Benoît de Bonvoisin. Cette fausse note élaborée au sein de la Sûreté mentionnait différentes hypothèses le concernant. Elles avaient été mises au mode conditionnel qui fut ensuite remplacé par l’indicatif présent -  en vue de transformer une supposition en affirmation -, cela sur ordre d’Albert Raes à son numéro 2, Jacques De Vlieghere qui rejoignit la Sûreté en 1979 suite à la recommandation d’André Cools. Et cette fausse note fut transmise par Philippe Moureaux à la Commission d’enquête parlementaire Wijninckx sans qu’il n’en change un iota, affirma-t-il au Parlement en juin 1981. Alors qu’il apparut ultérieurement au cours de l’instruction judiciaire qu’il l’avait quelque peu transformée pour polariser l’attention sur Benoît de Bonvoisin.
 
La Commission Wijninckx était une commission sénatoriale, présidée par Jos Wijninckx, sénateur socialiste. Elle fut instituée le 19 juin 1980 et avait pour compétence les problèmes posés par le maintien de l’ordre et les milices privées. Albert Raes, Administrateur-Directeur Général de la Sûreté de l’Etat y est auditionné les 19 février et 22 avril 1981, à huis-clos. On sait que Raes y parla notamment du Cepic et cela donne à penser que c’était destiné à attribuer au Cepic une connotation subversive. On en saura beaucoup plus lorsque le 19 mai 1981, le courrier mentionné confidentiel de Philippe Moureaux à la Commission, auquel était joint la note de synthèse de Raes, se retrouvera dans le journal De Morgen.
 
Le 10 juin 1981, soit un mois après la communication de la (fausse) note Raes par Moureaux à la Commission, il est mis fin à la commission Wijninckx bien que comme on peut le lire sur internet à propos de la biographie de Jos Wijninckx, cette commission n’ait pas enregistré de résultats concrets.  Alors pourquoi y mettre fin subitement ? Parce que les accusations à l’encontre de différentes personnes comme suite à la (fausse) note de Raes risquaient de poser beaucoup de problèmes.  En effet dans les débats parlementaires, la Chambre réagit avec circonspection : de nombreux reproches y sont adressés à Philippe Moureaux qui se trouve dans une situation précaire car, comme l’écrit feu Maître José Saels « on ne souligne pas assez que le Ministre ment, et Monsieur Raes avec lui, tous deux sachant dès la rédaction de la note de synthèse que celle ci est fausse ». A la Chambre est signalée… l’attitude partisane du Ministre de la Justice, visant à influencer et à politiser les instructions, … les commentaires et interventions du Ministre ont laissé planer le doute sur la réalité de la séparation des pouvoirs, … l’attitude du Ministre laisse croire en tout état de cause que la Justice peut être manipulée pour des raisons politiques …
Philippe Moureaux tente de se défendre : au sujet de la Sûreté elle-même, il rappelle quelques évidences. « La Sûreté est un service de renseignements et de sécurité, dont la mission consiste à informer le gouvernement sur tout évènement mettant en péril tant la sécurité intérieure qu’extérieure de l’Etat. Elle n’a pas les pouvoirs de police judiciaire : perquisition, saisie, arrestation. Lorsqu’elle relève des indices d’infraction au cours de ses recherches, elle transmet ces renseignements aux autorités judiciaires compétentes ».
 
En fait, Raes savait que les affirmations de sa note étaient fausses sinon il en aurait informé le pouvoir judiciaire comme il se devait de le faire. De plus, en quoi mettaient en péril - pour reprendre les réflexions de Philippe Moureaux -  tant la sécurité intérieure qu’extérieure de l’Etat, les nombreuses personnes citées dans la note fallacieuse de Raes : Benoît de Bonvoisin, Jean Breydel, Paul Van Kerkhoven, Bernard Mercier, Jo Gérard etc. Sans oublier le Cepic qui y est cité, dont le Bureau National était composé d’une vingtaine de personnalités politiques qui y étaient ainsi atteintes dans leur dignité.
Alors qu’il est rappelé à la Chambre que le Ministre (Philippe Moureaux) a dû admettre que la note pouvait contenir des erreurs, le député Grafé demande enfin au Ministre s’il n’estime pas infiniment inquiétant et dangereux qu’un organe chargé de la Sûreté de l’Etat puisse mettre dans une note des inexactitudes ou des faits incontrôlés, non sous forme d’interrogations, mais sous forme d’affirmations.
Là où ressort la responsabilité incontestable de Philippe Moureaux, c’est lors de l’interpellation d’un autre député : s’il dit qu’il est normal que la Sûreté soit à l’écoute permanente de tout ce qui se dit ou se fait, qu’il est normal qu’elle relève des informations qui la concerne, encore faut-il qu’elle se fasse un devoir de vérifier ses informations, de les contrôler et ne pas conclure sans une enquête sérieuse. Il est également s c a n d a l e u x que de tels ragots soient authentifiés par un grand service de l’Etat et par le Ministre de la Justice lui-même dès lors que celui-ci, sans procéder à plus de contrôle, se borne à les transmettre en manière telle qu’actuellement des personnes citées sont considérées comme des présumés coupables, sans qu’ils aient le moyen de défendre leur honneur.
Certes, il est mentionné à la Chambre qu’il serait scandaleux de ne pas réhabiliter ceux qui auront été innocentés après avoir été cités dans la note, …que les dommages créés doivent être réparés et les responsables à tous les niveaux doivent être sanctionnés.
Cela ne sera jamais fait. C’eut été un exercice mettant en évidence que dans un Etat démocratique  pouvait se profiler  - pour des raisons bassement politiques visant à salir et à éliminer une formation politique -  un complot où se retrouvait le Ministre de la Justice et son vassal en charge de la Sûreté de l’Etat, situation à laquelle quelques membres du pouvoir judiciaire allaient ensuite s’associer.
 
C’est la raison pour laquelle   - la note avait été publiée dans le journal socialiste De Morgen le 19 mai 1981 -   la Commission Wijninckx fut clôturée dès le 10 juin 1981, bien qu’en sa séance du 27 mai, il y fut abondamment question de permette aux personnes en cause d’être entendues, de vérifier la fiabilité des informations recueillies par les services de la Sûreté et éclairer la façon dont ces renseignements sont utilisés par les autorités auxquelles ils sont transmis.  Pourquoi la Commission n’a-t elle pas décidé de convoquer ces personnes  et de les entendre ? Effrayée probablement du fait que la réputation de l’Etat pouvait être abimée par les mensonges d’un de ses services, la Sûreté de l’Etat,  et par les dommages auxquels l’Etat s’exposait ?
 
A ce stade-ci, le lecteur aperçoit maintenant la véritable raison pour laquelle la Commission mit subitement fin à ses travaux.   
 
Etant donné le ramdam causé par la divulgation de la note de Raes dans le journal De Morgen, il va de soi que le pouvoir judiciaire se devait de réagir. C’est ainsi qu’à la demande du Procureur Général, Philippe Moureaux lui transmit la (fausse) note en question. Le Procureur Général dont le chef hiérarchique était Philippe Moureaux,  lui fit savoir qu’une information venait d’être ouverte. Ainsi était mis alors  en place un stratagème pour tenter que la vérité ne soit pas mise en lumière.
En effet, le Parquet se rendit rapidement compte que cette note comportait de fausses affirmations concernant Benoît de Bonvoisin qui, ayant été sérieusement étrillé par la (fausse) note Raes, souhaitait voir sa réputation entachée rétablie. Le parquet s’employa alors à  l’en empêcher par des manœuvres dilatoires et infractionnelles répétées comme on va le résumer maintenant. On se rappellera la réflexion de George Orwell ---  auteur du célèbre roman 1984 considéré comme un roman d’anticipation où le principal personnage Big Brother est devenue une figure métaphorique d’un régime policier et totalitaire visant à la réduction des libertés --- : « le langage politique a pour but de faire paraître vrai le mensonge et respectable le meurtre », dans le cas présent le meurtre politique.
 
1.      Le 1er juin 1981, Benoît de Bonvoisin écrivit une lettre à Philippe Moureaux en lui précisant «  tous les éléments de votre rapport à mon sujet étant faux », il lui demandait « comment vous envisagez la réparation qui m’est due pour le tort qui m’a été fait ». Moureaux à propos duquel Benoît de Bonvoisin ne savait pas à cette époque là qu’il faisait partie du complot, ne lui répondit pas. Pire, Chef du Parquet, il allait donner le ton à celui-ci pour qu’à l’avenir la vérité ne soit pas révélée, sur la fausseté du contenu de la note.
 
2.    Benoît de Bonvoisin déposa une plainte contre le journal De Morgen qui avait publié la fausse note de Raes. Celle-ci fut classée sans suite comme suite à la demande du Parquet dirigé alors par M. Poelman. En bref, ceci signifie un refus d’investiguer l’origine de cette publication erronée. Intention de nuire et/ou sujétion au chef du Parquet ? Cette réflexion apparait-elle exagérée ? Le lecteur jugera à la lumière de ceci : la fausse note de Raes avait été envoyée à différents media à Paris par des journalistes belges stipendiés par la Sûreté   -   dont la liste saisie lors d’une perquisition à la Sûreté fut ensuite subtilisée par le substitut du procureur du Roi, Jean-François Godbille. Des journaux français ayant relaté l’affaire, Benoît de Bonvoisin déposa plainte contre ceux-ci. Et à Paris, le Parquet ne classa pas l’affaire sans suite ce qui, après qu’une instruction eut été diligentée, conduisit à des condamnations d’une demi-douzaine d’entre eux pour lesquelles Benoît de Bonvoisin reçu quelques dommages. Comment expliquer cette différence entre le Parquet de Paris et celui de Bruxelles ?
 
3.  La Commission Wijninckx  ayant examiné l’aspect milices privées, certains journalistes stipendiés par la Sûreté lièrent Benoît de Bonvoisin au problème milices privées. Le Parquet savait qu’il n’en était rien mais s’abstint de le préciser au public. On a vu le Parquet, dans d’autres cas, plus soucieux de protéger la réputation d’un citoyen, Parquet dont la mission est la sauvegarde des intérêts généraux de la société !
Un dossier est alors ouvert dans le cadre d’une infraction à la loi du 29 juillet 1934 sur les milices privées à propos duquel Benoît de Bonvoisin ne sera  j a m a i s  interrogé. Après avoir vainement demandé au Parquet dirigé par M. Poelman quel sort avait été réservé à ce dossier, Maître José Saels s’adresse alors le 31 mai 1983 au Procureur général, M. Van Honsté qui lui répond que cette information qui porte le numéro 35.98.3031/81 des Notices du Parquet n’est pas terminée.
Rappel du Conseil de Benoît de Bonvoisin en date du 25 novembre 1985. Et le 13 décembre 1985, le Parquet général se borne à un simple accusé de réception. Enfin, le 7 mars 1986, soit cinq ans après la divulgation de la fausse note Raes, M. Van Honsté indique que l’affaire est classée sans suite, sans que Benoît de Bonvoisin n’ait jamais été interrogé,  ajoutant   -   mais quelle hypocrisie   -   « Vous ferez sans doute connaître à Monsieur le Procureur du Roi les motifs qui pourraient justifier que l’autorisation vous soit accordée de prendre connaissance de ce dossier ». Or, suivant l’usage constant, toute personne citée dans un dossier classé sans suite peut en obtenir photocopie s’il justifie son intérêt. Du fait de la persévérance de Maître Saels, le 24 avril 1987, le Parquet l’autorise finalement de prendre connaissance du dossier, sans cependant l’autoriser à en lever une photocopie !


4.  La note de Raes précisait que Benoît de Bonvoisin avait voulu accueillir chez lui Eckerard Weil, un terroriste néo-nazi berlinois en fuite. Aussi une information avait été ouverte à cet égard par le Parquet. Finalement, du fait de la persévérance de Maître Saels, le Procureur du Roi Poelman indiqua dans sa lettre du 24 octobre 1983 que dans le dossier noticé 36.11.106/80 en cause Eckerard Weil, il n’est nullement question de votre client Benoît de Bonvoisin.  Il n’y est fait ni référence, ni allusion. Et par sa lettre du 13 décembre 1985, le Procureur général Van Honsté précisa, lui, que cette information avait été classée sans suite et qu’il n’était nullement question de votre client dans ce dossier.
Comment juger de l’attitude du Parquet et du Parquet Général qui pendant plusieurs années laissent diffamer Benoît de Bonvoisin sur des questions qu’ils savent fausses ? Intention de  nuire et/ou sujétion au pouvoir politique ?
 
5.  La note de Raes liait Benoît de Bonvoisin au financement du Front de la Jeunesse dont des membres dirigeants sont condamnés par la justice sans que Benoît de Bonvoisin ne soit impliqué dans ce dossier, n’ayant même jamais été interrogé. Voilà donc un fait avancé par Raes qui est démenti formellement par le pouvoir judiciaire. Aussi Benoît de Bonvoisin dépose t-il alors une plainte avec constitution de partie civile à l’encontre de Raes, Smets, son adjoint, et X. Mécontentement du pouvoir politique. Ce qui conduit à l’inculpation de Benoît de Bonvoisin dans le cadre de l’affaire dite des horodateurs à Liège. Comment cela se produit-il ? Comme indiqué précédemment, lors d’une visite de Maître José Saels au substitut Jean-François Godbille, leur conversation est interrompue par un coup de téléphone. Godbille y reçoit instruction d’inculper Benoît de Bonvoisin dans cette affaire des horodateurs. La réaction de Godbille est négative disant que Benoît de Bonvoisin n’a rien avoir dans cette affaire. Son interlocuteur insiste et lui donne l’ordre d’inculpation. Et Benoît de Bonvoisin fut inculpé. L’affaire des horodateurs vient devant le tribunal correctionnel de Liège où siégeaient trois juges. Et Benoît de Bonvoisin fut le seul acquitté parmi la douzaine de personnes poursuivies. A noter qu’à la fin des débats, un des trois juges interpella le Ministère public s’étonnant des poursuites à son encontre.
 
6.  Acquitté dans l’affaire des horodateurs, l’assignation contre l’Etat du fait de la fausse note de Raes pouvait bientôt revenir à l’avant plan. Il faut rappeler ici que lorsqu’une affaire comporte un volet pénal et un volet civil, l’aspect pénal doit être jugé avant l’aspect civil. C’est ce que précise l’adage «  le pénal tient le civil en état ». Aussi n’y avait-il pas une autre affaire pénale à l’encontre de Benoît de Bonvoisin pour l’empêcher d’actionner son assignation contre l’Etat du fait de sa responsabilité pour une faute de son département Sûreté de l’Etat? Oui, l’affaire PDG. La (fausse) note de Raes liait Benoît de Bonvoisin à la société PDG pour, soi disant, des délits à caractère financier en faveur de mouvements d’extrême droite. En fait, il y avait eu une perquisition dans les locaux du Cepic, à la société PDG et chez Benoît de Bonvoisin en 1981. A quelle date précise ? Le  m ê m e  jour que la parution de la note Raes, transmise par Philippe Moureaux à la Commission Wijninckx, dans le journal De Morgen, 19 mai 1981 ! Coïncidence ou présomption de complot ? Lors de cette perquisition, rue Belliard, le Ministre Philippe Moureaux était-il présent ? Oui, indirectement. Philippe Moureaux se trouvait dans sa voiture arrêtée dans une rue perpendiculaire à la rue Belliard, se cachant le visage derrière son journal déployé. Et on venait régulièrement lui faire rapport ! A-t-on jamais vu en Belgique le Ministre de la Justice être présent lors d’une perquisition ? Mais qui d’autre, extérieur à la justice, était au courant de la date et de l’heure de la perquisition ? André Califice, sénateur socialiste, Vice-président du Mouvement Ouvrier Chrétien et figure centrale de la Démocratie Chrétienne.

Or, de cette société PDG, Benoît de Bonvoisin n’était ni actionnaire, ni membre du conseil d’administration, ni de la direction (sic). Et cette affaire était prescrite. Etant donné le harcèlement du pouvoir judiciaire à l’encontre de Benoît de Bonvoisin, s’il y avait eu quelque chose à lui reprocher, le Parquet n’aurait pas laissé cette affaire atteindre la prescription. Le pénal tenant le civil en état, comment donc inculper Benoît de Bonvoisin dans une autre affaire ?
 
7.  La note de Raes mentionnait également la société Cidep pour d’éventuels délits soi-disant à caractère financier.  De cette société, Benoît de Bonvoisin n’était également ni actionnaire, ni membre du conseil d’administration, ni de la direction (sic). Et Benoît de Bonvoisin est inculpé dans l’affaire Cidep en avril 1990.  Pourquoi ? Pour faire relever l’affaire PDG de la prescription écrit (stupidement) le gouvernement belge à Strasbourg sous la signature de Claude Debrulle. Finalement, en mai 2000, après diverses tribulations,  Benoît de Bonvoisin sera acquitté par la Cour d’appel de Mons. Dans son arrêt, la Cour indique de multiples fois que cette prévention du Parquet n’est pas établie…..qu’aucune déduction ne peut être tirée des pièces vantées par le ministère public…..qu’aucune preuve ne peut être déduite des pièces vantées par le ministère public….. que ces différentes déclarations doivent être prises avec circonspection n’étant de surcroit corroborées par aucun élément matériel….. que l’enquêteur principal de la 3ème S.R.C., le sieur DE BAETS, se montrait particulièrement acharné à l’encontre du prévenu, paraissant parfois manquer de nuance ou de réserve….. qu’il n’est plus possible de reconstituer, les nuances, les imprécisions, les exagérations contenues dans ces diverses affirmations………. Tenant compte de ces divers éléments, on peut se poser la question du « professionnalisme » de ceux qui à Bruxelles avaient précédemment condamné Benoît de Bonvoisin avant qu’il ne se pourvoie en cassation, qui renvoya l’affaire devant la Cour d’appel de Mons. Pour être complet, ajoutons que lors d’une audience, la Cour avait mentionné que si l’affaire PDG n’avait pas été atteinte par la prescription, les mêmes considérations émises dans l’affaire Cidep lui auraient été appliquées.
Alors, l’affaire Cidep une fiction ? La réponse se trouve probablement dans le fait que lorsque Rainier Van Camp du Comité R voulut examiner le dossier Cidep, il reçut interdiction formelle de son chef, le Président Guy Rapaille de le consulter. Avant de devenir Président du Comité R, Guy Rapaille était avocat général à Liège, donc membre du Ministère public qui depuis toujours s’était organisé pour que la vérité concernant le scandale Raes ne soit pas éventée.

8.  En 1991, alors Vice-Premier ministre et ministre de la Justice et des classes moyennes, Melchior Wathelet (père), se penchant sur le dossier Raes/de Bonvoisin considère, comme indiqué précédemment, qu’il empoisonne le climat politique et qu’il faut absolument le régler, son mandat risquant d’ailleurs d’en souffrir. 
Feu Maître José Saels, l’avocat de Benoît de Bonvoisin en est avisé, question confidentialité.
Wathelet se rendit alors compte de l’imbroglio qui allait se dérouler : Raes avait émis une fausse note sur Benoît de Bonvoisin. Et il le savait. Car sinon, s’il croyait que ce qu’il avait écrit sur Benoît de Bonvoisin était vrai, il (Raes) se devait d’en avertir le pouvoir judiciaire, ce qu’il s’abstint évidemment de faire.
D’autre part, a-t-on jamais vu un haut fonctionnaire écrire une note totalement fausse sur un citoyen sans en avoir été incité par son supérieur, qui était alors Moureaux ? Philippe Moureaux qui avait menti à la Chambre en disant qu’il n’avait nullement modifié la note de Raes. Et Raes allait alors devoir expliquer pourquoi il avait obligé son collaborateur, Jacques De Vlieghere à changer les modes conditionnels par l’indicatif présent.
Mettre Raes dans son tort ? Celui-ci allait alors évoquer ses échanges avec Philippe Moureaux.
Et mettre en cause Moureaux, personnalité du parti socialiste ? à une époque où dans les gouvernements Maertens VIII et IX dont Wathelet faisait partie, les socialistes occupaient quelque 50% des portefeuilles ministériels. 
Est-ce pour cela que finalement Wathelet ne « régla » rien du tout ou bien est-ce parce qu’il fut mis au courant que la plainte contre Raes, Smets et X se terminerait, malgré toutes les apparences contraires, par un non-lieu ? Celui-ci, rappelons-le, fut considéré par Bernard Bouloc, comme une duperie, indigne d’un Etat de droit et critiquée par Jean Paul Doucet qui écrivait qu’un doute sérieux ait pu être jeté sur l’indépendance de la justice belge à l’égard du pouvoir exécutif.
 
9.   A la suite de l’acquittement de Benoît de Bonvoisin en mai 2000 par la Cour d’appel de Mons, la troisième fausse accusation d’Albert Raes se vérifiait être également inexacte. N’était-il pas temps, grand temps pour qu’un démenti soit émis sur les fourbes commentaires de Raes, commentaires qui, propagés par une presse parfois stipendiée par lui, avaient abusivement terni la réputation de Benoît de Bonvoisin.
 
Le pouvoir judiciaire avant qu’il ne soit soumis à des pressions irrépressibles, avait dans son arrêt bien charpenté du 10 décembre 1987 reproché à Albert Raes et Christian Smets, son adjoint, de n’avoir jamais fait parvenir à la presse un démenti au sujet de faits inexacts. Et comment alors comprendre que le Ministre de la justice, Melchior Wathelet lorsqu’il se pencha sur le dossier Raes dont il devint le chef hiérarchique en mai 1988, ne lui enjoignit pas de faire semblable démenti comme le lui avait demandé la Cour d’appel.
 
Aussi, le Bâtonnier Pierre Legros, écrit-il en date du 16 janvier 2001, une lettre au Procureur Général André Van Oudenhove dans laquelle il lui demande « d’attester qu’il ne résulte pas du dossier dit “de la Sûreté de l’Etat″ que Monsieur Benoît de Bonvoisin aurait eu, avec des mouvements d’extrême droite, des relations de nature à faire peser sur lui des soupçons qui, par ailleurs, ont souvent été relayés par des organes de presse ».
Après tout, on a déjà vu le Parquet émettre des démentis lors d’accusations fausses, ce qu’il s’est toujours abstenu de faire dans le cas présent même quand pour certaines accusations d’Albert Raes, le Parquet en connaissait très bien, dès le début, l’inexactitude, tel l’aspect financement du Front de la Jeunesse. D’autre part, c’était bien le Parquet qui comme suite à la fausse note de Raes avait ouvert une information judiciaire qui s’était suivie d’une instruction judiciaire, favorablement terminée dès après l’arrêt de mai 2000 de la Cour d’appel de Mons.
Et voici quelle fut la réponse du Procureur Général Van Oudenhove : « la délivrance d’une « attestation » ne relève pas de mes attributions ». Quel cynisme ! car, à la même époque, son Parquet poursuit Benoît de Bonvoisin dans l’affaire dite des faux documents. Rappelons que ceux-ci avaient été fabriqués par un repris de justice avec l’assistance de l’officier de police judiciaire J.P. Elise. Ils furent remis par Maître Spandre au Parquet de Bruxelles pour information et action.  Le Parquet se devait de mettre immédiatement fin à cette fourberie. Quod non, c’était non seulement de ses attributions mais de son devoir.
 
Aussi Benoît de Bonvoisin approche t-il dans le même sens Koen Dassen, administrateur-général de la Sûreté de l’Etat  qui considère, lui, que ce n’est pas de son ressort. Or son prédécesseur, Albert Raes considérait que c’était de son ressort de faire faire un rapport faux sur Benoît de Bonvoisin qui lorsqu’il lui fut transmis au mode conditionnel ordonna qu’il soit modifié à l’indicatif présent pour lui donner plus de poids. M. Dassen conseille alors à Benoît de Bonvoisin d’approcher sa cheffe hiérarchique, Laurette Onkelinx, Ministre de la Justice. Ce qu’il fit en 2004. Madame Onkelinx refuse alors d’émettre un démenti ou de faire, au nom de la Sûreté de l’Etat, des excuses, alors qu’il est alors patent que les trois accusations d’Albert Raes étaient fausses. Par là même, en déclinant d’émettre quelque regret, Madame Onkelinx laisse se perdurer le dommage à l’égard de Benoît de Bonvoisin.
Madame Onkelinx argumente son refus en avançant que l’arrêt de 1992 relaxe de responsabilité pénale  Albert Raes (alors qu’il avait ordonné que le rapport sur Benoît de Bonvoisin qui lui était présenté au conditionnel soit mis à l’indicatif  présent !). Benoît de Bonvoisin ne se réfèrait pas à l’arrêt de 1992 mais soulevait simplement le fait que le rapport de la Sûreté le concernant était inexact.
Mais comment la Ministre de la Justice Onkelinx ose-t-elle soulever l’arrêt de la Cour d’appel de 1992 ? Alors qu’elle est au courant ou devait être au courant  ---  unicité du Parquet --- que son prédécesseur, Stefaan de Clerck avait demandé qu’une enquête soit ouverte sur base de l’article 485 concernant mogelijke misdaden gepleegd bij de rechtspleging concernant Benoît de Bonvoisin. Que d’autre part, elle était au courant ou devait l’être ---  unicité du Parquet ---  du rapport, transmis au Ministère public, du jurisconsulte de réputation internationale, Bernard Bouloc, Professeur à la Sorbonne, qui analysant cet arrêt de 1992 le qualifiait de duperie, d’indigne d’un Etat de Droit et dénonçait que la Cour d’appel de Bruxelles n’avait pas craint de se déjuger et avait commis un déni de justice. L’attitude de Madame Onkelinx est d’autant plus déconcertante que recevant ensuite un exemplaire du livre L’Etat coupable (Editions Jourdan le Clercq) de Maître Mario Spandre, décrivant les nombreuses anomalies du pouvoir judiciaire à l’égard de Benoît de Bonvoisin, elle ne fit rien pour en corriger les effets.
 
Le Parquet général, la Sûreté de l’Etat et sa ministre de tutelle refusant de faire un démenti, est alors approché le Premier Ministre, Elio Di Rupo qui plus d’une fois avait situé des débats sur le plan éthique. Celui-ci à qui a été référé l’aspect mensonger de Raes désire prendre connaissance de l’ensemble du dossier qui concerne Benoît de Bonvoisin. Maître Julien Pierre le lui fait parvenir et notamment la lettre exhaustive du 31 juillet 2012 de l’enquêteur du Comité R, Reinier Van Camp. Di Rupo le fait examiner en détail par un de ses collaborateurs qui y relève des éléments qui attirent particulièrement l’attention de Di Rupo. Au bout de trois mois, Maître Pierre ne recevant aucune réponse envoie un courrier de rappel dans lequel il indique : Je me permets d’insister car je ne voudrais pas vous inscrire comme le dernier maillon d’une longue trame indigne du comportement de diverses Autorités de l’Etat à l’égard de Monsieur Benoît de Bonvoisin. Maître Pierre reçoit quelques jours plus tard, le 16 avril 2014, une réponse de la Cellule Stratégique du Premier ministre accusant réponse de son premier courrier du 10 janvier 2014 et de son rappel du 11 avril 2014, ajoutant : une réponse vous sera adressée dans les prochains jours. Et puis plus rien du tout.
Que s’est-il donc passé ? Di Rupo s’est alors rendu compte que le complot avait été fomenté par son collègue socialiste Philippe Moureaux, qu’ensuite Benoît de Bonvoisin ayant été blanchi par la justice des accusations de Raes, sa collègue socialiste Laurette Onkelinx avait-elle décliné un démenti. D’où discipline de parti socialiste exige, complet silence de Di Rupo, le parti socialiste ne voulant pas se déjuger et faire d’une malheureuse victime un innocent.
Comment qualifier l’attitude de Di Rupo ? Car, à la même époque, Di Rupo qui est parfaitement au courant de l’impunité de Raes avait dénoncé à New-York lors de l’Assemblée Générale de l’Onu en 2013 la notion d’impunité pour des méfaits commis.

Une autre tentative est faite alors que le Ministère de la Justice est occupé par Madame Annemie Turtelboom. A la demande de Maître Julien Pierre, par sa lettre du 3 mai 2013, Maître Matray, l’avocat de l’Etat approche Madame Turtelboom avec la requête d’un démenti. Elle réalise le bien-fondé de semblable demande mais la récuse alléguant que semblable démenti aiderait Benoît de Bonvoisin dans le cadre de son assignation contre l’Etat belge relative à la fausse note de la Sûreté. Un étudiant en faculté de droit qui viendrait avancer semblable réponse lors de son examen de juin serait invité à se représenter devant son professeur en septembre du fait du manque d’éthique de sa réponse.


Ceci rappelle la réflexion de Nietzsche dans « Ainsi parlait Zarathoustra » : L’Etat, c’est le plus froid des monstres : il ment froidement.
 
Etant donné le refus d’être confronté avec le caractère qu’il sait tristement répréhensible de la situation prédécrite, l’Etat adopte une politique récurrente de cécité volontaire. La seule solution pour restaurer la réputation de Benoît de Bonvoisin est donc de décrire les circonstances telles qu’elles se sont déroulées. Avec le temps, ce grand révélateur, les historiens pourront analyser avec sérénité la version tronquée, la falsification de la réalité qu’avec des campagnes de désinformation destinées à nourrir l’opinion publique, le pouvoir a voulu donner à une situation que les historiens considéreront vraisemblablement comme le plus grand complot politico-judiciaire de la Belgique depuis 1830, où a été bafouée la notion de séparation des pouvoirs, complot visant à éliminer un groupement politique centriste en plein développement qui faisait de l’ombre croissante à un autre parti.
Un lecteur qui a pris connaissance des réflexions de Zola fit l’observation suivante : si la moitié de ce que Zola indique est vrai, cela mérite une commission d’enquête parlementaire.
En fait, tout ce que Zola mentionne est vrai mais tous les dysfonctionnements des institutions de l’Etat n’ont pas encore été dénoncés.
 
 

EPILOGUE : BANALITE DU MAL
 
 
La banalité du mal est un concept développé par Hannah Arendt, philosophe juive allemande qui, après avoir été arrêtée par la Gestapo en 1933, parviendra à passer en France, puis au Portugal et ensuite aux Etats-Unis en 1941. C’est en analysant les forfaits du système nazi qu’elle développa l’idée de la banalité du mal, concept qui ne peut se comprendre que comme une façon de décrire les routines par lesquelles ceux   -   des êtres humains ordinaires vivant paisiblement avec femme et enfants   -   qui recourent à la démesure, à la violence et qui, mettant en suspens leurs convictions morales, renoncent à l’examen de leur engagement délictueux personnel, réflexion qui s’applique également aux témoins de leurs agissements.
 
Ce concept s’applique à la situation prédécrite. Elle résulte au départ de dysfonctionnements --- c’est un euphémisme --- de l’exécutif par son entité Sûreté de l’Etat qui fait un faux rapport sur un citoyen, et de certaines personnes du pouvoir judiciaire, notamment en la personne de son Ministre, Philippe Moureaux, qui ment au Parlement sur ce faux rapport.
 
Le citoyen pris dans cette conjuration, que peut-il faire ? Déposer des plaintes. C’est ce que fit Benoît de Bonvoisin. Elles furent rejetées suite aux réquisitions du Parquet dont le chef hiérarchique, rappelons-le, est le Ministre de la Justice, justement Philippe Moureaux dont le but est de voir éliminer le mouvement centriste Cepic. Pour donner une preuve supplémentaire du but politique de ce complot, précisons que dans le cadre de cette conspiration, le fisc   – à la demande de qui ? –   refusa la déduction fiscale des contributions financières octroyées par des sociétés au mouvement Cepic (du PSC) qu’elles souhaitaient soutenir dans son développement, alors que semblables contributions financières accordées au PSC lui-même ou à d’autres partis étaient acceptées comme dépenses déductibles fiscalement. Ainsi lorsque l’aspect « fake news » se serait dissipé, le Cepic ne saurait se redresser financièrement. Ultérieurement, cette situation étrange fut annulée par le Ministre des Finances, Mark Eyskens.
 
Après la diffusion dans la presse de la note fallacieuse de Raes envoyée confidentiellement par Philippe Moureaux  à la Commission parlementaire Wijninckx et au Conseil des Ministres, se posa la question de la fuite vers le journal socialiste De Morgen.  Plus d’un l’attribue au Cabinet de Philippe Moureaux, une personne en particulier est soupçonnée ;  ce qui explique que le Ministre se soit opposé à ce qu’une enquête y soit menée. S’ensuit alors une campagne de presse à l’encontre du Cepic et de Benoît de Bonvoisin en particulier qui, violemment attaqué, réagit. Et là les conspirateurs s’attendaient à ce que Benoît de Bonvoisin abandonne la lutte. Sachant que le contenu de la note Raes était totalement faux, il réagit et continua à se battre jusqu’à ce que les trois fausses accusations de Raes soient prouvées. Cela lui prendra 19 ans étant donné la mauvaise foi du pouvoir judiciaire qui, dès le tout début savait que certaines accusations de Raes, notamment la proximité Benoît de Bonvoisin avec le Front de la Jeunesse, étaient fausses.
 
Et puis, c’est l’acharnement du pouvoir judiciaire à l’encontre de Benoît de Bonvoisin d’où résulte un engrenage de dérives et d’infractions qui dépassent l’entendement. Le pouvoir judiciaire n’admet pas qu’on mette en cause Albert Raes et la Sûreté de l’Etat. Jean-François Godbille, substitut du Procureur du Roi, le dira et le répètera. Ainsi lors de son réquisitoire de mars 1995, il choqua tout le monde dans le prétoire en indiquant avec arrogance : je demanderai que le glaive de la justice s’abatte sans pitié si j’entends un défenseur s’insurger contre un Etat prétendument gestapiste où le parquet se serait ligué avec la presse et la Sûreté pour jeter l’opprobre sur certains. Or, à cette époque, cela fait des années que le Parquet a déjà reconnu que deux des trois accusations de la note Raes de la Sûreté étaient fausses. Et Godbille le sait et menace celui qui viendrait mettre la Sûreté en cause.  Semblable attitude infractionnelle, Godbille n’a évidemment pas pu la décider tout seul. Il en fut encouragé et couvert par sa hiérarchie. Son Procureur général était à l’époque André Van Oudenhove qui cependant disait à Me Saels, en août 1994, ne pas comprendre l’attitude du pouvoir politique dans ce dossier Raes/de Bonvoisin. Systématiquement, le Parquet de Bruxelles s’oppose à ce que la vérité soit faite sur le contenu faux de la note de Raes. Et de façon parfois surprenante. Ainsi, lors d’une audience, Jean-Marie Mawet, substitut du procureur du Roi, reproche à Benoît de Bonvoisin de s’en prendre à la Sûreté : en attaquant la Sûreté  – qui rappelons-le a fait un faux rapport sur Benoît de Bonvoisin – vous attaquez la démocratie, lui dit-il. Quelle hypocrisie de la part de Mawet car il sait  – en vertu de l’unicité du Parquet –  les faussetés du rapport Raes. Il sait donc que c’est l’inverse, c’est la Sûreté avec son faux rapport qui attaque la démocratie. C’est une déloyauté du Parquet, ce qui est une violation du principe de son fonctionnement.
Le danger d’une telle situation, c’est que la faiblesse risque généralement d’entraîner de nouvelles faiblesses, la lâcheté de nouvelles lâchetés et la capitulation de nouvelles capitulations qui, dans le cas présent, culmineront avec l’affaire des faux documents.
 
Mais pourquoi donc refuser de mettre en cause Raes et la Sûreté ?
Comme le disait le Ministre de la Justice Melchior Wathelet à une réunion de la Commission de la Justice du 7 novembre 1990, c’était une erreur de ne pas reconnaître la faute immédiatement et de ne pas en tirer tout de suite les conséquences. Ainsi, on aurait fait porter la responsabilité de la fausse note sur un cadre lambda qui, écarté pendant un certain temps, aurait ensuite été promu. C’est classique. Mais reconnaître la faute, c’était mettre en péril le stratagème des socialistes d’écarter pour toujours le mouvement centriste Cepic. D’autre part, n’allait-on pas ouvrir une boite de Pandore ? Quid des « dossiers réservés » découverts lors d’une perquisition à la Sûreté, dossiers secrets, illégaux, avec des informations compromettantes sur des centaines de politiques ? Ces dossiers qui avaient été constitués par Albert Raes tombaient entièrement hors du processus d’information normal de la Sûreté. Quid des caisses spéciales d’Albert Raes dont les justificatifs étaient, contrairement aux prescriptions sur la comptabilité de l’Etat, détruits annuellement pour en éviter tout contrôle ? Allait-on se repencher sur des dossiers troubles, tel le décès de Latinus, ancien informateur rémunéré de la Sûreté, où la Sûreté avait été épinglée ? Latinus s’était pendu d’après la vérité judiciaire – à mille lieues de la vérité – puisque la corde retrouvée autour de son coup cédait avec un poids de quelque 30 kilos et qu’il en pesait le double. Allait-on se repencher sur l’assassinat de deux petits vieux rue de la Pastorale ? Et quid des cours de filature donné par Smets, bras droit de Raes aux membres d’un mouvement d’extrême droite ? Et que n’allait-on pas découvrir en se rappelant que Raes avait défini sa fonction en disant « mon métier c’est de mentir » ?
Comme l’écrivit Victor Massart, ancien commissaire à la Sûreté, « dès qu’Albert Raes eût succédé à Ludo Caeymaex en 1977, le service de renseignements a commencé à être mis en cause dans différentes affaires ». Il régnait un tel malaise à la Sûreté que lors de la visite du Roi organisée par Jean Gol le 11 février 1987, le personnel reçut l’ordre de ne pas circuler dans le bâtiment pour s’assurer qu’il ne rencontrerait pas le souverain à qui il aurait pu faire part de doléances.
 
La banalité du mal dans cette affaire s’explique par la difficulté à la concevoir dans son ampleur et par le nombre de personnes impliquées, car la réalité d’une situation dramatique dépasse généralement la compréhension immédiate des êtres humains. Ils sont ainsi constitués qu’ils intègrent les faits seulement lorsqu’ils sont disposés à les admettre. Or, si le citoyen lambda s’est habitué à voir en Belgique des scandales au niveau de l’exécutif, du législatif et des régions, il n’est pas préparé à les admettre du pouvoir judiciaire dont une des fonctions est de protéger le citoyen contre des situations d’abus. Ces situations d’abus peuvent dans le cas présent être résumées de la manière suivante :
 
   1. Fausse note élaborée par la Sûreté de l’Etat. Quand ? Quelques mois après que Philippe Moureaux devient le Ministre de la Justice qui a la tutelle sur la Sûreté.
    2. La note est rédigée au mode conditionnel mais Albert Raes exige sa transformation en indicatif présent pour lui donner plus de poids.
     3.  Transmission confidentielle de la note aux membres de la Commission Wijninckx et au Conseil des ministres.
    4.  Fuite de cette note vers le journal socialiste De Morgen,  pour laquelle Philippe Moureaux refuse de faire faire une enquête.
     5.  Mensonge de Moureaux à la Chambre. Il prétend qu’il n’a apporté aucune modification à la note de Raes.
     6.  Lettre de Benoît de Bonvoisin à Philippe Moureaux pour lui demander de rectifier la vérité. Absence de réaction de Moureaux.
      7.   Diverses plaintes de Benoît de Bonvoisin rejetées à la demande du Parquet.
     8.  Démarrage d’une campagne médiatique dénigrante orchestrée par des journalistes rémunérés par Raes sur les fonds secrets de la Sûreté, campagne à laquelle collaborent des personnes cependant tenues par le secret professionnel, comme ne le cache pas Hugo Gijsels, auteur du livre « L’Enquête » où il remercie ceux qui l’ont aidé en indiquant « Ma gratitude s’adresse également aux policiers, gendarmes et  m a g i s t r a t s  qui, guidés par un réflexe démocratique, m’ont aidé de leur documentation, conversations et conseils. Pour des raisons évidentes, je ne peux les citer nommément dans ce livre ».
     9.  Assignation de Benoît de Bonvoisin à l’encontre d’Albert Raes et son adjoint Smets.
   10. Le Parquet demande l’irrecevabilité, ce que confirme la Chambre du Conseil. Mais appel ayant été interjeté, la Chambre des Mises en Accusation réforme la décision de la Chambre du Conseil et indique la plainte recevable. Madame Lyna est nommée juge d’instruction.
    11. Madame Lyna ne joue pas son rôle de juge d’instruction étant au courant que Raes a l’intention de faire rouvrir le dossier de son mari. La Cour d’appel, présidée par M. Jans juge en 1987 son travail lacunaire et nomme un autre juge d’instruction, M. Collin. Il reçoit la mission de faire une vingtaine de devoirs d’enquête. Il n’en fera que deux ou trois.
    12. Malgré la déficience du juge Collin, la même Cour d’appel, en 1992, considère que les devoirs qu’elle avait elle-même prescrits ne sont, en fait, pas nécessaires ( !!!) et déclare un non-lieu en faveur de Raes et Smets. Comment expliquer le revirement inique de cette  Cour d’appel présidée par le même magistrat qu’en 1987 ? Une astuce du pouvoir : faire désigner à la Cour d’appel deux conseillers qui sont en faveur de la thèse du pouvoir. Et comme une décision de Cour d’appel est prise à la majorité, le point de vue du (même) Président dans ce cas, est neutralisé.
Certains magistrats semblent ne pas se rappeler l’attitude d’Antigone à laquelle le Président de la Cour de Cassation, Jean de Codt se référait en disant qu’il n’y a pour le magistrat qu’une ligne de conduite possible : « résigner sa charge le jour où elle n’est plus que complicité ». Sans s’étendre ici sur les critiques sévères des jurisconsultes Bouloc et Doucet concernant cet arrêt de la Cour d’appel de Bruxelles de 1992, cet arrêt est une trahison de la démocratie.
Ainsi, en Belgique, il existe deux sortes de justiciables : ceux qui coupables de diffamation sont punis par les tribunaux et ceux qui comme Albert Raes, coupable de diffamation intentionnelle  – n’est-ce pas de la diffamation que de faire sur un citoyen un rapport faux qui rédigé initialement au conditionnel est transformé à l’indicatif présent pour lui donner plus de force ? -  font l’objet d’un non-lieu. Utiliser des moyens illicites pour servir des intérêts particuliers relève d’un comportement mafieux.
    13.  Le terme  « procédés mafieux » fut utilisé par l’ancien rédacteur du code pénal, feu le Bâtonnier de Liège, Maître Michel Franchimont lorsqu’il se pencha sur ce qu’on a appelé l’affaire des faux documents.
Le pouvoir se rendit compte que la troisième accusation de Raes, l’affaire PDG Cidep risquait, elle aussi, de connaître un sort similaire aux deux autres,  comme cela s’avéra être le cas suite à l’acquittement de Benoît de Bonvoisin par la Cour d’appel de Mons en mai 2000.  Ainsi  ces faux documents furent fabriqués avec l’assistance d’un officier de police judiciaire pour discréditer Benoît de Bonvoisin. Ce traquenard, cette provocation du pouvoir furent dévoilés par un bâtonnier au Procureur général Van Oudenhove et son adjoint Morlet. Et ceux-ci ne firent rien pour l’arrêter. Pire, le Parquet commença à poursuivre Benoît de Bonvoisin alors que c’était son avocat qui avait averti le Parquet de ce qui se tramait avec ces faux. Semblable action dépasse l’entendement surtout quand on sait l’acharnement à l’encontre de Benoît de Bonvoisin de l’avocat général Michel Nolet de Brauwere, parfaitement au courant lui aussi du stratagème.
Comment ce dossier litigieux se termine-t-il ? La personne qui avait fabriqué ces faux fit savoir qu’étant poursuivi, sa ligne de défense serait qu’il avait agi en service commandé pour déconsidérer Benoît de Bonvoisin. Et la suite ? Quelle situation d’imbroglio n’allait-on pas démasquer ? Le dossier fut détruit au greffe de la Cour d’appel de Bruxelles par un incendie ! Les incendiaires furent identifiés, déclara Nolet de Brauwere à Me Julien Pierre. Mais des années plus tard, ils n’ont pas été poursuivis. Le lecteur comprendra.


Mais un magistrat peut-il se permettre de faire n’importe quoi, sans qu’il n’y ait aucune réaction et en toute impunité. Généralement, oui. Sans réaction ? Il faut ici distinguer le magistrat de la Magistrature debout – le procureur – de celui de la Magistrature assise – le juge, le conseiller.
 
Si un juge prend une décision qui paraît inacceptable au justiciable, ce dernier peut se pourvoir en appel – délai de trois à cinq ans à Bruxelles – et ensuite, si nécessaire en cassation – délai supérieur à un an. Et pendant ce temps, l’affaire non terminée perdure avec ses conséquences pénibles. Benoît de Bonvoisin a été amené à se pourvoir en cassation plusieurs fois et plus d’une demi-douzaine de fois, la Cour de cassation a cassé des décisions de Cour d’appel. Comment comprendre semblable égarement de la part de Cours d’appel ? Incompétence ? Pression du pouvoir politique ? En fait, une Cour d’appel peut dire n’importe quoi et si  son arrêt est cassé par la Cour de Cassation,  il n’y aura ni sanction, ni même une admonestation à l’égard de son président.
 
Citons un exemple. Le tribunal de première instance de Bruxelles avait par son jugement du 20 avril 2012 condamné l’Etat à un montant de 100.000 euros en faveur de Benoît de Bonvoisin comme suite à la fausse note de Raes. Le pouvoir très mécontent interjette appel. Et de ce fait, Benoît de Bonvoisin fait un appel incident. L’affaire vient, en mai 2016, devant une Cour d’appel à Bruxelles, spécialement constituée. Elle est présidée par Madame Mireille Salmon. Cela surprend plus d’un magistrat : une cour d’appel présidée par Madame Salmon pour juger une question de responsabilité d’un service de l’Etat, à savoir la Sûreté ! Comme quoi, les magistrats se connaissent entre eux et sont au courant des tendances socio-psycho-philosophiques de leurs confrères. Et le 29 septembre 2016 la Cour d’appel décide que Benoît de Bonvoisin n’avait, ayant subi un AVC, pas la capacité juridique de faire un appel incident et conclut à l’irrecevabilité de cet appel. Elle ne pose même pas la question aux deux avocats de Benoît de Bonvoisin qui, chacun séparément, avaient demandé à Benoît de Bonvoisin s’il voulait se pourvoir en appel, ce à quoi il avait répondu positivement. Elle ne s’interroge pas pour savoir si Benoît de Bonvoisin est valablement représenté. Ce à quoi il lui aurait été répondu que Benoît de Bonvoisin avait donné mandat par un acte notarié à un membre de sa famille pour le représenter en justice. Un pourvoi en cassation fut déposé. Après que l’avocat général auprès de la Cour de Cassation ait demandé le paiement par l’Etat d’une indemnité en raison de la fin de non recevoir soulevée à tort, la Cour de Cassation casse l’arrêt Salmon et renvoie l’affaire devant la Cour d’appel de Mons. Alors, cette décision de Madame Salmon, comment la comprendre ? Résulte-t-elle d’une certaine incompétence, d’une suggestion/pression politique ou d’une osmose avec ses convictions politico-sociologiques ?
Ce fourvoiement de la magistrature assise est en contradiction avec ce que le Premier Ministre Michel disait sur RTL le dimanche 20 mai 2018 : la Belgique est une grande démocratie. Et de cette décision erronée de Madame Salmon ne résulte ni sanction, ni admonestation.
N’y a-t-il pas une certaine contradiction entre la situation qui précède et ce que La Libre Belgique écrivait en décembre 2016, à propos de Madame Salmon, ex-avocate : si elle est passée de l’autre côté de la barrière dans les prétoires, c’est aussi pour relever le défi de montrer une certaine force de caractère et d’indépendance comme magistrate. Et La Libre Belgique d’ajouter, ce qui dans le cas présent peut paraître quelque peu saugrenu,  depuis lors, elle persiste et signe dans les principes de Montesquieu et de la vraie séparation des pouvoirs !
 
Un autre exemple : dans le cadre de l’affaire des faux documents, Benoît de Bonvoisin est amené à comparaître devant le tribunal correctionnel. Il est présidé par Madame Claire Degryse. Le pouvoir judiciaire sait que cette affaire consiste en une provocation initiée par un officier de la police judiciaire, ce que J.F. Godbille sait et relate et dont le procureur général Van Oudenhove accompagné de l’avocat général Morlet a été officiellement mis au courant. Benoît de Bonvoisin explique à Madame Degryse de quoi il retourne et lui précise la nature du complot. La Présidente Degryse ne peut admettre, ne peut accepter ce qu’elle entend ; elle s’emporte, invective Benoît de Bonvoisin et termine ses réflexions perfides en lui disant qu’il devrait aller voir un psychiatre. Là-dessus, Maître Julien Pierre demande au greffier de prendre note des réflexions de Madame De Gryse. Ce que celle-ci lui interdit de faire. Me Pierre rappelle alors au greffier les devoirs de sa fonction et il s’exécute. Le rapport du greffier est ensuite transmis à la Cour d’appel qui récuse Madame De Gryse. Tout cela ne correspond pas à une justice modérée et rationnelle qui caractérise la Belgique selon Jean de Codt, Président de la Cour de Cassation lors de son interview sur RTL, le 2 juillet 2018.
 
Et quand un membre du Parquet vient à émettre une contre-vérité à l’encontre d’un justiciable ? Prenons le cas de Godbille qui déclare devant une commission parlementaire qu’on peut voir Benoît de Bonvoisin impliqué dans les tueries du Brabant Wallon. Comme indiqué précédemment, ce dernier va trouver la cellule judiciaire en charge des tueries de Brabant où le policier présent refuse de l’interroger en précisant que s’il avait le moindre doute il l’aurait convoqué depuis longtemps. Et il le renvoya.
Mais quel est le sens moral, la faculté de discerner le bien du mal d’un Godbille et de sa hiérarchie qui dans ce cas semblent avoir mis leur conscience en congé sabbatique ? De nouveau, semblable démarche de Godbille n’a pu qu’être entérinée par sa hiérarchie.
Benoît de Bonvoisin dépose alors une plainte contre lui. En vertu du privilège de juridiction dont jouissent les magistrats, celle-ci est référée au Procureur général, André Van Oudenhove. Le magistrat en question est-il alors appelé à comparaître devant ses pairs ? Comme un médecin qui impliqué dans une affaire, comparaît devant le Conseil de l’ordre, conseil parfois critiqué car constitué principalement de médecins. Non, un Godbille ne comparaîtra pas devant une chambre constituée de magistrats. C’est le Procureur général qui prend la décision tout seul, dans le plus grand secret et sans devoir se justifier. C’est une juridiction éminemment d’exception où le Procureur général joue le rôle de législateur, de pouvoir judiciaire et dont les audiences sont secrètes.  Et les loups ne se mangeant pas entre eux, c’est du jour au lendemain et non pas après une longue instruction, que la plainte fut rejetée par Van Oudenhove.
Quid de l’éthique de semblable magistrat ? Ainsi un magistrat du Parquet comme Godbille peut venir dire n’importe quoi de faux se sachant couvert par une impunité. Et Godbille  s a v a i t  que son propos était faux. En effet, quand lui fut présenté le procès-verbal de son intervention pour approbation, il biffa, donc supprima, ce qu’il avait proféré sur Benoît de Bonvoisin à cet égard.


 
Ceci amène à se poser la question : qui contrôle le pouvoir judiciaire ?
 
Le pouvoir exécutif est contrôlé par le pouvoir judiciaire, indirectement par le pouvoir législatif de même que par l’opinion publique.
 
Le pouvoir législatif est contrôlé par le pouvoir judiciaire, indirectement par le pouvoir exécutif de même que par l’opinion publique.
 
Et le pouvoir judiciaire. Par personne. Ou plus précisément comme cela a été vu, par lui-même. Du fait de la séparation constitutionnelle des pouvoirs - ce n’est pas toujours le cas en Belgique selon Bernard Bouloc et Jean-Paul Doucet -, ce n’est ni par le pouvoir exécutif, ni le pouvoir législatif ni même par l’opinion publique qui ne comprend pas toujours le langage abscons du pouvoir judiciaire.
Le premier pilier d’une société juste est l’équilibre des pouvoirs. Or, Il est une expérience éternelle que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser… Pour  qu’on ne puisse en abuser, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête les pouvoirs, écrivait Montesquieu dans « De l’esprit des lois ». Et ceci n’est pas d’application en ce qui concerne le pouvoir judiciaire en Belgique.

Et qu’en est-il de la responsabilité des magistrats ?
En avril 1989, la conférence du jeune barreau de Mons organisa sous la présidence de M. Jacques Van Compernolle, doyen de la faculté de droit de l’UCL, une journée d’étude consacrée à « La responsabilité professionnelle des gens de justice ».
Il s’agit de la responsabilité des magistrats pour les fautes commises dans l’exercice de leurs fonctions et de la responsabilité de l’Etat pour ces fautes.
Certains s’y opposent du fait de l’immunité des membres du pouvoir judiciaire et du principe de l’autorité de la chose jugée.
D’autres, par contre, dont notamment MM. Benoît Dejemeppe et Christian Panier, à l’époque respectivement procureur du Roi à Bruxelles et juge au tribunal de première instance de Namur ont des approches plus nuancées. Ceux-ci, tout comme M. A. Van Oevelen, chargé de cours à l’université d’Anvers, considèrent qu’un pouvoir réellement indépendant, digne de ce nom, renforce même sa position d’indépendance s’il accepte en toute impartialité que les magistrats, dans l’exercice de leurs fonctions, peuvent causer un dommage à des tiers s’ils agissent avec négligence et que l’Etat doit pouvoir en être rendu responsable. Bref, il semblait, à l’époque, y avoir une évolution de la doctrine en direction d’une atténuation de la non-responsabilité de l’Etat du fait d’actes posés par le pouvoir judiciaire, soit aussi bien les actes positifs que les omissions commises par des magistrats ou des personnes placées sous leur surveillance.
Ces réflexions datent d’il y a trente ans et n’ont pas été suivies de concrétisation, le pouvoir s’en tenant au principe sacro-saint de l’immunité des magistrats qui, de ce fait, peuvent faire (presque) n’importe quoi quand ils sont soumis aux suggestions/pressions du pouvoir politique.


 Au sujet de cette absence de contrôle, qu’en est-il du Ministre de la Justice ? Celui-ci est, en fait, considéré par la haute magistrature avec une certaine condescendance polie mais parfois brutale. Préoccupé de ce que l’arrêt de 1992 accordant un non-lieu à Raes pouvait constituer un déni de justice à l’égard de Benoît de Bonvoisin, le Ministre de la justice Stefaan de Clerck avait sur base de l’article 485 du code pénal ordonné qu’une enquête soit menée. Le Procureur général André Van Oudenhove   -   qui soit dit en passant était le Procureur général de Bruxelles à l’époque où l’arrêt de 1992 indigne d’un Etat de Droit, avait été rendu   -   classa immédiatement l’affaire sans suite. Ceci choqua certains chroniqueurs judiciaires et notamment le journal De Tijd qui mentionna que le ministre avait été wandelen gestuurd. Et cela ajouta De Tijd, pour la deuxième fois ; l’attitude de rejet de la haute magistrature avait été remarquée lors d’une intervention du même ministre dans l’affaire des tueries du Brabant. En réalité, la haute magistrature n’aime pas qu’on vienne investiguer, se mêler de ses affaires même si c’est à la demande du Ministre de la justice.

 
Et la presse qui joue un rôle important dans la formation de l’opinion publique et qui constitue un contre-pouvoir par rapport aux trois pouvoirs classiques d’une démocratie ? Certes, la liberté de la presse est garantie par l’article 25 de la Constitution. La presse a eu le courage de dévoiler, notamment récemment, des situations d’abus dont certaines sont toujours dans la mémoire du citoyen lambda. Mais consciente de son pouvoir, elle a parfois des réticences à dévoiler des dérèglements qui mettent en cause certains équilibres fonciers de la société.
 
D’autre part, il faut rappeler que la presse est subsidiée par le gouvernement. En plus, et c’est humain, est pris en considération le fait que des journalistes, dûment accrédités, sont régulièrement invités à procéder à des interviews du monde politique, à participer à des réunions de personnalités, à faire partie de voyages officiels. Enfin, certains directeurs de rédaction se rappellent que fut mis à la porte du jour au lendemain le journaliste de la Dernière Heure qui, en 2002, après l’acquittement de Benoît de Bonvoisin par la Cour d’Appel de Mons venant mettre à néant les accusations de Raes, avait soulevé la question de savoir si Benoît de Bonvoisin n’était pas la victime d’une coalition de fonctionnaires et de la Sûreté de l’Etat, ce que l’arrêt de décembre 1987 avait ordonné de rechercher dans les meilleurs délais… La direction de la Dernière Heure apparaissait ainsi être en symbiose avec la politique d’omerta du pouvoir politique.
Soulignons ici que la Libre mentionnait récemment, en janvier 2019, que 85,3 % de ses lecteurs considéraient que les journalistes sont trop proches des élites et que, de ce fait, ils ne peuvent leur faire entièrement confiance.
A noter que dans le cas présent, la presse n’a pu agir comme contre-pouvoir étant donné les nombreux journalistes rémunérés par Raes sur les fonds secrets de la Sûreté de l’Etat. Cette liste, dont les avocats de Benoît avaient pris connaissance, fut saisie à la Sûreté lors d’une perquisition et « empruntée » au greffe du tribunal à Bruxelles par Jean-François Godbille, qui ne la restitua jamais.
 
Certains anciens magistrats, peu fiers d’avoir cédé aux pressions, regrettent ce passé indigne. Ils se confient à certains et parlent après qu’ils aient fait droit à leur pension, confirmant ce qu’écrivait Marcel Trousse, ancien président du tribunal de première instance de Liège : « Lorsqu’arrive le moment de la retraite, le juge range sa toge au placard. Il peut y placer aussi les œillères, à vue courte et étroite qui lui étaient indispensables pour exercer la fonction de juge selon les lois. Il lui est loisible, alors, d’étudier nos institutions, sans myopie et sans complaisance, avec le désir de connaître la réalité qui s’est formée à l’ombre de la législation ». Marcel Trousse fut un des rares magistrats à dénoncer, dans un article intitulé  « Le droit à l’honneur », l’attitude inadmissible de l’Etat dans cette affaire Raes en écrivant notamment « La méthode est bien connue. A partir d’un fait vrai si possible, ou totalement déformé s’il le faut, on dénonce des considérations qui sont répandues à profusion et sur lesquelles on se base ensuite pour en affirmer la vérité. C’est la pratique de l’amalgame. Parfois on attire ainsi l’attention du public pour lui cacher d’autres faits plus compromettants ».
Marcel Trousse soulève bien que l’article 17 du pacte international relatif aux droits civils et  politiques - approuvé par la Belgique par la loi du 15 mai 1981 - dispose que toute personne a droit à la protection de la loi contre les atteintes illégales à son honneur et à sa réputation et il poursuit en soulignant : il semble bien que, dans l’esprit de certains, ce droit fondamental continuerait, comme par le passé, à s’arrêter au seuil des services officiels de police ou de renseignements (telle la Sûreté de l’Etat). Ceux-ci pourraient continuer impunément à se comporter de manière méprisante et à propager des informations « frivoles ».


Par ses critiques, Marcel Trousse ne s’est pas fait beaucoup d’amis au sein du monde judiciaire, nombre de magistrats au courant des errements de l’Etat ne supportant pas qu’un des leurs vienne blâmer le système même quand il se fourvoie. Mais lors des funérailles de Marcel Trousse, Claire Lovens, Présidente du tribunal de première instance de Liège, lui rendit hommage en déclarant dans son discours d’adieu : « Pragmatique, vous n’en n’étiez pas moins dominé par la priorité donnée au respect des droits subjectifs en butte à certains pouvoirs. Vous ne faisiez preuve d’aucune frilosité pour vous saisir de dossiers délicats. Votre indépendance était légendaire ».

D’autres magistrats en fonction souhaiteraient pouvoir oublier les erreurs d’antan et constatent l’omerta sur l’époque de leurs prédécesseurs qui ne souhaitent pas affronter un certain passé. En fait, la Belgique se trouve dans la même situation que l’Allemagne post nazie. Certes, le tribunal de Nuremberg avait examiné la responsabilité des 24 principaux responsables du Troisième Reich. Et qu’en est-il de tous les autres ? Dans les années d’après-guerre, il n’y eut pratiquement pas de poursuites en Allemagne contre des ex-nazis, contrairement à ce qui se passa dans d’autres pays tels que la Pologne.
Parfois, ce fut même l’inverse de ce à quoi on s’attendait de la part des tribunaux allemands. Alfred Jodl, chef d’état-major des forces armées (OKW) de 1939 à 1945 fut reconnu coupable par le tribunal de Nuremberg de crimes contre la paix, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité et il fut pendu le 26 octobre 1946. Mais le 28 février 1953, il fut innocenté à titre posthume par un tribunal allemand de dénazification qui le jugea non coupable de crimes au regard du droit international.
Comme le révéla The Rosenburg Files, après la guerre quelque 50% des membres du Ministère allemand de la Justice de 1949 à 1973 avaient été nazis, ce chiffre atteignant même 76% en 1957.  Et ils s’entraidaient entre eux. Ce qui explique que lorsque Fritz Bauer, Procureur général à Francfort, connu pour son souci de retrouver d’anciens SS criminels, eut reçu l’information selon laquelle Adolf Eichmann se trouvait en Argentine, il ne s’en ouvrit pas aux autorités de son pays redoutant des fuites vers Buenos Aires. Il en fit part uniquement à son ami le Ministre-président du Land de Hesse qui lui indiqua que l’Allemagne serait bientôt prête à faire face à son passé. Mais Bauer lui répondit : « Tous les services sont infestés de nazis. Tous sans exception : la police judiciaire, les renseignements, aucune administration n’est épargnée. Et quand j’ai contacté Interpol, sans communiquer le nom d’Eichmann, ils m’ont répondu qu’ils étaient incompétents en matière de crime politique ». Aussi après avoir pris l’avion pour Paris, il se rendit secrètement à Tel Aviv où il contacta le Mossad, les services secrets israéliens, qui ne révélèrent la visite de Bauer qu’après son décès en 1968.


En fait, ce ne fut qu’après 1962, après le procès d’Eichmann à Jérusalem, quand la génération d’ex-nazis au sein du Ministère allemand de la Justice eut cédé la place à des Allemands non ternis par la seconde guerre mondiale, que des procès contre des (très vieux) ex-nazis purent être intentés.
 
Les historiens qui se pencheront sur l’histoire politique de la Belgique durant la période 1970 – 1990, se rappelant la réflexion d’Aldous Huxley - ce qu’il y a de mauvais doit être traqué, reconnu et si possible évité à l’avenir -, ne pourront la décrire sans se référer à ce complot politico-judiciaire où les socialistes souhaitant se débarrasser d’une nouvelle aile centriste en plein développement, finirent par échouer. En discréditant le mouvement Cepic au sein du PSC, ils pensaient que leurs anciens membres resteraient au sein d’un PSC dûment contrôlé par son aile gauche, la Démocratie chrétienne. Ils se trompèrent lourdement car les membres du Cepic quittèrent pour la plupart le PSC  - qui depuis lors, sous le vocable CDH, voit son score de plus en plus écorné lors d’élections législatives -  pour rejoindre le (petit) parti libéral transformé ultérieurement en Mouvement Réformateur (MR), qui devint un parti centriste incontournable.
 
Les historiens relèveront que la Magistrature assise, en violation de la Constitution, a succombé à des injonctions du monde politique comme le soulèvent des jurisconsultes indépendants car extérieurs à l’affaire. Ils relèveront également que certains membres de la Magistrature debout qui ont fait preuve d’une perfide déloyauté caractérisée par des contrevérités, sont tombés dans une servitude qui est la caractéristique d’une société hiérarchisée, comme le soulevait déjà Etienne de la Boétie dans son ouvrage « Discours de la servitude volontaire » publié en 1574. Ces historiens ne pourront que constater que les responsabilités individuelles des membres de cette conjuration semblent s’être diluées pour créer un phénomène très particulier d’irresponsabilité collective destiné à les amoindrir. Et combien d’autres se sont donné bonne conscience en se disant qu’ils n’y participaient pas directement personnellement. Leur attitude fait penser à la réflexion d’Albert Speer, ministre de l’armement d’Hitler, qui échappa à la pendaison au procès de Nuremberg en ayant persuadé les juges qu’il n’était pas au courant de la nature criminelle du régime hitlérien, notamment des assassinats de masse. Après avoir passé 20 années à la prison de Spandau à Berlin, Speer déclara, à sa libération, lors d’une interview à un magazine américain en 1971, « si je n’ai rien vu, c’est parce que je ne voulais pas voir ».  
 
Ayant présente à l’esprit la réflexion récente – de novembre 2018 –  de Louis Michel, ancien Commissaire européen, « Où est passée l’indépendance de la magistrature ? La séparation des pouvoirs, si ça vaut pour les politiques, cela vaut pour les magistrats également », les historiens ne pourront qu’être stupéfaits :
  
   1.    qu’un petit nombre de magistrats aient ainsi entaché de façon indélébile la réputation de la justice belge alors que l’ensemble de leurs collègues travaillent avec sérieux et compétence dans le cadre de conditions difficiles. En effet, ils constatent que le pouvoir exécutif affaiblit de plus en plus le pouvoir judiciaire et tente de l’asphyxier en lui coupant ses moyens de subsistance : du fait de restrictions budgétaires les cadres prévus par la loi ne sont pas remplis, les budgets consacrés à l’informatique ont été réduits de 22%, nombre de palais de justice tombent en ruine…
    2.    que dans un Etat qui se dit démocratique, une police politique   -  pour utiliser le terme employé par Walter De Smedt, ancien magistrat et ancien membre du Comité R  -   incarnée par une partie de la Sûreté de l’Etat sous l’égide son chef Albert Raes comme cela ressort du rapport d’activités 2009 du Comité R, une police politique ait donc pu agir sous l’égide du Ministre de la Justice Philippe Moureaux à l’encontre de Benoît de Bonvoisin
   3.    qu’alors que le pouvoir judiciaire constitue une garantie contre les abus des autres pouvoirs, en particulier du pouvoir exécutif, les justiciables deviennent méfiants face à une justice de plus en plus chère et de plus en plus lente qui ne peut, parce qu’on ne lui en donne pas les moyens, pas toujours exercer adéquatement sa mission.
« La tendance actuelle est de concentrer de plus en plus de pouvoirs entre les mains du pouvoir exécutif, au détriment des autres pouvoirs et c’est très inquiétant » soulignait, en janvier 2019, faisant référence à la Belgique, Madame Olivia Venet, Présidente de la Ligue des droits humains. Et elle ajoutait « le gouvernement a pris l’habitude de passer en force et cela dénote un certain état d’esprit. Résultat des courses : nous sommes obligés de déposer une kyrielle de recours devant la Cour Constitutionnelle et nous les gagnons quasi systématiquement ».
Citons ici la proposition du Ministre de la Justice Koen Geens de supprimer le juge d’instruction et de le remplacer par un juge de l’enquête, chargé simplement de contrôler le travail du Parquet devenu ainsi  s e u l  à diriger les enquêtes. Inutile de souligner que dans les cas où, comme ici, l’Etat serait impliqué, le Parquet, dépendant du Ministre de la Justice, donc du gouvernement et avec l’autoritarisme qu’on lui connaît, ferait un sort rapide et définitif à une plainte concernant l’Etat. Précisons que le Parquet a un commandement unique, vertical où l’ordre ne peut être discuté. Les membres du Parquet sont certes des magistrats, mais soumis du fait qu’ils ne jouissent pas de l’inamovibilité et qu’ils peuvent être déplacés par leur chef de corps s’ils montrent une liberté de pensée qui n’est pas celle de leur hiérarchie. En attendant, le devenir du juge d’instruction n’est toujours pas réglé maintenant que deux éminents magistrats qui faisaient partie du cénacle Geens ont démissionné par protestation sur cette question.
Interviewé, le mardi 12 février 2019, lors du journal parlé de RTL, Jean de Codt, Président de la Cour de Cassation, regrettait les moyens insuffisants accordés au pouvoir judiciaire.  Et en ce qui concerne la séparation des pouvoirs, il indiquait que cette séparation n’existe plus entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif, soulignant que cette séparation existait bien entre le pouvoir judiciaire et les deux autres pouvoirs.
Mais enfin, avait-il oublié les arrêts de la Cour de Cassation des 18 novembre 1992 et 23 mars 2011 ?
 
Etant donné les dysfonctionnements précités résultant d’une hiérarchie rigoureuse  -   alors qu’aujourd’hui, dans l’armée, un soldat peut refuser un ordre qu’il considère comme illégal  -   ne devrait-on pas, comme cela est envisagé pour le secteur bancaire, instaurer un serment pour les membres du monde judiciaire qui a certes une mission qui relève de l’intérêt général ?  
Ce serment pourrait comprendre certaines normes telles que : « soucieux de mesurer les conséquences de mes actes, je m’engage à accomplir ma tâche avec intégrité et sens de l’éthique ; je m’engage à respecter la dignité des personnes que je serai amené à rencontrer dans le cadre de mes activités professionnelles ; je m’engage à ne pas mettre en péril l’honneur de ma profession par une conduite inappropriée; je m’engage à traiter autrui comme je souhaiterais l’être moi-même… ».
Ce serment permettrait peut-être à des juges d’instruction de ne pas faire l’impasse sur des devoirs d’instruction essentiels, à des membres du Parquet de ne plus invectiver un justiciable avec ce que le Parquet sait être une contre-vérité, à des juges, à des conseillers de condamner quelqu’un pour un détournement qu’il insiste ne pas avoir fait, ce que la comptabilité de la société pourrait confirmer, alors qu’en fait cette comptabilité n’est pas présente lors du procès car… le Parquet l’a  s u b r e p t i c e m e n t  dissimulée au greffe.
 
 
Ceux qui souhaiteraient approfondir le cas présenté dans cette étude, consulteront avec intérêt les documents suivants :
  - L’arrêt de la Cour d’appel de Bruxelles du 10 décembre 1987
  - 
L’arrêt de la Cour d’appel de Bruxelles du 12 mars 1992
  - L’exposé du 15 septembre 1994 concernant les deux arrêts précités, de Bernard Bouloc, professeur à la Sorbonne, jurisconsulte de réputation internationale
  - L’étude, portant sur les deux arrêts précités, de Jean-Paul Doucet, jurisconsulte de réputation internationale, intitulée « Le Déni de Justice : Une Incrimination nécessaire
  - Les articles « Les libertés, la police et le droit à l’honneur » de Marcel Trousse, Président du tribunal de première instance de Liège, parus dans les éditions des 16 septembre et 30 septembre 1994 du Journal des Procès
  - Le livre « Les Dés Etaient Pipés - Conspirations à la Sûreté de l’Etat » de Victor Massart, ancien commissaire à la Sûreté, paru aux éditions Quorum en 1997
  - Le livre «  L’Etat Coupable » de Maître Mario Spandre paru aux Editions Jourdan le Clercq en 2005
  - Les pages 24 à 30 du rapport d’activités 2009 du Comité R, Comité permanent de contrôle des services de renseignements et de sécurité
  - La lettre du 31 juillet 2012 de Reinier Van Camp, officier de police judiciaire détaché auprès du Comité R, adressée à Maître Julien Pierre.   

 

 


                                                                                                                                                           ZOLA



P.S. Dans le cadre de ses investigations futures, Zola pourrait déceler d’autres faits pertinents. Ceux-ci seront alors incorporés dans cette étude.


 
* Méthode typique d’une justice à la soviétique.
 
[1]  Le langage politique a pour but de faire paraître vrai le mensonge et respectable le meurtre. George Orwell
 
[2] La Sûreté de l’Etat, créée en 1832, juste après la fondation de la Belgique est un organisme fondamental dans un pays démocratique, spécialement dans le contexte actuel de terrorisme qui affecte de nombreuses régions du globe. Cependant, dans les années 70 et 80, elle a connu de graves dysfonctionnements dont l’origine remonte à l’époque où, comme le relève le Comité permanent de contrôle des services de renseignements et de sécurité, dit Comité R, chargé de surveiller la Sûreté, Albert Raes, l’administrateur général, avait institué, avec certains fidèles, un circuit parallèle court-circuitant la hiérarchie de même que les services de contrôle et d’analyse. Ce que Victor Massart, ancien cadre de la Sûreté, précise dans son livre « Les dés étaient pipés – Conspirations à la Sûreté de l’Etat » en rappelant que Michel Dufrasne, ancien inspecteur à la Sûreté, témoigna devant une Cour d’Assises en parlant de la section, au sein de la Sûreté, qui devait exécuter « les coups tordus et les crasses de Raes ».
 
[3]  Bernard Bouloc, jurisconsulte de réputation internationale, professeur à Paris à la Sorbonne.
 
[4]  La raison d’état peut être invoquée dans des questions de défense nationale ou de terrorisme. Invoquée dans d’autres cas, on peut se demander si l’Etat ne perd pas alors… la raison.
 
[5]  Les sérieux dysfonctionnements du pouvoir judiciaire dans cette affaire Sûreté de l’Etat sont à dissocier de la façon dont le pouvoir judiciaire remplit normalement sa fonction, cela dans des conditions difficiles qui place la Belgique en queue de peloton de l’Union Européenne pour la part du produit national brut qui lui est attribuée.
 
[6]  Commentaires du professeur Bouloc sur cet arrêt de la Cour de Bruxelles du 12 mars 1992.
 
[7]  Reinier Van Camp, officier de police judiciaire, membre du Comité permanent de contrôle des services de renseignements et de sécurité, connu sous le nom de Comité R ayant la responsabilité de contrôler les agissements de la Sûreté de l’Etat. Il  fut chargé d’examiner la plainte de Benoît de Bonvoisin concernant la (fausse) note Sûreté de 1981 le concernant. Si M. Van Camp eut, au départ, le soutien total de son Président pour faire la lumière et faire éclater la vérité entourant cette note, ce fut tout le contraire lorsqu’un nouveau président fut nommé à la tête du Comité R.